Ses douze mois de tournée auront permis d'accélérer le déboursement des garanties publiques gérées par la BEI - 12 milliards d'euros engagés, sur les 22 du FEIS - et la promesse de 100 milliards d'investissement. Il en est revenu avec la conviction que « les aspects humains sont cruciaux » pour faire en sorte que le plan fonctionne sur le terrain. Et un chiffre magique de « 100 milliards » d'investissement généré.
« Toute la mise en oeuvre repose sur l'effet de levier résultant du financement du secteur privé. Or, il y a un manque d'information quant à l'ampleur de ce financement actuellement », note toutefois Alain Durré, de Goldman Sachs à Paris, tout en estimant que les 315 milliards du plan Juncker restent « une force de frappe assez importante » au plan macroéconomique.
10.000 à 12.000 logements d'ici à 2020
À la Cité régionale de l'environnement, à Pantin, où est installée l'équipe d'Énergies Posit'If, on confirme : le Plan Juncker a été « absolument fondamental » pour développer ce projet né en 2013 et qui vise la rénovation de 10.000 à 12.000 logements d'ici à 2020. Énergies Posit'If est une société d'économie mixte (SEM) qui compte pour actionnaires 14 collectivités franciliennes (dont la Région Île-de-France, la Ville de Paris et le Conseil départemental du Val-de-Marne) et deux établissements financiers. Elle fournit à la fois l'expertise technique pour concevoir le projet de rénovation et apporter les financements directement aux copropriétés, grâce au prêt de 100 millions d'euros de la BEI.
« Nous n'aurions pas pu obtenir un tel financement aussi rapidement sans le plan Juncker », explique Antoine Colin-Goguel, son secrétaire général.
Quatre mille logements sont actuellement accompagnés par Énergies Posit'If dans leurs projets de rénovation. Mais l'essentiel n'est pas tant le nombre que l'exemple, précise-t-il.
« À dix personnes, nous n'avons pas vocation à rénover l'Île-de-France à nous seuls. Mais nous voulons démontrer qu'un nouveau business model fonctionne et que les acteurs privés pourraient s'en inspirer. »
À la rentrée, le vice-président Katainen devra retourner devant le parlement pour obtenir une nouvelle ponction sur le budget européen, destinée à assurer la pérennité du FEIS au-delà de 2018.
« Nous ne couperons pas [le programme de recherche, NDLR] Horizon 2020. Nous regardons, à la marge, les instruments les moins efficaces », rassure-t-il.
Ce Finlandais de 45 ans, ancien ministre des finances puis Premier ministre, a le débit posé, un peu lent de ses compatriotes quand ils s'expriment en anglais, et un côté terriblement « sachlich ».
« Je suis un pragmatique doté d'optimisme », dit-il.
Début juin, il a été passé au gril pendant quatre heures par des députés souvent critiques : le plan bénéficiait surtout aux économies les plus riches (Allemagne, France, Italie, Royaume-Uni), finançait trop peu de projets dans le Sud, pas assez dans l'environnement, fournissait une garantie publique là où elle n'aurait peut-être pas été nécessaire, etc.
« Les députés ont des inquiétudes légitimes, mais nous avons eu aussi beaucoup de retours très positifs », conclut-il avec flegme. « L'état d'esprit à l'égard des financements européens est en train de changer », estime-t-il.
Mais passer d'une culture de la subvention à celle du partage des risques entre secteurs public et privé prend du temps, notamment en Europe centrale et là où les structures publiques sont plus fragiles.
Est-il inquiet du climat politique en Europe ?
« Le populisme a certainement un impact » sur l'investissement, explique celui qui a vu émerger dans son propre pays, alors qu'il était au pouvoir, le mouvement eurosceptique des Vrais Finlandais.
« Si les partis populistes étaient aux commandes au niveau national, personne ne sait quel serait l'impact sur les finances publiques. Par définition, les populistes n'agissent pas de façon responsable », dit-il.
En attendant, il poursuit sa mission de VRP. Il lui reste deux ans pour engranger 200 milliards supplémentaires d'investissement.
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