L'Allemagne, modèle pour une péréquation financière européenne ?

Il n'y a guère que deux pays dans le monde coopérant aussi étroitement que la France et l'Allemagne. En même temps la méconnaissance réciproque entre les des deux est saisissante. Français et allemands sont des voisins inconnus. En Allemagne, on s´est étonné que la ratification du FESF n´ait pas déclenché de débat en France, ainsi que la récente ratification du MES permanent. En France, en revanche, on ne comprenait pas que l´introduction de ces deux dispositifs pour les pays surendettés de la zone euro ait presque provoqué une crise gouvernementale en Allemagne.
Wolfgang Glomb

Le sud paie pour le Nord

L'explication est simple. Les allemands connaissent les conséquences d'une union de transferts financiers en raison de leur système fédéral. Ce dernier risque de mettre en péril la stabilité financière de l'Allemagne. Le système de péréquation financière entre les Länder exige actuellement que trois Länder au sud de l'Allemagne, en particulier la Bavière, s´acquittent chaque année de subventions de l'ordre de 7 milliards d´euros au profit du reste des treize Länder. Pourtant, l'écart économique entre le sud et le nord ne s'est pas aplani, au contraire. Selon le principe de "l'aléa moral", on perpétue ce système de redistribution entre les régions riches et pauvres: les Länder subventionnés n'ont aucun intérêt à faire des efforts pour assainir leurs finances publiques sachant que leurs déficits budgétaires seront financés par les collectivités donataires. Celles-ci perdrent leurs incitations de continuer une politique de rigueur. Les Länder donataires ont l'intention de porter plainte devant la cour constitutionnelle allemande pour mettre fin à ce cercle vicieux.

Tranferts financiers immenses vers l'Est

En outre, depuis la chute du mur, des transferts financiers immenses de l'ordre de deux tiers d'un PIB annuel, c.à.d. de 3 % du PIB chaque année ont été versés de l'Ouest à l'Est. Chaque contribuable allemand est toujours amené à financer directement la réunification allemande avec une surcharge de 5,5 % sur ses impôts personnels. Néanmoins, la différence de train de vie entre l'ouest et l'est s'est écartée.

Les parallèles avec la zone euro sont évidentes. Lors de la récente restructuration de la dette souveraine grecque, les deux banques d'affaires allemandes recapitalisées par l´état dans la crise financière ont subi des pertes de près de 10 milliards d'euros. Le permanent Mécanisme européen de stabilité (MES) remplaçant l'actuel FESF temporaire à partir du 1er juillet 2012 requiert des versements de capitaux à hauteur de 22 Milliards d'euros du côté allemand (et 16 Milliards d'euros du côté français). En toute état de cause, dans l'avenir il n'y aura plus une participation du secteur privé à une restructuration de la dette souveraine comme décidé récemment par les leaders européens. Or, dans l'avenir ce sera uniquement au contribuable d'assumer les coûts.

En outre, la Bundesbank vient d´annoncer une chute de son bénéfice à 643 millions d'euros pour l'année 2011 par rapport à 2.2 milliards d'euros l'année précédente et 6 milliards en 2009. La Bundesbank a été contrainte à des provisions exceptionnelles liées au programme de rachat d'obligation d'État, amenant ses réserves à 7,7 milliards d'euros en global, un montant qui n'a pas pu être transféré au gouvernement à savoir aux contribuables allemands.

la zone euro, à l'exemple du "modèle" allemand?

La zone euro court le risque de suivre le modèle allemand soutenu par deux facteurs. Dans le système de règlement bancaire européen (target 2), la BCE se substitue aujourd'hui au marché interbancaire encore hors d'état de fonctionner correctement. Les déficits des pays périphériques et récemment de la France dans les échanges commerciaux et de capitaux sont financés désormais par les autres banques centrales de l'Eurosystème. Les banques centrales déficitaires affichent un solde négatif proche de 8oo Milliards d'euros sans aucune contrainte de le réajuster comme entre les 12 districts du Système fédéral de réserve aux Etats-Unis. La Bundesbank a accumulé un solde positif de 500 milliards d'euros qui se volatilisera lors d'un éclatement de la zone euro, de sorte que même la sortie de la Grèce de la zone euro n'est pas une option pour le gouvernement allemand. En outre, le « Tsunami » monétaire de 1000 milliards d'euros déclanché par la BCE met à disposition la liquidité pour financer les déficits et pour baisser les taux d'intérêts que les pays surendettés doivent payer pour leurs emprunts. Le calme actuel sur les marchés obligataires est trompeur. Il est loin d'être une solution de la crise de l'euro. Au contraire, il risque d'affaiblir l'élan des réformes et de faciliter la marche dans l'union des transferts financiers.

Les contribuables de deux côtés du Rhin ont les mêmes intérêts, et refuser de payer la facture pour les défauts de leurs voisins, en jouran  le rôle bavarois en Europe. Certes, ils ne peuvent pas porter plainte devant la Cour de justice européenne. Ce qu'ils peuvent faire cependant, c'est  voter lors de leurs élections contre une Europe qui demande une solidarité au dessus de leurs forces en discréditant l'idée de l'intégration européenne. Sans doute la France a-t-elle le même intérêt que l'Allemagne à sauvegarder la cohérence de l'Union européenne. Une prise de conscience des politiques et de l'opinion française, qui devrait s'opposer à union de transferts financiers européenne, devient indispensable.

 

 


 

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Commentaires 7
à écrit le 22/03/2012 à 12:46
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Point de vue intéressant. Voilà 3 raisons pour lesquelles les ratifications du FESF et du MES n'ont provoqué aucun débat en France, ce dont l'auteur s'est étonné. 1. FESF, MES, tout ca c'est très technique, et personne ne les comprend. Pas le citoye...

à écrit le 22/03/2012 à 7:09
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""Une prise de conscience des politiques et de l'opinion française, qui devrait s'opposer à union de transferts financiers européenne, devient indispensable.""<--- voeux pieu car les allemands savent que les francais sont des m'enfoutistes sans nom, ...

à écrit le 21/03/2012 à 19:01
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Mais pourquoi s'alerter puisque le FMI de Madame Lagarde vient d'annoncer que tout allait mieux et dans la bonne direction. Je voudrais vous dire, M. Glomb, que j'apprécie vos articles car vous donnez un éclairage sur l'Allemagne et sur son fonction...

à écrit le 21/03/2012 à 17:31
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Une politique de transfert financiers est nécessaire pour que la zone monétaire deviennent une zone monétaire optimale et donc soit viable. Ce n'est pas l'opinion française qui devrait s'opposer aux transferts financiers mais l'opinion allemande qui ...

le 21/03/2012 à 19:10
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Tout á fait d'caccord avec vous, Mat, mais, les états seront-ils disposés á perdre une partie non négligeable de leur souveireneté? Wait and see. Salutations.

le 21/03/2012 à 20:44
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bien sûr... allez, encore plus d'eurocrature sotte et idiote...

le 21/03/2012 à 23:34
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@mat Je ne suis pas d'accord avec vous et le peuple Allemand non plus.Nous voulons pas une Dictature de Bruessel ni travailer pour les autre. Susanne une Allemande

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