Choc de compétitivité : trois pistes pour renforcer la recherche académique française

Dans cette tribune, André Choulika, le président de France Biotech, explique que la recherche en France a besoin non pas de plus de financements, mais d'un meilleur financement, pour se distinguer sur la scène scientifique mondiale.
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La compétitivité du tissu industriel français ne peut d'aucune manière se trouver dans le coût des produits et services vendus mais dans le degré d'innovation qu'ils contiennent. Cette innovation est la résultante directe de la qualité de notre système d'enseignement et de recherche. La recherche académique dans le monde a toujours eu 10 ans d'avance sur la globalisation. Les laboratoires de recherche sont multiculturels depuis des décennies, les chercheurs lisent la même littérature scientifique, utilisent le même matériels, écrivent selon les mêmes codes, fréquentent les mêmes congrès. Cette globalisation c'est encore accélérée avec la révolution numérique où toute publication est lue par toute une même communauté scientifique au même instant sur la surface du globe. En conséquence, les idées, concepts scientifiques ou découvertes, qui se cristallisent par le croisement d'une accumulation de connaissances, voient le jour au même moment et en plusieurs endroits dans le monde. Ces découvertes se concrétisent de deux manières, par la publication d'articles scientifiques et la prise de brevets d'inventions. Dans ce monde, il n'y a pas de place pour les seconds.

La France investit près de 43 milliards d'euros en recherche et développement par an, soit 2,2% de son PIB. Aujourd'hui, la question n'est plus de se demander s'il faut dépenser plus, mais comment dépenser mieux. Dans la recherche académique, les moyens sont essentiellement mis sur la masse salariale avec une moyenne de salaires très peu attractive pour le niveau d'étude requis contre un budget de fonctionnement qui laisse la majorité des laboratoires sans ressources dès la fin du premier semestre de chaque année. La conséquence est qu'une large part de l'activité des chercheurs est consacrée à trouver des financements plutôt qu'à leurs recherches. En outre, la recherche de financement à l'effet pervers de brider la créativité des laboratoires sur des thématiques de recherches fondamentales et les orientent vers des thématiques d'application tel que le cancer ou l'Alzheimer. La plupart des découvertes de ruptures résultent de recherches non orientées vers de l'applicatif. Depuis 30 ans, de nombreuses découvertes de rupture ont été faites en France, pour être développées dans d'autres pays (essentiellement les Etats-Unis) qui en tirent les bénéfices des développements industriels.

La bonne nouvelle est qu'en France il y a de l'innovation et de l'argent. La mauvaise nouvelle est que cet argent est mal utilisé pour capitaliser sur ces innovations. Il faut réformer le système de la recherche académique en France pour qu'elle puisse se donner les moyens de lutter avec la compétition internationale. Décréter l'excellent ou la compétitivité n'est pas une méthode car excellence et compétitivité sont des constats de situation. Observons là où des découvertes de rupture radicale émergent sur notre territoire et mettons des moyens significatifs pour être les premiers et engranger tous les bénéfices de ces découvertes. Ce sont des paris risqués mais payants sur le long terme car nous serons excellents et compétitifs au moins dans quelques domaines.


Voici trois pistes pour rester dans la compétition internationale :

1- changer le statut du chercheur académique. Le métier de chercheur peut être un emploi à vie pour certains mais pas pour tous. On peut être créatif pendant une période de sa vie puis faire bénéficier de ses connaissances et de sa formation d'autres secteurs d'activités qui manquent cruellement de scientifiques.

2- rendre les salaires des chercheurs plus attractifs et valorisants en France comparé aux normes internationales. Il est indécent de payer des bac+10, moteurs de notre compétitivité aux salaires actuels dans le monde académique. Sortir des grilles les hauts profils.

3- utiliser l'ANR comme vecteur de financement de laboratoires ultraperformant afin qu'ils deviennent, avant les autres, leaders mondiaux. Ces financements ne doivent pas être fléchés sur des sujets mais sur les hommes (ce sont eux le capital inventif). Ils ne doivent pas être contraints (sujets de recherche, salaires, investissements, fonctionnement etc.). Ils doivent être limités dans le temps (5 ans) et leurs performances évaluées à terme.

Une industrie compétitive doit se reposer sur une recherche académique de premier rang. C'est par ici que doit commencer ce «choc de compétitivité» si cher à nos pouvoirs publics depuis des décennies.

 

 

par André Choulika, président de France Biotech.

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Commentaires 29
à écrit le 05/11/2012 à 13:49
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Il y a à peu près 20% des chercheurs des EPST qui sont au dessous de ce qu'on peut attendre en matière de publications et d'activité en général. L'évaluation des chercheurs en France est médiocre, l' ANR est une usine a gaz accaparée par des lobbys,...

à écrit le 04/11/2012 à 19:00
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On cherche suffisement en France c'est d'entrepreneurs dont on a besoin.. Mais ce gouvernement repousse vers londres, bruxelles ou geneve une grande partie d'entre eux. Les socialistes ne peuvent pas participer a la solution car ils sont le probleme

le 04/11/2012 à 19:43
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Il faut arrêter ce discours selon lequel les seuls gens utiles en France seraient les entrepreneurs. Tous lre progrès importants viennent de la recherche; les entreprises ne seraient pas capables d'innovations importantes sans les résultats de la rec...

à écrit le 04/11/2012 à 14:52
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Bravo Monsieur Choulika, Je suis très d'accord avec vous. Actuellement dans les universités et organismes de recherche publiques - trop de bureaucratie, on perd un temps fou avec des papiers à la con - une mauvaise valorisation des gens qui se déc...

à écrit le 04/11/2012 à 10:51
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Je l'ai dit et redit, il ne faut plus parler de choc de compétitivité mais d'un pacte !

le 04/11/2012 à 11:05
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Bon, c'est dimanche et il pleut, je vais refaire mon rapport !

à écrit le 04/11/2012 à 10:28
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L'innovation n'a d'intérêt que si elle améliore le ratio service rendu/coût d'un produit. Quelque soit son niveau d'innovation, un produit sera toujours concurrencé . Ecrire que la compétitivité ne se trouve en aucune manière dans le cout est une âne...

le 04/11/2012 à 18:40
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Vous ne comprenez pas ce dont il s'agit : l'article parle de recherche, pas d'innovation, ce qui est totalement différent.

à écrit le 04/11/2012 à 8:57
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La recherche française a surtout besoin d'un retour sur investissement, c'est bien d'avoir "les médailles" mais s'autofinancer serai un plus!

le 04/11/2012 à 18:42
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La plupart des recherches donnent des résultats qui ne seront rentables que très longtemps après; le privé ne prend pas le risque de financer à si long terme, donc le public est souvent le seul à pouvoir faire de tels investissements.

à écrit le 03/11/2012 à 17:35
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De quelle compétitivité parle-t-on ? La compétitivité finit par nuire à la compétitivité (sic) ! Explication ici : http://wp.me/p1Ai8C-1x

à écrit le 03/11/2012 à 13:23
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Un petit commentaire concernant la recherche française: j'ai été dans un labo pendant mes études. La stagiaire de BTS laissait toujours le gaz ouvert, je devais surveiller pour éviter que cela n'explose. Les chercheurs étaient assis à leur bureau et ...

le 03/11/2012 à 16:03
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C'est exactement cela le CNRS...

le 04/11/2012 à 18:45
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Il y a en effet certains chercheurs qui ne travaillent pas assez, et le système les protège trop. Mais il ne faut pas caricaturer : la plupart des chercheurs travaillent BEAUCOUP plus que 35h/semaine. Et pour ma part je n'ai jamais vu un stagiaire BT...

à écrit le 03/11/2012 à 13:12
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1800 euros net pour un chercheur CR1 au CNRS avec : - un doctorat, - 7 années de post-doctorat au sein d'un université du TOP5 du classement de Shanghai, - une vingtaine de publications dans des revues très prestigieuses (Nature, JACS, Angewandte,......

le 03/11/2012 à 16:01
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Faites prof ! Vous toucherez plus de 3000 euros net avec tous vos diplômes !

le 03/11/2012 à 16:09
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Ceux qui sont payés 1800? et qui ne trouvent rien, ne trouveront pas davantage s'ils sont payés 3600?. Le premier problème n'est pas le salaire. En revanche d'accord avec le point n° 3. La lutte contre la bureaucratie devrait être une priorité : mult...

le 04/11/2012 à 18:48
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Votre commentaire méprisant est totalement déconnecté de la réalité : 1) des chercheurs qui ne trouvent rien sont extrèmement rares : la plupart publient régulièrement. 2) Un salaire plus élevé éviterait la fuite des cerveaux vers l'étranger, en part...

le 05/11/2012 à 13:11
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Il n'est pas difficile de choisir entre un "simple" post-doc senior en Suisse payé 5000?, et un CR1 au CNRS avec toutes ses responsabilités, les emmerdes administratives et un temps de travail équivalent payé au lance-pierre... Et encore, les jurys d...

à écrit le 03/11/2012 à 12:41
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ça serait bien que tous les chercheurs foutent les pieds a leur bureau,qu'ils fassent le nombre d'heures pour lesquelles ils sont payés,qu'ils soient évalués par un organisme externe et qu'ils aient des contrats a durée déterminée

le 04/11/2012 à 18:51
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Vous ne connaissez rien au sujet. 1) La plupart des chercheurs travaillent beaucoup plus que 35h/semaine. 2) Il est impossible d'évauler des chercheurs si l'on n'est pas chercheur soi même, car les sujets sont tellement difficiles que les non cherche...

à écrit le 03/11/2012 à 12:24
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faut taxer comme dirais hollande, aller mr eyrault , vous allez bien nous pondre une petite taxe pour financer la recherche

le 04/11/2012 à 20:37
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Avec vous, si l'on taxait les fautes de grammaire, la France serait riche...

à écrit le 03/11/2012 à 7:58
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Tu as peur de la vie? Tu n'oses pas dire aux aduslescents que réussir c'est 99 pour cent de transpiration pour un pour cent d'innovation? Je peux te faire gagner beaucoup d'argent parce que moi je suis un grand magicien! Retour de l'être aimé, réussi...

le 04/11/2012 à 18:52
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Qu'est ce que c'est que ce délire ???

à écrit le 02/11/2012 à 19:56
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Le socialisme a un recto et un verso : les charges et la bureaucratie. S'attaquer à l'un en oubliant l'autre ne sert à rien. La compétitivité est un tout : si on investit dans la recherche pour se faire taxer 90% des gains aléatoires potentiels, eh b...

le 04/11/2012 à 18:54
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Je ne vois pas le rapport avec le sujet. Il n'est pas question de axes ici, ni de socialisme; vous faites une fixation.

à écrit le 02/11/2012 à 19:45
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" renforcer la recherche académique français" Bravo on n'en attendait pas moins de votre correcteur d'orthographe.

le 04/11/2012 à 18:53
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EN effet il y a bien d'autres erreurs de grammaire dans cet article...

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