« L'Afrique, c'est 55 pays et 17 % de la population mondiale, mais moins de 5 % du trafic aérien. Il y a là un paradoxe », souligne Gilles Darriau, DG d'Aéria, une filiale du groupe Egis qui exploite l'aéroport international Félix Houphouët-Boigny d'Abidjan, et cherche tous les moyens de mettre fin au plus vite à cette anomalie.

Cet aéroport, désormais desservi par une vingtaine de compagnies aériennes et qui a franchi en 2015 le cap d'un million et demi de passagers (contre 966 000 en 2012), a l'ambition de devenir un hub et même « le centre de l'Afrique ».

Pour atteindre ce but, Gilles Darriau a donc décidé de s'en donner les moyens : un plan de 40 milliards de Francs CFA (soit 60 millions d'euros) d'investissements est déjà en cours pour couvrir jusqu'en 2019 les travaux d'agrandissement et de modernisation de la plateforme aéroportuaire, afin de « faire face à la croissance exponentielle du trafic aérien » dans les prochaines années. L'idée est d'augmenter le nombre de places de parking, de créer un taxi way parallèle à la piste et un centre de maintenance pour les avions, de tripler la surface de l'aérogare pour pouvoir y accueillir d'ici à 2025 jusqu'à 10 millions de passagers, puis de construire également un terminal d'affaires, qui fait cruellement défaut.

« Investir en Côte d'Ivoire, c'est le meilleur placement »

Gilles Darriau se réjouit donc du retour de Corsair à Abidjan car, explique-t-il, « cela répond à une attente de la population ivoirienne ». Spécialiste du long courrier international, la compagnie française - que dirige Pascal de Izaguirre - avait dû en effet interrompre ses vols Paris-Abidjan en octobre dernier, à la suite notamment d'une augmentation dissuasive des taxes aéroportuaires. Huit mois plus tard, Corsair International vient cependant de reprendre ses vols AR Paris-Abidjan, le 13 juin.

« Nous rouvrons la ligne avec quatre vols par semaine, et si possible bientôt six, avec pour objectif de transporter 100 000 passagers par an et de prendre 30 % de parts de marché », explique Antoine Huet, directeur général adjoint de Corsair, à l'issue d'un vol inaugural le 16 juin pour médiatiser cette reprise. Une occasion de réaffirmer le positionnement de la compagnie : « Notre ADN, c'est de proposer le meilleur rapport qualité/prix du marché sur les destinations que nous desservons ». Avant d'ajouter : « Nous sommes engagés à développer la destination Côte d'Ivoire au départ de Paris, non seulement d'un point de vue touristique, mais aussi pour le voyage d'affaires. C'est pourquoi les prix de nos billets seront plus compétitifs ».

Vice-président de la Chambre de Commerce et d'Industrie de Côte d'Ivoire, Georges Armand Akobe confirme : « Lorsque Corsair a ouvert la ligne sur Abidjan en mars 2013, les tarifs ont baissé de 30 % et, quand la compagnie a dû interrompre ses vols en octobre 2015, les tarifs ont à nouveau connu une hausse vertigineuse. Pour les entreprises voulant investir chez nous, ce fut une catastrophe ». Ainsi le milieu des affaires se félicite-t-il du retour de Corsair. Car la Côte d'Ivoire est redevenue une destination attractive, avec une croissance moyenne de 9 % au cours des cinq dernières années.

« Investir en Côte d'Ivoire, c'est le meilleur placement », assure d'ailleurs le ministre ivoirien des Transports, Gaoussou Toure, fier que son pays ait enfin adopté une loi pour encadrer et limiter au maximum les taxes qui étouffent l'économie. Et permettre ainsi « que l'émergence soit pour la Côte d'Ivoire une réalité à l'horizon 2020 ».

« La Côte d'Ivoire est une locomotive qui permet aux autres pays de la région de profiter de sa croissance économique. Abidjan est devenu un hub incontournable pour les compagnies aériennes, mais également un hub financier pour les banques et les assurances et un hub médical, puisque l'on vient ici se faire soigner », souligne pour sa part l'ambassadeur de France, Georges Serre.

« Grand-Bassam est aujourd'hui la zone la mieux protégée »

La Côte d'Ivoire « constitue la porte d'entrée d'un marché sous-régional de 300 millions de consommateurs », se félicite Emmanuel Essis, DG du CEPICI (Centre de promotion des investissements en Côte d'Ivoire)... Reste bien évidemment la question de la sécurité, trois mois après l'attentat de Grand Bassam qui fit 19 morts et des dizaines de blessés. « Il faut rassurer la population, les expatriés et les touristes pour leur permettre de revenir à Bassam en toute sécurité. C'est notre nouveau défi », souligne Jacques Ablé, propriétaire de l'Étoile du Sud, l'hôtel qui fut aux premières loges de l'attaque terroriste du 13 mars.

« Personne n'est à l'abri d'une folie meurtrière. En attaquant Grand-Bassam, on a visé la France, mais Grand-Bassam est aujourd'hui la zone la mieux protégée du pays », explique Jean-Marie Somet, DG de Côte d'Ivoire Tourisme, en lançant un appel à tous les touristes étrangers ou du moins « les plus courageux » à rependre le chemin de la Côte d'Ivoire. « Nous avons horreur du tourisme de masse », ajoute-t-il, et préférons développer le tourisme d'affaires, le tourisme culturel avec quelque 60 ethnies à découvrir, ou l'éco-tourisme ».

Autant de niches fort prometteuses pour le pays des Eléphants, où vont se multiplier dès cet été les festivals comme celui d'Assouinde « Vacances-Culture » du 16 au 31 juillet, à proximité des plages magnifiques d'Assinie. Toute cette région du Sud-Comoë est bien décidée à mobiliser sa jeunesse et les chefs de village  pour faire revivre les traditions et y faire revenir les touristes.

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