Elections américaines : ce qui sépare Romney et Obama

Quel impact aura l'élection présidentielle américaine du 6 novembre sur l'économie mondiale ? Les deux candidats au banc d'essai au banc d'essai.
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Tandis que les élections américaines se rapprochent à grands pas, le président Barack Obama est toujours légèrement en avance sur son challenger Républicain, l'ancien gouverneur du Massachusetts, Mitt Romney. Les sondages continuent de présager une course serrée pour le contrôle de la présidence et du Sénat des États-Unis, sachant que la Chambre des Représentants devrait probablement demeurer aux mains des Républicains. Les différences entre les candidats sont considérables, et l'élection de l'un ou de l'autre se manifesteraient par d'importantes conséquences en termes de politique économique américaine, d'économie mondiale, même si l'application des programmes dépendra de la composition du Congrès.

Les différences les plus substantielles existant entre les deux candidats à la présidence des Etats-Unis peuvent être synthétisées de la manière suivante.

Les dépenses. Obama a considérablement augmenté le volume des dépenses. Il est très probable que celui-ci poursuive la plupart de ses programmes temporaires (Milton Friedman n'avait-il pas en effet observé : « Rien n'est plus permanent qu'un programme temporaire du gouvernement. ») ; qu'il renforce la démarche de l'État consistant à désigner les gagnants et les perdants en matière d'énergie verte ; qu'il multiplie les dépenses dans l'éducation et les infrastructures ; et qu'il réduise enfin fortement les dépenses militaires.

Par opposition, Romney est partisan d'une limitation de l'ensemble des dépenses fédérales à 24% du PIB, le pourcentage actuel s'élevant à 20%, et d'un maintien des dépenses militaires à hauteur de 4% du PIB. Romney entend voir les marchés privés, et non l'État, désigner les entreprises et les technologies gagnantes.

Les Démocrates s'opposent à la plupart des réductions de dépenses non militaires, faisant valoir que de telles réductions entraîneraient une contraction de l'économie. Un argument renforcé en cas d'importantes et brusques réductions de dépenses dans une économie fébrile. Le choix de les échelonner sur une période de plusieurs années parallèlement à la relance de l'économie, une démarche proposée par Romney, permettrait une croissance expansionniste. Par exemple, les dépenses fédérales par rapport au PIB ont diminué aux États-Unis de 5 points entre le milieu des années 1980 et la fin des années 1990, une réduction encore plus importante ces dernières décennies au Canada - à savoir au cours de périodes de forte croissance économique.

La fiscalité. S'il est réélu, Obama rehaussera les taux d'imposition marginaux sur les salaires, les plus-values, les dividendes, les intérêts et l'immobilier, notamment auprès des individus à plus hauts revenus et des petites entreprises. Obama n'a pourtant jamais proposé de réforme élargie sur le sujet de l'impôt sur le revenu des particuliers ou des entreprises.

En cas de victoire, Romney choisira quant à lui de réduire le taux d'impôt sur les sociétés américaines (le plus élevé au sein de l'OCDE) à 25%, et d'imposer les multinationales américaines sur une base territoriale, plutôt que mondiale, afin d'accroître leur compétitivité fiscale. Romney est également partisan d'un abaissement de 20% des taux d'imposition des particuliers, compensant la perte de recettes par une limitation des crédits et des déductions fiscales, notamment dans la tranche supérieure, et engendrant ainsi 18,5% de PIB, juste au-dessus de la moyenne historique, avec un plein emploi. Le projet fiscal de Romney réduirait ainsi suffisamment les déficits pour diminuer le ratio dette-PIB. Le challenger est partisan d'un amendement de la Constitution pour l'équilibre du budget, et espère aboutir à cet équilibre à l'issue d'une période de huit ans.

D'un autre côté, Obama entend en cas de victoire accroître les déficits - l'augmentation des dépenses qu'il prône étant bien supérieure à l'augmentation des impôts - ce qui sous-entendrait un important accroissement de l'imposition dans le futur. Par ailleurs, les ratios de la dette conduits par Obama seraient bien plus importants qu'en cas de présidence de Romney, dans la mesure où le moteur principal de la dette n'est autre que la dépense sociale.

Les prestations sociales. Obama ne s'est pas prononcé sur une éventuelle réforme du Medicare ou de la sécurité sociale, dont les déficits à long terme représentent plusieurs fois le volume de la dette nationale. Le vice-président, Joe Biden, a précisément affirmé qu' « aucun changement » ne serait apporté au système de sécurité sociale.

Romney s'est quant à lui prononcé en faveur d'un rehaussement progressif de l'âge de la retraite, d'un modèle Medicare reposant sur des primes, et d'une délégation du Medicaid (l'assurance santé des plus démunis) aux États, au moyen de subventions globales. La campagne d'Obama fait un procès à Romney sur la question du Medicare, tandis que le camp Romney reproche à Obama son refus de négocier sur cette question ou de simplement y proposer une solution.

Un nouveau mandat d'Obama conduirait ainsi à des déficits encore plus élevés et à des ratios de la dette bien au-dessus de 100% du PIB, un niveau qui, selon de nombreuses études, réduirait la croissance économique américaine d'un tiers, voire plus, risquant même d'engendrer une crise de la dette souveraine. Certains observateurs suggèrent l'existence d'un projet silencieux de la part d'Obama d'augmenter encore davantage les prestations sociales, et de les financer au moyen d'un système de taxe sur la valeur ajoutée, à la manière européenne.

Le commerce. Obama est le premier président américain depuis de nombreuses années à n'avoir pas joué un rôle phare dans la libéralisation du commerce mondial. Les discussions du cycle de Doha autour du commerce mondial demeurent au point mort, et Obama a retardé les trois accords bilatéraux de libre échange qui restaient en attente d'approbation lors de son entrée à la Maison Blanche. Romney est partisan du libre échange, bien qu'ayant affirmé entendre faire preuve de davantage de fermeté à l'égard des pratiques commerciales et des politiques monétaires de la Chine.

La régulation. Obama entend étendre davantage la régulation de commandement et contrôle fédéral (bien que les tribunaux se soient prononcés contre l'élargissement de certains pouvoirs réglementaires décidé par celui-ci). Romney privilégie une approche économiquement équilibrée, qui réformerait les principales régulations conduites par Obama en matière de santé, d'environnement et de services financiers.

Les nominations. Chaque président américain a pour rôle de désigner des milliers de responsables politiques, dont un grand nombre jouissent de pouvoirs considérables. Romney a déclaré qu'il ne renommerait pas Ben Bernanke au poste de président de la Réserve fédérale (les candidats probables étant Glenn Hubbard, Greg Mankiw, John Taylor, et Martin Feldstein). D'autres responsables nommés par le président exercent une influence considérable sur les entreprises, l'industrie, et sur l'économie toute entière. Par exemple, les acteurs nommés par Obama au sein du très obscur National Labor Relations Board ont tenté d'empêcher Boeing de s'étendre en Caroline du Sud, malgré une législation de l'État en faveur d'un « droit au travail » antisyndical.

Davantage de mesures politiques de ce type affecteraient la croissance économique américaine, le déficit budgétaire, l'épargne nationale, et ainsi le commerce mondiale de même que les flux de capitaux. Un nouveau mandat d'Obama sous-entendant de plus larges déficits qu'un mandat de Romney, l'Amérique aurait alors besoin de davantage de capital en provenance d'Europe, d'Amérique latine et d'Asie, tandis qu'une augmentation des impôts et de la dette affecterait la croissance américaine et menacerait les exportations de ces régions. L'Amérique d'Obama s'oriente vers un modèle européen d'État providence ; l'agenda de Mitt Romney s'attache précisément à empêcher cela.

Quel que soit le vainqueur de novembre, la fin de l'année 2012 sera marquée par une impasse budgétaire. La législation précédente, si elle n'est pas inversée, conduira à d'importantes et brusques augmentations fiscales et réductions de dépenses, susceptibles, selon les prévisions du Congressional Budget Office, d'engendrer une récession en 2013. Même si une session boiteuse du Congrès aura vocation à s'attaquer à cette impasse budgétaire après cette élection, les différences profondes entre Républicains et Démocrates sur les questions du budget et des dépenses demeurent très prononcées et semblent irréconciliables.

Face au fléau d'une incertitude qui malmène les finances de l'Europe, ainsi qu'à un ralentissement de la croissance chinoise, une économie américaine stagnante ou en récession est la dernière chose dont l'économie mondiale a besoin. Il incombera néanmoins au président nouvellement élu de faire preuve d'un fort leadership pour éviter cela.

Michael Boskin, président du Council of Economic Advisers de George H. W. Bush entre 1989 et 1993, est professeur d'économie à l'Université de Stanford et membre principal de la Hoover Institution.

Copyright: Project Syndicate, 2012.
 

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Commentaires 9
à écrit le 29/09/2012 à 8:20
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Economiquement, socialement, écologiquement, la religion du libéralisme économique fait, mois après mois, la démonstration de son usure, de ses limites, de ses impasses et désormais de son caractère suicidaire. Ce système ressemble de plus en plus à ...

à écrit le 28/09/2012 à 15:25
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Rien, et en plus ils ont sûrement le même dentiste!

à écrit le 28/09/2012 à 15:20
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Ne cherchez pas ce qui les sépare : quelques dizaines de millions de dollars , un point c'est tout!

à écrit le 27/09/2012 à 23:55
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Imposer les multinationales américaines sur une base territoriale plutôt que mondiale ne peut évidemment qu'aggraver la situation fiscale déjà catastrophique de milliers de PME qui sont le principal employeur américain. Si Mitt Romney parvient à s'in...

à écrit le 26/09/2012 à 23:24
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Vu de France la campagne présidentielle US est une vaste propagande pro-Obama, n'allez pas chouiner pour quelques lignes favorable (certes c'est peu dire) a Romney..

à écrit le 26/09/2012 à 20:59
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Cet article est ahurissant de mauvaise foi : que l'on soit partisan, soit, que l'on soit malin, soit, mais que l'on ne présente pas ses a priori dès le début d'une tribune, NON ! C'est de la propagande.

le 06/11/2012 à 2:17
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C'est clair, je suis bien d'accord!

à écrit le 26/09/2012 à 11:26
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Pendant un instant je me suis demandé quel journaliste Français ou Européen pouvait être aussi franchement pro-Républicain. Puis j'ai vu qui était l'auteur de cette propagande (on ne peut pas parler d'article, tant ces quelques lignes manquent d'obje...

à écrit le 26/09/2012 à 9:18
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Ce qui saute aux yeux surtout, que l'on soit pour l'un ou pour l'autre des 2 candidats, c'est le ton archi-partisant de cet article! le vocabulaire employé, les tournures de phrases employées ne sont particulièrement pas objectifs!! et on arrive à la...

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