L’hôpital à l’heure de la robotisation  ?

La crise de l'hôpital public français oblige à repenser ses fondements. Alors qu'il est difficilement imaginable que les moyens qui lui sont alloués augmentent de manière substantiel, l'adoption des nouvelles technologies et la réorganisation du système de soin peuvent lui permettre d'acquérir d'immenses gains de temps et de qualité. Par Olivier Babeau, président de l'Institut Sapiens et professeur à l'université de Bordeaux.
(Crédits : Reuters)

Épuisement, désorganisation, crise des urgences : l'hôpital est la partie malade de notre système de santé. Personne n'imagine que la solution sera simple et rapide. La réponse budgétaire suffira-t-elle, si tant est qu'on soit en mesure de l'apporter ? La France dépense déjà 4.600 dollars par habitant en dépenses de santé, soit 15% de plus que la moyenne des pays de l'OCDE. Alors que nous avons un nombre de médecins et d'infirmiers par habitant au niveau de la moyenne des pays développés, nous comptons en revanche bien plus de lits d'hôpitaux : 6,1 lits pour 1.000 habitants contre 4,7 lits en moyenne. Difficile d'imaginer que les moyens de l'hôpital augmentent substantiellement.

A budget égal, des marges de manœuvre existent pour apporter un service de santé de meilleure qualité, à condition d'avoir le courage de changements en profondeurs. Dans Les Echos du 27 septembre, le professeur Guy Vallancien plaide pour que l'hôpital soit repensé en entrepreneur. Une véritable culture managériale peut apporter une meilleure prévision des flux et une capacité à repenser son fonctionnement autour de ses objectifs. Un constat particulièrement pertinent : l'adoption des nouvelles technologies et la réorganisation du système de soin permettront d'immenses gains de temps et de qualité. A l'heure où la fantastique accélération des innovations technologiques bouleverse tous les secteurs, la santé reste un peu en retrait de ce mouvement de modernisation.

L'innovation comme planche de salut

Les technologies disponibles ne font pas l'objet d'une adoption rapide. Le système dans son ensemble ne le favorise guère. Le développement du dossier médical personnalisé n'en finit  pas de prendre du retard. La télémédecine connaît un développement très décevant en France du fait des conditions restrictives qui ont été imposées : on attendait un demi-million de téléconsultations pour 2019, mais à mi-juillet il n'y en avait eu que 31.610... Un contraste fort avec la Chine où des géants des nouvelles technologies se sont jetés dans la médecine en ligne, développant des applications permettant de consulter à distance, d'envoyer des photos de symptômes et  de recevoir des résultats de tests. La renaissance de l'hôpital passera par l'innovation. L'utilisation de robots assistant les chirurgiens est une piste prometteuse mais trop négligée.

En permettant d'augmenter la précision des gestes et de réduire le caractère invasif de l'opération, ces robots diminuent les complications opératoires, la durée des séjours et les douleurs post-opératoires. Intéressant si l'on rappelle qu'avec 10 jours en moyenne contre 8 dans le reste de l'OCDE, la durée moyenne des séjours hospitaliers reste la troisième plus longue de ce groupe de pays. Le développement de l'ambulatoire,  c'est-à-dire des opérations qui ne nécessitent pas de nuit (ou en réduisent le nombre) à l'hôpital, doit se poursuivre. Les robots d'assistance à la chirurgie pourraient y aider. Pourquoi ne sont-ils pas plus adoptés par les établissements ? Pour deux raisons. D'abord Les budgets ne sont pas aisément fongibles : la robotisation demande de transformer des dépenses de fonctionnement en dépenses d'investissement. Une décision difficile pour des directeurs d'établissement à l'autonomie limitée.

Ensuite, les bénéfices de la robotisation sont difficiles à quantifier précisément : outre qu'ils consistent aussi en des gains de qualité de vie, ils réclament des études sur la durée distinguant les opérations réalisées avec et sans assistance. De nombreuses études aux résultats probants existent dans le monde, mais elles demanderaient à être systématisées. D'autres systèmes de chirurgie robot-assistée existent pour des tâches précises, comme pour l'implantation de prothèses auditives par exemple. Ils illustrent eux aussi les bienfaits d'une robotisation qui vient augmenter les capacités du chirurgien. Car il n'est pas question de remplacer le praticien et ses équipes, mais bien de permettre une utilisation plus efficiente des ressources en laissant un contrôle total à l'humain. Voulons-nous sauver l'hôpital ? Outre l'inévitable rationalisation des implantations, donnons-nous les moyens d'y introduire les innovations et d'implémenter les changements organisationnels nécessaires.

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Commentaires 2
à écrit le 13/10/2019 à 11:01
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ON sait que les laboratoires pharmaceutiques, aliénés par leur vénalité, n'ont fait aucune découverte majeure ces trente dernières années ne faisant que faire du fric avec leurs brevets. C'est la robotique qui a fait toutes les avancées donc espé...

à écrit le 11/10/2019 à 23:02
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Contrairement à ce qui est affirmé dans cet article, le robot n'apporte à ce jour aucun bénéfice démontré aux patients. En effet, en ce qui concerne les procédures laparoscopiques, les études montrent qu'il n'y a aucune différence en termes de résult...

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