Le commerce restera l'âme de la ville

Le commerce est le grand oublié de la ville du futur. Le « smart commerce » de la « smart city » est bien théorique. Vente-privee.com n'existe que par les marques qui n'existent elles-mêmes que par des points de ventes où elles sont mises en scène. Amazon est décidément un économiseur de temps, pas un capteur de temps qui rend la promenade en ville agréable entre un café, un lieu de culture ou de détente...

« Dans ville il y a vie » disait Monoprix ! Or, la ville du futur se dessine sans le commerce. Et particulièrement en France. Hors quelques métropoles ou villes au passé historique architectural. Si nous sommes très critiques vis-à-vis des États-Unis et moquons les « downtowns » abandonnés ou sans âme, consciencieusement nous prenons le même chemin selon des signaux faibles récents.

D'une part, 3 à 5 millions de mètres carrés de commerces sont programmés pour les cinq années à venir selon l'association Procos et le Conseil national des centres commerciaux, en périphérie des villes pour l'essentiel, malgré la baisse de la consommation et la saturation commerciale. Accessoirement, cela correspond à la destruction de milliers d'hectares de terre arable en périphérie des villes.

D'autre part, les villes vont réviser en 2017 la valeur locative notamment des commerces (ancienne taxe professionnelle, taxe foncière, taxe d'enlèvement des ordures) qui date de 1970. Or, les villes centres se sont appauvries et les communes de périphérie se sont enrichies des implantations commerciales. En centre-ville, on s'attend à un possible doublement des taxes. Et donc le déséquilibre définitif : la fermeture de nombreux commerces. Depuis 2008, les dépenses de prêt-à-porter diminuent, et, pour la première fois depuis vingt-cinq ans, les surfaces de vente de mode se réduisent en France. Internet et les magasins de sport, eux, progressent. Or, la mode demeure l'une des attractions du centre-ville.

Le résultat est déjà largement visible

De nombreuses villes alignent les vitrines blanches, à louer ou à acheter. Et les périphéries cachent mal les friches commerciales. Certes, le commerce est en mutation. De nouvelles enseignes apparaissent comme Primark, Action ou Hema. Mais le commerce est aussi un élément fort de l'« ascenseur social ». Une ville sans commerces est une cité-dortoir. Et l'on connaît la suite.

L'alchimie de la ville balance entre la data, l'humain et les pouvoirs publics. Au milieu de cette balance à trois plateaux, il y a un fléau. Que ce fléau soit en équilibre pour une prospective juste.

Je repars en plongée.

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L'ouvrage le plus récent de Philippe Cahen :
Les Secrets de la prospective par les signaux faibles, Éditions Kawa, 2013

À découvrir aussi sa contribution à l'ouvrage collectif Rupture, vous avez dit disrupture ? Le futur est déjà derrière nous, Éditions Kawa, 2015 ; et le nouvel ouvrage, Notre futur anticipé pas les signaux faibles, Éditions Kawa, 2016.

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