"L'Inde pourrait bien devenir une place forte du bitcoin"

Garrick Hileman, économiste, de la London School of Economics, et Shakil Khan, responsable des projets spéciaux chez Spotify, s'interrogeaient mardi sur l'avenir du bitcoin à l'occasion de la conférence dédiée au numérique, LeWeb13. L'occasion d'interroger un chercheur en finances français. Philippe Herlin*, pour qui le bitcoin a de l'avenir, et en particulier en Asie.
Philippe Herlin est l'auteur du livre numérique "La révolution du bitcoin et des monnaies complémentaires, une solution pour échapper au système bancaire et à l'euro?", paru en mai 2013.

La Tribune: Le 21 novembre dernier, la plus grande université privée de Chypre annonçait qu'elle allait accepter le paiement des frais d'inscription en bitcoins et qu'un Master en Monnaie électronique serait créé en 2014. A cette occasion, le directeur financier de l'établissement, Chritos Vlachos, affirmait : « la monnaie digitale est un développement technologique inévitable, qui mènera à des innovations importantes pour le commerce en ligne et les systèmes financiers ». Pourquoi les bitcoins deviendraient-ils incontournables ?

Philippe Herlin*: Je suis d'accord avec cette affirmation. L'intérêt essentiel du bitcoin c'est la faiblesse des coûts de transactions. Échanger en bitcoins revient bien moins cher que passer par une carte bancaire ou par Paypal. Il y a donc là un vrai argument pour que ce type de monnaie perce dans le domaine du e-commerce.

Par ailleurs, le paiement via mobile est en train de se développer . Et l'avantage du bitcoin, est la possible interopérabilité qu'il réserve : les codes du réseau bitcoin étant ouverts, cela favorise l'effet réseau.

Aujourd'hui, la Chine est le pays où l'engouement pour le bitcoin est le plus massif. Pourquoi un tel succès et dans quel pays celui-ci a-t-il particulièrement de chances de se propager ?

Lorsqu'on utilise le bitcoin, on échappe au contrôle des banques centrales.  Donc pas de risque inflationniste puisqu'il n'y a pas à proprement parler de création monétaire soudaine. Ceci est un élément de confiance. Mais surtout, utiliser une telle monnaie c'est échapper au contrôle des changes, avantage auquel les Français ne sont pas forcément très sensibles (le contrôle des changes est aboli en France depuis 1989, ndlr) mais qui devient réel dans des pays comme la Chine. Le bitcoin séduira probablement aussi beaucoup en Argentine.

Dans les années à venir, l'Inde pourrait bien devenir une place forte du bitcoin. Trois raisons à cela : les Indiens aiment l'or et la valeur refuge qu'il représente. Lorsqu'ils verront que le bitcoin fonctionne de la même manière (leur quantité est limitée, ndlr), cela va les séduire. De plus, leur monnaie, la roupie, ne vaut plus grand-chose et enfin, les Indiens sont doués en informatique. Le bitcoin peut donc vite prendre racine en Inde.

2013 a été l'année de découverte du bitcoin pour beaucoup de non initiés aux monnaies électroniques. L'effet mode peut-il s'estomper?

Aujourd'hui, la masse de bitcoins en circulation dans le monde équivaut à environ 9,6 milliards d'euros. Cela reste encore faible comparé aux volumes échangés via les cartes bancaires. Je reste persuadé que le bitcoin n'en est pas encore à son prix d'équilibre et que son cours peut encore être multiplié par 10. J'estime que le nombre d'acteurs de l'économie acceptant cette monnaie va encore beaucoup progresser. Rien qu'aux États-Unis, en 2013, environ 100.000 commerçants acceptent les bitcoins. Ils étaient dix fois moins en 2012.

Néanmoins, il est vrai qu'il existe aujourd'hui un risque réel de se faire voler ses bitcoins. En détenir signifie qu'il faut être en mesure de protéger correctement son ordinateur ou bien passer par un intermédiaire du type Bitcoin-Central. Cette difficulté technique est un frein à l'utilisation du bitcoin par le grand public, et à la confiance qu'il lui accorde. D'autant qu'aux Etats-Unis, deux plateformes se sont récemment fait voler l'intégralité de leurs bitcoins (Le service de portefeuille Inputs.io s'est fait dérober l'équivalent de 1,2 millions de dollars le 7 novembre 2013, ndlr). Il manque encore des structures inspirant confiance.  Mais avec le temps, quelques grands acteurs devraient se démarquer.

(*) Philippe Herlin est l'auteur du livre numérique "La révolution du bitcoin et des monnaies complémentaires, une solution pour échapper au système bancaire et à l'euro?", paru en mai 2013.

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Commentaire 1
à écrit le 11/12/2013 à 22:12
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Je trouve que l analyse est un peu légère de la part d un économiste. Si le bitcoin est risqué, outre le fait de se faire voler son portefeuille, c est surtout parce que la confiance dans cette monnaie virtuelle peut s effondrer d'un coup. La volatil...

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