Femmes de tête, femmes esthètes

Pour la première fois, douze femmes d’influence, mécènes, toutes passionnées d’art contemporain, ont accepté d’exposer ensemble et de dévoiler ensemble ce qui les touche au plus profond de leur sensibilité. Une exposition à découvrir en urgence avant le 16 décembre.
« femmes de tête, femmes esthètes »

Depuis plus de 20 ans, deux sœurs, Pascale Cayla et Virginie Epry, impriment leur marque dans l'univers des entreprises en France. Leur moto ? Introduire l'art contemporain dans les entreprises, faire se rencontrer deux mondes qui jusqu'à peu ne se parlaient guère, tout du moins ne se comprenaient pas. En se fixant pour vocation de dresser une passerelle, où chacun se nourrit du savoir, de l'intelligence de l'autre pour mieux grandir et s'épanouir, leur association, l'Art en direct s'est imposée comme un leader dans le conseil, la stratégie de communication et la production d'événements. Leur obsession ? Créer un dialogue stimulant pour changer les mentalités et casser les raisonnements d'arrière-gardes. Se tourner résolument vers la création contemporaine sous toutes ses formes.

Dans le prolongement de leur agence de communication par l'art contemporain, leur lieu, la vitrine se veut être un espace de rencontres pour les entreprises et les artistes. Après le Chalet Society, centre d'art nomade de Marc-Olivier Wahler, le bar éphémère Dom Pérignon en collaboration avec Jeff Koons, elles ont décidé cet hiver de mettre en lumière des femmes, entrepreneures, managers, banquières, toutes responsables à la tête d'entreprises exigeantes qui collectionnent des œuvres d'art contemporain.

C'est une première. Si des personnalités Peggy Guggenheim, Gertrude Stein ou Dina Vierny ont marqué l'histoire de l'art pour leurs rôles de mécènes, on cherche aujourd'hui pour savoir qui sont les François Pinault ou Bernard Arnault au féminin ? Là encore, la médiatisation du mécénat de l'art contemporain est marquée par la domination masculine. D'où l'intérêt et l'originalité de cette exposition.

Au total, elles sont 12 femmes collectionneuses à avoir accepté d'exposer un artiste dont elles apprécient particulièrement les créations et d'expliquer leur choix.

Leurs sélections peuvent relever de la part sensible. C'est le cas pour Patricia Barbizet, directrice générale, Artémis « Une œuvre doit susciter une émotion, immédiate ou plus tardive, mais elle ne laisse jamais indemne. J'aime la culture sous toutes ses formes et dans tous ses langages : les images bien sûr, mais aussi les mots et les notes. »

Toute collection reflète l'intime, reconnait Valérie Bernard, directrice et rédactrice en chef, GirafProd « Une collection, c'est un peu comme si l'on écrivait son propre livre, c'est très révélateur de chacun... »

Pour d'autres, au delà de l'émotion sensible, ce qui les touche particulièrement, c'est la puissance visionnaire d'une œuvre et d'un artiste. « L'art permet de mieux comprendre l'évolution de la société, raconte Floriane de Saint Pierre, présidente de Saint-Pierre & Associés, « S'immerger dans le travail des artistes est nécessaire selon moi pour deux raisons : par empathie avec mon époque et pour me nourrir des éclaireurs que sont les artistes. L'art c'est ma gymnastique ! J'y consacre une heure tous les jours, le soir tard. »

De l'avis de Fanny Picard, présidente Alter Equity, « Les artistes expriment leurs émotions alors que dans nos métiers nous les bridons. Entrer dans leur travail me conduit à m'interroger, aux confins même de mes questionnements sur l'identité, l'engagement, les valeurs, la politique, les jeux sociaux, comportementaux. »

Qu'est-ce qui les incite à acquérir une œuvre plutôt qu'une autre ? Comment achètent-elles ?« J'ai vite compris que l'art relevait à la fois de la symbolique et de la signification, que derrière l'émotion il y avait toujours du sens. » explique Fatine Layt, directrice générale ACG. « C'est finalement le seul domaine où je me laisse guider uniquement par l'émotionnel, à l'inverse de ma vie professionnelle, régie par le rationnel et la logique. »

Quelle place est réservée au coup de cœur ? Au grain de folie ? « Je m'offre une œuvre comme une gratification, comme une récompense. C'est une échappatoire qui me nourrit plus que je ne l'aurais imaginé. » avoue Isabelle Capron, vice-présidente Shanghai Fashion Group. « Au-delà du choc émotionnel, j'ai besoin d'une énorme surprise, d'une altérité. Les créateurs ont la capacité de lire la part invisible de nos inquiétudes, de nos futurs et de nous envoyer des signaux. » soutient Nathalie Rastoin, directrice générale Ogilvy France. « Un publicitaire doit être dans le monde, ni en avance, ni en retard. L'art donne un peu d'avance et permet de conserver une saine inquiétude. »

Parmi les artistes exposés, la vidéaste Cécile Le Talec, mise en avant par Catherine Vautrin, la directrice générale de Paule Ka, a particulièrement marqué les esprits. Sa vidéo, dans laquelle les musicologues reconnaîtront au tapotement des doigts et de leurs empreintes de lumière sur un clavier imaginaire, la construction rythmique d'une flûte de Bach. Non loin, Diane Thalheimer-Krief a choisi de prêter la toile Red de Joseph Kosuth ; cet artiste figure parmi les plus éminents créateurs de l'art conceptuel. Pour lui, son travail n'a qu'un but « produire du sens ». Ce qui fait formidablement écho avec l'œuvre de Banksy, prêtée par Cristiana Falcone Sorrell. Chaque création se répond sans le vouloir dans la galerie ; la sélection des 12 collectionneuses nous invite finalement à toujours plus nous intéresser à la création des plus avant-gardistes. Plus que jamais, c'est lui qui ouvre la voie apaisée en ces temps troublés.

Pour en savoir plus et mieux comprendre ces « femmes de tête, femmes esthètes », la vitrine organise par ailleurs chaque lundi soir des conversations autour de l'art contemporain. La prochaine rencontre sur le mécénat au féminin aura lieu le 30 novembre, à partir de 19 h.

La Vitrine, 24 rue Richelieu, 75001 Paris

Pour en savoir plus : www.femmesdetete.fr

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