Le CEO Forum d'Abidjan prône plus d'intégration et l'industrialisation de l'Afrique

Un passeport unique pour permettre aux Africains de voyager sans visa et de l'électricité pour tous, tels sont les deux objectifs principaux à atteindre rapidement pour améliorer l'environnement des affaires et changer la donne économique sur le Continent.
Le Nigérian Akinwumi Adesina, président de la Banque africaine de développement (BAD), et Mohammed Boussaïd, ministre marocain de l'Économie, lors du VIe Africa CEO Forum d'Abidjan (21-22 mars 2016).

Première édition à se tenir sur le continent africain, le IVe Africa CEO Forum, qui vient de réunir les 21 et 22 mars à Abidjan un millier de décideurs du secteur privé, a ouvertement prôné davantage d'intégration africaine pour répondre aux exigences des chefs d'entreprise voulant accompagner et profiter de la croissance d'un certain nombre de pays. Et donner aussi un coup d'accélérateur au développement dont doivent bénéficier par contrecoup les populations locales.

Le Nigérian Akinwumi Adesina, président de la Banque africaine de développement (BAD, coorganisatrice du Forum) s'est ainsi réjoui que l'Afrique connaisse aujourd'hui une croissance moyenne de 4,4 % (contre à peine 1 % en Europe) mais a insisté sur l'urgence de traduire cette croissance en emplois. Et donc sur l'urgence « que nous ayons un passeport unique en Afrique » pour faciliter notamment les voyages des hommes d'affaires qui veulent créer des richesses et ainsi davantage d'emplois. Pour accroître également au maximum l'intégration africaine en développant les échanges Sud-Sud. Car, a-t-il souligné, « l'Afrique doit s'industrialiser et ne pas chercher de solutions ailleurs », même si elle est confrontée aux problèmes de l'énergie et des infrastructures. « Nous devons éclairer l'Afrique dans les dix prochaines années », a encore souligné le président de la BAD, qui a fait de l'électrification du continent l'une des cinq priorités de son mandat.

La Côte d'Ivoire va doubler sa production d'électricité

En écho à cette exigence, le président ivoirien Alassane Ouattara a annoncé que la Côte d'Ivoire allait doubler sa production électrique, qui est actuellement de 2000 mégawatts, pour la porter à 4000 mégawatts (ce qui correspond à l'actuelle capacité du Nigeria) à l'horizon 2020. Et a ainsi promis que tous les villages de plus de 500 habitants auront de l'électricité d'ici à 2018. Un véritable défi à relever, mais qui pourrait rapidement changer la vie quotidienne de millions d'habitants des zones rurales, avec tout ce que cela induit de développement et de consommation.

Même s'il y a parfois loin de la coupe aux lèvres, entre les annonces médiatiques et leurs réalisations pratiques, la Côte d'Ivoire - qui connaît une croissance moyenne de 9 % depuis ces cinq dernières années - semble cependant avoir les moyens de faire accomplir ce saut qualitatif à l'économie du pays. Il n'en ira évidemment pas de même dans tous les pays voisins.

« Je mange du chocolat tous les jours, c'est un devoir citoyen »

Face à un environnement international morose avec des cours des matières premières en forte chute et des marchés financiers internationaux montrant des signes inquiétants de repli sur les pays émergents, le président ivoirien a appelé à la transformation structurelle des économies africaines.

« Le développement, a-t-il ainsi souligné, passe par la transformation de nos économies, notamment par l'industrialisation du continent afin que l'Afrique absorbe une plus grande part de valeur ajoutée dans la transformation des matières premières qu'elle exporte. C'est ainsi que notre continent pourra créer encore plus de croissance, plus de richesses et plus d'emplois ».

L'exemple du cacao, dont personne n'ignore que la Côte d'Ivoire est le premier pays producteur au monde avec 28 millions de tonnes, est à cet égard extrêmement révélateur, puisque 33 % seulement de cette production est transformée localement. L'objectif est donc d'atteindre rapidement les 50 %. Et tous les moyens sont bons pour faire la publicité de cet or noir de la Côte d'Ivoire qu'est la fève de cacao. « Quand je suis à l'étranger, je mange du chocolat tous les jours, c'est un devoir citoyen », confiera ainsi le président Ouattara, en appelant tous ses compatriotes à faire de même.

Hôte du Forum, le gouvernement ivoirien a d'ailleurs mis les petits plats dans les grands en listant et présentant 124 Projets Public-Privé (PPP) et en organisant une table-ronde à laquelle participaient pas moins de sept ministres (Pétrole et Énergie, Industrie, Commerce, Transports, Infrastructures économiques, etc.) pour séduire les investisseurs. D'où la remarque de Jean-Louis Billon, ministre du Commerce, faisant observer que « Le port autonome d'Abidjan n'a pas été concçu que pour la Côte d'Ivoire, mais comme un débouché maritime aussi pour le Niger, le Mali ou le Burkina Faso  qui n'ont pas d'accès à la mer ». Avant d'ajouter : « Ce qui manque à l'Afrique, c'est plus d'infrastructures pour plus d'intégration ».

« Si on ne prend pas de risque, on ne peut pas réussir ! »

Très présent et actif également dans ce Forum, le Maroc était représenté par plusieurs ministres qui ont tous insisté pour leur part sur la nécessité d'une plus grande intégration africaine, passant inévitablement par la régionalisation des courants d'affaires pour multiplier les échanges et créer des synergies. « Il faut que l'Afrique - qui a des opportunités phénoménales, voire invraisemblables - sache s'insérer dans la mondialisation », a ainsi souligné le ministre marocain de l'Industrie, Moulay Hafid Elalamy.

Et pour être plus fort sur la scène internationale et peser dans certains secteurs, il faut en quelque sorte commencer près de chez soi. « La régionalisation est un élément fondamental », a confié son collègue de l'Économie, Mohammed Boussaïd, participant au Grand débat : « L'intégration régionale est-elle en panne ? ». Avant de conclure : « L'intégration est plus qu'une nécessité, c'est un impératif de sécurité », vu l'actualité.

« Mais pour avoir une bonne sécurité dans nos pays, il faut d'abord donner du travail aux jeunes », car la jeunesse désœuvrée constitue en Afrique « une bombe à retardement », devait conclure Moïse Katumbi, ex-gouverneur de la province minière du Katanga et candidat décidé à défier le président Joseph Kabila pour la prochaine échéance présidentielle d'ici la fin de l'année en RDC. Avec en tête une seule idée, qui résume parfaitement la philosophie de l'engagement politique de cet ancien chef d'entreprise : « Si on ne prend pas de risque, on ne peut pas réussir ! »

...

Retour au SOMMAIRE EUROMED-AFRIQUE

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.