Trouver une vraie trajectoire vers l'équilibre financier

Par Jacques Mistral, membre du Conseil d'analyse économique.
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Il faut rendre cette justice au président, il a constamment fait face à la crise avec rapidité et énergie, qui ne peut l'en féliciter ? Depuis quelques mois, il a adopté, en matière financière, une posture rigoureuse, qui peut être contre ? Dans la campagne qui s'annonce, le candidat mettra ces atouts en valeur. De même, le budget présenté en Conseil des ministres est un budget préélectoral, c'est inévitable. Le gouvernement en donnera une présentation flatteuse, rigueur et volontarisme, l'opposition - forte de sa nouvelle majorité sénatoriale - en fera la critique : injustice et manque de sincérité. Mais l'essentiel est ailleurs.

Le problème de fond que révèle ce budget est à la conduite de la politique économique, fiscale et financière ce que l'élection de dimanche est à la vie politique : un constat d'échec. Ce budget ne mène nulle part pour une raison simple : il clôt un cycle de politique économique qu'il est impossible de résumer ni par ses objectifs initiaux - qui sont toujours restés confus (sortir la France de l'immobilisme, défendre le pouvoir d'achat, protéger contre la désindustrialisation) -, ni par les moyens mis en oeuvre - qui ont tous été plus ou moins remis en cause (le bouclier fiscal, la société de propriétaires, le Grenelle de l'environnement) -, ni par les résultats atteints - emploi, comvmerce extérieur, finances publiques, justice sociale, on n'a jamais été aussi loin du carré magique depuis 1958 !

La pierre angulaire de cet échec, ce qui enlève aujourd'hui toute marge de manoeuvre au gouvernement, c'est le mépris trop longtemps affiché pour l'équilibre financier, malgré les mises en garde précoces du Premier ministre lui-même ; et, dans le contexte européen actuel, cela se paie cher. Nos finances publiques sont sur une pente non soutenable : la France est le seul parmi les pays triple A de la zone euro à avoir un déficit primaire (après charges d'intérêt) hors contrôle et le seul à enregistrer un important déficit des paiements extérieurs. La suspicion des investisseurs est d'ores et déjà éveillée : ils ne paieront pas indéfiniment nos services publics, notre santé et nos retraites. Et il n'est pas vrai que la réduction nécessaire de notre déficit primaire - pour un montant de l'ordre de 80 milliards d'euros en trois ans, selon une estimation courante - se produira spontanément, sans douleurs, comme le suggère la trajectoire de retour à l'équilibre sur laquelle comptent aussi bien le gouvernement que l'opposition. Pour s'inscrire dans une trajectoire sincère vers l'équilibre, un budget conséquent pour 2012 devrait prévoir 8 milliards d'euros de recettes en plus, et 8 milliards d'économies supplémentaires.

Le budget est toujours un moment de vérité. Ce que masque ce budget 2012, mais ce que révèle en petits caractères le train de mesures de l'été, c'est l'arrivée prochaine, inéluctable de la rigueur, la vraie. Avis de mauvais temps pour la campagne présidentielle, donc. Mais, au fond, puisque la rigueur ne sera pas un choix, c'est en fonction de la clarté des objectifs poursuivis et de la justice dans le partage des efforts demandés que les Français devront se déterminer.

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Commentaire 1
à écrit le 28/09/2011 à 8:58
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Un constat lucide.

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