Shannon Picardo, il réinvente le soutien scolaire

À 22 ans, avec sa startup Schoolmouv, ce Toulousain a réussi à s'imposer sur le marché du soutien scolaire. Sa recette : des vidéos écrites par des profs de lycée et jouées par des comédiens.
Shannon Picardo, fondateur de Schoolmouv

Shannon Picardo fait partie de cette génération d'entrepreneurs très précoce. C'est à l'âge de 17 ans qu'il a l'idée de Schoolmouv. Le lycéen aveyronnais est alors en pleine révision du bac :

« Je n'avais pas les moyens de me payer des cours particuliers et j'ai cherché sur Internet des vidéos pour réviser. Je me suis aperçu qu'il n'existait pas de site dédié. J'ai seulement trouvé sur YouTube quelques vidéos de professeurs se filmant avec leur webcam. Cela m'a beaucoup aidé : j'ai eu 16 à mon épreuve de géographie », se rappelle le jeune homme.

Une fois son bac en poche, il intègre un bachelor de TBS (Toulouse Business School) et, en parallèle, l'incubateur de l'école. « Des étudiants comme lui, on n'en voit pas arriver tous les quatre matins. Il était extrêmement dynamique, très mature pour son âge, avec beaucoup de charisme et une vision nette de ce qu'il voulait faire », témoigne Olivier Igon, directeur général de la société Menguy's, qui a été son coach à l'incubateur.

Une idée simple... et efficace

L'idée : créer une plateforme de vidéos en ligne pour permettre aux élèves de réviser toutes les matières des épreuves, du brevet et du baccalauréat. Dès le début, l'étudiant s'entoure de professeurs de l'Éducation nationale qui rédigent les textes, mais il abandonne très vite l'idée de les faire passer devant la caméra.

« Ce n'est pas leur métier, les profs sont habitués à faire cours devant une classe, mais ils ne sont pas à l'aise devant un objectif », relève Shannon.

Du coup, il fait appel à des comédiens professionnels pour jouer les fiches de cours (un par matière enseignée) et recrute un ancien de Canal + pour la réalisation.

La première vidéo est mise en ligne à la rentrée 2013 et connaît un succès prometteur : plus de 30.000 visites et des dizaines de commentaires enthousiastes de la part de lycéens, qui réclament de nouvelles vidéos. Tous les codes de YouTube sont repris : les vidéos sont courtes (une dizaine de minutes en moyenne), l'acteur parle face caméra pendant que s'affichent sur l'écran le plan du cours et des infographies dynamiques.

Aujourd'hui, Schoolmouv a produit près de 200 vidéos qui couvrent l'ensemble des matières au programme, de la troisième à la terminale. Dernier fait d'armes : après avoir levé 250.000 euros via WiSEED et BPIfrance, Schoolmouv vient d'annoncer une levée de fonds de un million d'euros auprès de BPIfrance et de grands noms du Web : Xavier Niel, le fondateur de Free, via le fonds Kima Ventures ; Frédéric Mazzella, le président de BlaBlaCar ; Studio, ou encore Capitol Angels. Hébergée chez At Home, une colocation de startups dans l'hypercentre de Toulouse, la jeune pousse est un peu à l'étroit.

« Nous sommes passés en trois mois de 6 à 22 personnes ! », lance Shannon.

À 22 ans, il fait partie de cette génération de startuppeurs en plein essor dans la Silicon Valley, ceux qui créent leur boîte avant même d'obtenir leur diplôme du supérieur.

« Je pense que mon père m'a transmis la fibre entrepreneuriale. Au Portugal, où il est coiffeur, il a monté l'une des plus importantes chaînes de salons de coiffure du pays. Ma mère est de son côté professeure d'anglais et d'arts plastiques, elle m'a donné cet intérêt pour l'éducation. »

Mais au-delà de l'inspiration familiale, Shannon Picardo dit avoir été très influencé par le film The Social Network, qui retrace le parcours de l'inventeur de Facebook, Mark Zuckerberg :

« C'est un peu cliché, mais je pense que ça a participé à la démocratisation de l'entrepreneuriat. Pour toute une génération de startuppeurs, savoir qu'il a pu créer son site alors qu'il était encore étudiant à l'université a été un moteur. Il y a cette démocratisation culturelle et puis des outils techniques qui permettent de créer sa boîte en dix clics. Sans YouTube, je n'aurais jamais pu lancer Schoolmouv. »

Plus de 80 profs travaillent pour la plateforme

Les enseignants sont recrutés par Damien Jolibert. Professeur d'anglais dans le secondaire, il s'est mis en disponibilité pour se consacrer au projet :

« Ça n'a pas vocation à nous remplacer, il s'agit d'un outil complémentaire pour la révision. Les professeurs peuvent aussi donner en devoir le visionnage d'une vidéo avant le cours, et cela leur permet de se concentrer sur l'individualisation de l'enseignement. »

Depuis la rentrée, une centaine d'élèves du lycée hors contrat le Cours Rousselot Voltaire, à Toulouse, disposent d'un abonnement à la plateforme. Le modèle économique du site repose sur l'abonnement : les cinq premières vidéos sont gratuites, puis une formule à 30 euros par mois est proposée. Le fondateur de Schoolmouv ne souhaite pas divulguer le nombre d'inscrits à la plateforme, mais annonce 1.000 nouvelles inscriptions par jour sur le site.

« Le principal défi sera de convaincre les parents de payer pour un service que les enfants ont adopté. C'est un renversement inédit sur le marché de l'éducation. Habituellement, ce sont les parents qui imposent les cours particuliers à leurs enfants. Là, les élèves se sont appropriés l'outil, remarque Côme Courteault, chargé du développement des startups au sein de TheFamily, société d'investissement parisienne qui suit de près le parcours de la jeune société toulousaine. Ce succès s'explique en partie par le fait que Shanonn Picardo a crée Schoolmouv alors qu'il était toujours au lycée. Aujourd'hui encore, il garde une très grande proximité avec les élèves qui utilisent le site. »

Shannon scande fièrement : « Certains lycéens nous ont même envoyé des scans de leurs bulletins de notes, pour nous remercier. »

Prochain objectif de la startup : couvrir l'ensemble des matières, du primaire au bac.

 ______

MODE D'EMPLOI

  • Où le rencontrer ? Chez At Home, la colocation de startups implantée en plein centre-ville de Toulouse.
  • Comment l'aborder ? Directement, depuis le chat en ligne de Schoolmouv.
  • À éviter ! La lettre de motivation générique envoyée par mail : « Il faut montrer son intérêt pour l'entreprise à laquelle on postule », relève-t-il.

TIME LINE

  • Octobre 1993 Naît à Lagos (Portugal).
  • 1996 Arrive en France.
  • 2011 Obtient son bac et a l'idée de créer des vidéos de révisions.
  • 2013 Crée Schoolmouv et met en ligne la première vidéo sur YouTube.
  • 2014 Lève 250 000 euros.
  • 2015 Lance officiellement le site.
  • 2016 Embauche 15 personnes et lève un million d'euros.
  • 2018 Schoolmouv projette de couvrir l'ensemble des programmes scolaires.

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaire 1
à écrit le 27/06/2016 à 9:38
Signaler
Sur le fond, ça ne vaut rien. Ce n'est qu'un révélateur de plus de la faillite de l'école.

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.