L'interview de ce "super consultant" appelé au chevet de la Grèce

Horst Reichenbach, président de la "task force" européenne en Grèce, a été appelé à l'aide par l'ancien premier ministre, le socialiste Georges Papandréou pour réorganiser l'administration grecque.
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Horst Reichenbach a été appelé à l'aide par l'ancien premier ministre, le socialiste Georges Papandréou, pour réorganiser l'administration grecque et la rendre, à tout niveau, plus efficace. Sa première mission, menée dans la douleur, a été d'identifier les problèmes et les dysfonctionnements de l'État grec. Cette semaine, il revient a la tête d'une équipe de 45 personnes dont 15 vont s'établir en permanence en Grèce, le temps au moins de mettre le pays sur les rails. À son arrivée, la presse grecque n'a vraiment pas été tendre avec lui. Son nom était souvent accompagné du mot allemand de « Gauleiter », ces préfets nommés par Hitler. Puis, patience et bonne communication aidant, le climat a changé. S'il se refuse à tout commentaire sur les agences de notation, le travail de la Troïka ou le bien-fondé de la politique d'austérité, Horst Reichenbach se présente comme un homme de « solutions ». Le coût social des réformes en cours ne semble pas le préoccuper, mais il est conscient que la société grecque a atteint ses limites.

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Quelle est votre mission ?

La mission première et principale de la "task force" est, d'une part, d'assister les autorités grecques dans leurs efforts et, d'autre part, de leur fournir l'aide technique nécessaire pour répondre positivement aux exigences et conditions de la Troïka.

Quelles sont les difficultés majeures qui empêchent en Grèce la reprise économique ?

Les mesures d'austérité ont eu un impact très fort sur les revenus et le pouvoir d'achat de la population. Aussi, retrouver la voie de la croissance et de la création d'emploi est capital. Les éléments essentiels qui permettront d'atteindre cet objectif sont que l'économie réelle, c'est-à-dire le secteur privé, ait accès aux financements et que l'environnement des entreprises soit amélioré, notamment par une simplification de la bureaucratie et une administration publique plus efficace.

Les élections anticipées présentent-elles un obstacle supplémentaire pour le pays dans son effort pour sortir de la crise économique ?

Le gouvernement a un large soutien parlementaire et c'est un point positif. Il nous faudra attendre de voir les résultats des futures élections pour pouvoir nous prononcer, mais je pense que le gouvernement fera tout son possible pour stabiliser la Grèce après la tenue de ces élections.

Avez-vous des propositions spécifiques pour reformer la fiscalité en Grèce ?

Oui, la collecte des impôts est une des grandes priorités de la coopération des autorités grecques avec la Task Force. Nous avons identifié quatre priorités majeures. La première est l'encadrement de la collecte des impôts et sa gestion. La seconde, d'accélérer le règlement des différends sur l'imposition qui traînent devant les tribunaux. La troisième est le renforcement des audits informatiques des contribuables. Enfin, il faut un contrôle accru des contribuables les plus fortunés.

D'après un article du 2 octobre du quotidien « Kathimerini », vous auriez exprimé votre surprise concernant des fonctionnaires qui saboteraient les ordres de leurs supérieurs. Confirmez-vous cette citation ? Et comment résoudre ce problème ?

Je crois, et l'OCDE le confirme, que la coopération entre le niveau politique et administratif grec peut être améliorée. En ce qui l'application des reformes, l'assistance technique qui est fournie par le FMI, les autorités françaises et la "task force", visera à la mise en pratique des recommandations pour parvenir à des résultats concrets, et pas uniquement à des circulaires. Plus généralement, je dirais que pour la Grèce nous n'avons pas un manque d'analyse ou de recommandations. Ce qui manque, c'est le passage à l'acte.

Si ce n'est pas un manque d'analyse, est-ce un manque de volonté ?

Je ne pense pas qu'il y ait au niveau politique un manque de volonté, mais il y a un manque de capacité. Et c'est là une des raisons de la création de la "task force". Les Grecs ont accepté le fait qu'ils ont besoin de soutien de l'Europe, du FMI, et de l'OCDE. C'est très positif. Nous sommes là, avec la BCE, pour organiser ce soutien.

Quand vous parlez d'un manque de capacité, vous me rappelez un écrivain grec qui soutient que la seule solution est que des étrangers forment des Grecs. Êtes-vous d'accord avec cette vue ?

Il est important d'avoir une forte participation grecque. On ne peut pas avoir un effort et une participation grecque si ce sont les étrangers qui font le travail. C'est pourquoi je pense qu'il vaut mieux assister les autorités grecques et le gouvernement grec dans ce qu'ils veulent atteindre, plutôt que déléguer des étrangers qui leur diront simplement ce qu'il faut faire.

Mais les Grecs ont besoin d'aide...

C'est pour cette raison que je suis ravi que l'administration française se soit montrée réellement prête à assister l'administration grecque. Des fonctionnaires français hautement qualifiés sont déjà venus en Grèce afin de former leurs collègues grecs sur l'organisation de l'administration.

L'application du mémorandum donne aux Grecs un espoir de pouvoir rester dans la zone euro, mais il creuse la récession. Est-ce vraiment la seule option ?

Oui, il n'y a pas d'autre solution parce que la Grèce a besoin du financement européen et du FMI. Et ce financement s'accompagne d'une exigence de réformes. Je ne pense pas qu'il y ait une alternative à cette voie-là.

Peu importe le coût social ?

Je pense que la question ne se pose pas en termes de coût social. En octobre, le Conseil européen a ouvert une voie qui permettra à la Grèce de revenir à la croissance et à la création d'emploi si, et uniquement si, les réformes structurelles nécessaires sont réellement mises en application aussi rapidement que possible.

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Commentaires 6
à écrit le 14/01/2012 à 15:24
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Alléluia la gréce est sauvée, les fonctionnaires français vont former son administration, on leur envoie en prime quelques promotions d'énarques et le tour est joué. quand à l'interview elle même on résume : quelle est la couleur du cheval blanc d'h...

à écrit le 14/12/2011 à 15:36
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Les grecs se plaignent de l'ue , du fmi. Que se serait il passé si ils n'avaient pas été aidé ? La grèce aurait été en défaut de paiement et serait sortie de l'euro. Donc l'état ne pouvant plus emprunter pour payer les salaires des fonctionnaires et ...

à écrit le 14/12/2011 à 15:12
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Les conseils de l'Administration française hyper centralisée seront-ils les plus pertinents ?

le 14/12/2011 à 23:22
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La France est dans la ligne de mire pour perdre son AAA. Imaginez Sarkozy demandant aux fonctionnaires allemands (AAA) ou danois (AAA) de venir former nos elites de fonctionnaires francais, si fieres d'elles-memes et pourtant directement responsable...

à écrit le 14/12/2011 à 14:03
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Il pense que la question ne se pose pas en termes de coût social ! La marmite est en train d'exploser en Grèce.

à écrit le 14/12/2011 à 10:38
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"une voie qui permettra à la Grèce de revenir à la croissance et à la création d'emploi si, et uniquement si, les réformes structurelles nécessaires sont réellement mises en application aussi rapidement que possible" C'est à dire en reformulant, "si...

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