Automobile : républicains et démocrates n'ont pas les mêmes règles de conduite

Pierre Lemieux est professeur associé à l'université du Québec en Outaouais, auteur de « Une crise peut en cacher une autre » (Les Belles Lettres, 2010)
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On a parfois l'impression que le Parti républicain est vraiment différent du Parti démocrate. La question du sauvetage de General Motors et de Chrysler, qui a refait surface lors de la primaire du Michigan la semaine dernière, en a fourni une illustration.

Entouré par trois des Grands Lacs (Supérieur, Michigan etHuron) et jouxtant un quatrième (le Lac Érié), l'État du Michigan est le 8e État américain par la population et le 12e quant au PIB. On y trouve la ville de Détroit, « née d'un petit fortin de traite, établi par les Français en 1670 », dit Jules Verne, et aujourd'hui capitale en déclin de l'automobile.Comme l'industrie de l'automobile, le Michigan a été durement frappé par la crise économique. Le chômage y demeure à 9,3%, un des taux les plus élevés aux États-Unis.

L'administration du président républicain George W. Bush et celle de son successeur démocrate Barack Obama ont consacré 80 milliards de dollars à la restructuration de General Motors (GM) et de Chrysler dans la foulée de la crise économique. Ces interventions ont sans doute évité le démembrement ou le rachat des deux compagnies. À ce jour, le gouvernement fédéral est toujours actionnaire de General Motors (surnommée « Government Motors » par les mauvais esprits) à hauteur de 27%. La différence entre le Parti républicain et le Parti démocrate n'était pas facile à déceler.

Or, durant la campagne pour la primaire du Michigan, les quatre candidats à l'investiture républicaine ont été unanimes à critiquer le sauvetage de GM et de Chrysler, chacun résistant à la tentation de se faire du capital politique au détriment de ses concurrents.

Même dans le cadre du concours de beauté que constituent les élections, plusieurs électeurs américains ne se sont pas laissé piéger par l'illusion que le sauvetage de GM et Chrysler aurait évité la catastrophe absolue. Sans l'intervention de l'État, les deux sociétés ou certains de leurs actifs auraient été rachetés par des concurrents. Et le sauvetage a nui à Ford, l'autre grand de l'automobile de Détroit, puisque cette compagnie n'a demandé ou obtenu ni subventions ni participation des pouvoirs publics. Récompense de son efficacité, elle fait face à des concurrents revigorés par la manne étatique.

Mitt Romney a quand même protégé ses arrières. En bon politicien, il avait déclaré, tout en s'opposant aux sauvetages, qu'il "ne permettrait jamais que l'industrie américaine de l'automobile implose totalement et disparaisse." Cette réserve n'a pas fait les manchettes et Romney n'a, de toute manière, obtenu au Michigan qu'une victoire ténue sur son plus proche concurrent, Rick Santorum.

Malgré cet écart de langage, M. Romney semble devenir plus libertarien à mesure que la course à l'investiture avance. Il vient de promettre de supprimer la loi Sarbanes-Oxley de 2002, qui avait alourdi encore la chape de plomb réglementaire des entreprises. Assisterait-on à une heureuse dérive libertarienne du Parti républicain ? La performance de Ron Paul à la primaire de l'État de Washington samedi, où il est arrivé deuxième avant le conservateur Rick Santorum, va dans ce sens.
 

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