Compléter l'agenda du G20

Roman Frydman, professeur d'économie à l'université de New York, et Michael D. Goldberg, professeur d'économie à l'université du New Hampshire, sont les auteurs d'un livre intitulé "Imperfect Knowledge Economics : Exchange Rates and Risk" ("Economie de la connaissance imparfaite : taux de change et risque").

En appelant à des mesures destinées à "prévenir le risque systémique", le sommet du G20 a reconnu que le système financier dans son ensemble, et pas seulement les institutions financières, doit être réglementé. Malheureusement, le communiqué propose les mêmes remèdes déjà avancés par le Forum de stabilité financière (FSF) ou la Réserve fédérale américaine et bien d'autres...

Ces remèdes entendent répondre au manque de transparence, aux effets de levier excessifs, aux paradis fiscaux, aux parachutes dorés et aux conflits d'intérêt. Tous ces points sont importants. Mais une question essentielle a été négligée. Si la baisse des prix des actifs a provoqué et alimenté la crise, une baisse persistante et excessive des prix risque d'entraîner l'économie mondiale dans une crise encore plus profonde.

Contenir les risques systémiques implique donc de comprendre que les risques varient en fonction de la valeur des actifs. Si les institutions financières avaient compris cela, elles auraient augmenté leurs fonds propres durant la période d'euphorie pour se protéger de l'inévitable inversion de tendance. L'une des raisons de ce manque de clairvoyance est à rechercher dans les normes prudentielles de Bâle II, qui définissent la manière dont les banques doivent évaluer leurs risques de crédit et par conséquent, leur niveau de fonds propres.

Or, ces normes reposent sur une évaluation des risques bâtie sur la volatilité à court terme des marchés et ne prévoient donc pas explicitement de fluctuations à long terme des marchés. En résumé, moins de fonds propres sont exigés pendant les périodes stables et plus de capitaux sont nécessaires lors des périodes de forte volatilité. L'exigence de fonds propres tend donc à être procyclique, ce qui augmente le risque systémique au lieu de le réduire. Le G20 a certes appelé à une révision des normes de Bâle II et l'exemple de l'Espagne tend à montrer que ce sera un pas dans la bonne direction.

Mais cette révision ne sera pas suffisante parce que les portefeuilles des banques sont vulnérables aux risques liés aux fluctuations à long terme des marchés. Il faut que l'exigence de fonds propres des banques varie inversement aux fluctuations des marchés auxquels elles sont fortement exposées. Le lien entre les risques financiers et les variations des prix des actifs est apparu au moyen d'une nouvelle approche - "l'économie de la connaissance imparfaite" - pour comprendre le risque et les fluctuations des marchés d'actifs.

Cette approche implique que davantage de mesures peuvent être prises pour réduire le risque financier systémique, au-delà de la réforme du calcul des risques et de l'adéquation des fonds propres. Selon ce concept, dans des limites raisonnables, le marché parvient mieux (quoi qu'imparfaitement) à fixer des prix que les régulateurs. Mais les fluctuations du marché peuvent tomber dans l'excès. La leçon de cette crise est que les variations excessives doivent être atténuées par des mesures prudentielles. Une mesure possible serait de fixer des fourchettes des cours, avec des recommandations de fluctuations de marge et de capital, pour limiter les mouvements au-delà de ces fourchettes.

Le point essentiel de ces mesures est qu'elles s'appliquent différemment selon que l'actif est sur- ou sous-évalué par rapport à sa fourchette. L'objectif est de décourager les transactions qui ont tendance à faire s'envoler les prix et d'encourager celles qui les maintiennent dans la fourchette. Améliorer la capacité des marchés financiers à se corriger pour tendre vers une stabilité des valeurs est l'objectif même d'une réglementation prudentielle. Les restrictions sur la vente à court terme, que certains ont proposées - et toutes autres mesures qui ne tiennent pas compte de la sur ou sous-évaluation d'un actif - sont un facteur éventuel de plus grande instabilité.

Des règles bénéfiques dans certaines circonstances peuvent s'avérer contre-productives dans d'autres. L'opinion selon laquelle le monde aurait besoin de plus de règles fixes ne tient pas. Malheureusement, la théorie économique, qui présume du prix parfait des marchés d'actifs, a découragé les économistes et les politiques à tenir compte du rôle des variations du prix des cours dans la gestion du risque systémique. La crise mondiale actuelle montre que ce facteur est pourtant fondamental et qu'il ne peut plus être négligé.

© Copyright Project Syndicate 2009
 

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