Quel « contrat du siècle » ?

En avril, la France a signé deux « contrats du siècle ». Par Philippe Cahen, Prospectiviste

En début de mois, MSC Croisières a signé une lettre d'intention pour quatre paquebots, les plus gros jamais construits dans un chantier européen : 335 mètres de longueur, 7.000 passagers. Le chèque à l'ordre de STX France (STX est coréen) est de 4 milliards d'euros et assure 3.500 emplois pour dix ans. STX France a 13 paquebots en construction d'ici à 2026. Et il s'y ajoute de la sous-traitance !

En fin de mois, le gouvernement australien sélectionne la France pour acheter 12 sous-marins Barracuda de DCNS, à propulsion hybride. Des sous-marins évoluant sur de longues distances, furtifs et très silencieux. Ils seront fabriqués en Australie (un, peut-être, le sera en France), le système de combat (pour le tiers du budget) sera américain. Le contrat porte sur cinquante ans, dont vingt ans de formation, soutien et maintenance. Ce contrat global de 34 Md d'euros, dont environ 8 milliards pour la France, pourrait assurer 4.000 emplois.

Une concurrence féroce

Sur chacun de ces contrats, la France était en concurrence avec deux entreprises mondiales, à niveau de compétences comparables. C'est dire la qualité des équipes menées par ces deux entreprises. Ces deux contrats représentent aussi des compétences dans des domaines différents et complémentaires. Le travail du secteur primaire couvre l'agriculture et la pêche. Le secteur secondaire, les cols-bleus, c'est l'industrie.

Ce sont entre autres les chantiers navals, mais aussi tout le travail d'aménagement qui ira sur ces paquebots de croisière. L'industrie manufacturière, ce n'est plus que 11,3 % de la valeur ajoutée par l'économie française. Mais la productivité y progresse plus que dans le reste de l'économie, de 3,2 % l'an, contre 1,7 % de 1970 à 2014.

Le secteur tertiaire, les cols blancs, les services, ont aussi récupéré la sous-traitance de l'industrie comme l'entretien, la restauration, etc. De fait, le tertiaire, ce sont « les bureaux ». La sous-traitance, c'est le quaternaire, et cela regroupe l'entretien, la restauration mais aussi le finance, les juristes, la publicité... les compétences pointues prises à l'extérieur de l'entreprise.

Et puis il y a la recherche, le développement, les bureaux d'études et laboratoire, les universités, la culture... C'est le quinternaire. C'est en grande partie la DCNS. Plus que de la matière, on y vend du savoir, de l'intelligence. Ces deux contrats sont significatifs de l'avenir. Et si le second crée moins d'emplois, il oblige à plus de compétences, d'intelligence. Il est significatif du secteur quinternaire, celui d'ailleurs qui développera l'usine du futur.

Je repars en plongée.

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L'ouvrage le plus récent de Philippe Cahen :
Les Secrets de la prospective par les signaux faibles, Éditions Kawa, 2013

À découvrir aussi sa contribution à l'ouvrage collectif Rupture, vous avez dit disrupture ? Le futur est déjà derrière nous, Éditions Kawa, 2015 ; et le nouvel ouvrage, Notre futur anticipé pas les signaux faibles, Éditions Kawa, 2016.

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