Repenser l'offre de soins, pour en préserver la qualité

Par Vincent Chriqui, directeur général du Centre d'analyse stratégique.
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Vieillissement de la population, développement des maladies chroniques, inégalités sociales d'accès aux soins, coût des nouvelles technologies, exigences croissantes de qualité et de sécurité sanitaire... Les défis posés à notre système de santé sont nombreux et d'autant plus prégnants que les contraintes budgétaires s'accroissent. Comment faire en sorte que l'offre de santé garantisse à l'avenir qualité des soins et maîtrise des coûts ?

La réponse réside dans notre capacité à considérer ces défis comme une véritable opportunité de repenser l'organisation de l'ensemble de l'offre de soins, en ayant à l'esprit une préoccupation principale : améliorer la "gradation " des soins, autrement dit l'adaptation des moyens à la gravité des pathologies et au profil des patients. Cela suppose toutefois de répondre à plusieurs questions fondamentales : qui soignera ? Où seront dispensés les soins ? Quelle sera l'implication de l'usager ?

Pour améliorer la production des soins et faire face à la demande croissante, les frontières des missions dévolues aux différents professionnels de santé devront évoluer afin d'utiliser au mieux les compétences de chacun. Selon leur nature, certains actes, aujourd'hui assurés par les médecins, pourront être réalisés par des infirmières, des orthoptistes ou des manipulateurs radio. Par ailleurs, la coordination des professionnels devra être facilitée par l'essor de structures les regroupant et un meilleur partage de l'information, facilité notamment par le développement des technologies de la communication. Ces nouveaux outils permettront également de délivrer des services de santé à distance (téléconsultation, télésurveillance, etc.), qui devront trouver leur juste place dans la relation entre les professionnels et les patients.

La question du lieu des soins invite ensuite à une réflexion sur les périmètres d'intervention des acteurs de la ville et des acteurs de l'hôpital. Le secteur des soins de premier recours, prenant en charge les soins courants et les pathologies chroniques, devra être étoffé. Le système, davantage axé sur le domicile et la médecine de ville, fera diminuer le coûteux recours aux urgences et à l'hôpital, tout en offrant à chacun une meilleure qualité de vie grâce à l'accès à des soins adaptés, du domicile jusqu'au centre hospitalier de pointe.

Se pose enfin la question de la place de l'usager et de sa capacité à devenir un véritable coproducteur de soins. Cela demandera de nouveaux services facilitant la prévention, l'éducation thérapeutique et le suivi des traitements. Les infirmières, comme dans les pays anglo-saxons et scandinaves, joueront alors un rôle fondamental. L'assureur public devra également mieux accompagner les patients, en leur envoyant par exemple des messages personnalisés par Internet (rappels de rendez-vous, de conseils préventifs et de traitements, suggestions pour leur orientation dans le système de santé au vu de l'analyse de leur consommation de biens médicaux, etc.). L'usager devra également jouer un rôle significatif dans l'évaluation médicale, selon des modalités permettant d'améliorer les pratiques de tous. Et si les services qui lui sont proposés sont accrus, se posera alors peut-être de manière plus aiguë la question de ses devoirs et des conséquences à tirer de l'inobservance des traitements ou recommandations qui lui sont destinés.

Pour permettre ces évolutions, il nous faudra lever divers obstacles, à la fois législatifs, financiers et culturels. Les professionnels libéraux, aujourd'hui principalement payés à l'acte, devront ainsi être davantage rémunérés au forfait, au nombre de patients suivis, à la performance individuelle voire collective. Les nouveaux services devront aussi se voir attribuer une tarification, tout en veillant à ce qu'ils n'engendrent pas une inflation des coûts pour l'assurance-maladie.

La formation initiale et continue des professionnels jouera également dans cette perspective un rôle fondamental, afin de favoriser l'appropriation par les professionnels des nouveaux modes d'exercices, désormais plus collectifs et parfois dématérialisés. Autant de sujets qui invitent à concentrer les efforts dans deux chantiers prioritaires : l'évolution des métiers pour plus de coopération d'une part, le déploiement de la télésanté pour un meilleur accès aux soins d'autre part.

Le Centre d'analyse stratégique a organisé un colloque sur le thème : "Quelle organisation de l'offre de santé dans vingt ans ? ". Il publie, à cette occasion, deux notes d'analyses :
1) La télésanté. 2) Les coopérations entre professionnels de santé.
Disponibles sur www.strategie.gouv.fr, rubrique Publications.

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