Hausse des cadences de production dans l'aéronautique : attachez vos ceintures !

Les carnets de commandes étaient déjà bien remplis, mais après le salon du Bourget, l'avenir des avionneurs est sans conteste assuré pour les vingt prochaines années. Non toutefois sans quelques aménagements des stratégies de production, comme l'explique Philip Moine, Manager Aerospace & Defense chez Kurt Salmon...
Comme l'explique Philip Moine, l'avenir des constructeurs aéronautiques ne sera lumineux qu'après quelques aménagements dans la cadence de production... (DR)

Les avionneurs continuent d?engranger les commandes alors que les carnets de commandes sont déjà pleins pour plusieurs années. Airbus et Boeing prévoient ainsi entre 27,000 et 32,000 avions à produire en 20 ans. Avec les niveaux de production actuelle, il faudrait entre 23 et 28 années pour répondre à cette demande. Airbus et Boeing s?attachent donc à améliorer leur productivité et annoncent déjà des cadences de production ambitieuses pour 2014 : 44 A320 (38 en 2012, 30 en 2007) et 42 B373 (35 en 2012, 27 en 2007).

Cet effort de productivité est majeur, car il va au-delà d?un simple effet volume. En effet, la sophistication des nouveaux aéronefs (matériaux composites, électronique embarquée, ?) complexifie leur production et leur mise en service. On estime qu?il faudrait ainsi augmenter la productivité d?au moins 50% pour tenir les délais.

Moins d'individualisme chez les constructeurs

Par ailleurs, la tendance des acteurs à se centrer sur leur c?ur de métier a mené les avionneurs à se rapprocher d?un modèle d?assembleur faisant appel à de multiples sous-traitants et fournisseurs de matières premières. Pour faire face à ce nouveau défi de la hausse des cadences, les acteurs aéronautiques mènent à la fois des initiatives individuelles et des actions concertées et collectives.

Les avionneurs et les fournisseurs de premier niveau (ceux qui ont en contact direct avec le donneur d'ordres) ont accru capacité de production et productivité. Capacité par l?ouverture de nouvelles usines, à l?exemple de Mobile pour Airbus. Productivité en se dotant de moyens de production modernisés et en menant de vastes projets d?amélioration opérationnelle. Les fourbisseurs de niveau intermédiaire sont plus exposés au manque de disponibilité de capital et de ressources au moment où ils en ont le plus besoin. Ils se regroupent ou fusionnent pour atteindre une taille critique. Ainsi, Sofop et Asquini crééent le groupe Asquini-Sofop Aero (500 salariés, CA : 70 m?). Néanmoins pour certains tier-2 et 3, au bord du gouffre, l?approche individuelle n?est pas suffisante ou applicable.

Sécuriser la chaîne de production

La capacité de production étant limitée au maillon le plus faible de la chaine, les avionneurs sont au chevet de leurs sous-traitants. Airbus le confirme : la priorité est de sécuriser la supply chain avant de poursuivre l?augmentation des cadences. Deux leviers principaux sont activés : les finances et les talents. Coté finances, des fonds d?investissement spécifiques sont créés pour soutenir les entreprises de la filière et leurs plans d?amélioration. Aerofund 3, auquel contribuent notamment Airbus et Safran, devrait ainsi investir 300 millions d?euros dans les PME.

Coté talents, le groupement des industries françaises aéronautiques et spatiales annonçait 3000 postes non pourvus dans les PME en 2011, et 4000 à ce jour. L?ensemble des acteurs travaillent aujourd?hui de concert pour recruter et se partager des ressources. L?Avion des Métiers lors du salon du Bourget illustre parfaitement cette coopération dans le domaine du recrutement pour la filière. En parallèle, les entreprises commencent à mettre en place les nouveaux contrats d?alternance partagée. Dans ce cadre, l?apprenti recruté par une grande entreprise passe une partie de son temps chez un sous-traitant.

Les grands donneurs d?ordres font profiter à leurs sous traitants de leurs équipes de spécialistes. C?est le cas pour la qualification des processus industriels chez MAINtag, fournisseur comptant 25 employés, sélectionné pour l?A350.

Vers moins de sous-traitance?

La logique d?externalisation pose également des limites sur la maîtrise de la qualité. Les exemples de l?A380, de l?A400M ou encore du Boeing 787 amènent les avionneurs à se pencher sur le modèle de la chaine de fournisseurs. Airbus a ainsi limité le nombre de fournisseurs à 90 pour l?A350, contre plus de 200 pour l?A380.

Les groupes envisagent des « ré-internalisations » d?activités jugées stratégiques ou à risque. Une autre approche consistera à améliorer la maîtrise de la chaîne au-delà du maillon suivant grâce à une gestion de programme plus évoluée, s?inspirant des modèles automobiles. Ce modèle permettrait une meilleure anticipation et réduirait les risques industriels.
 

*Philip Moine est Manager Aerospace & Defense chez Kurt Salmon

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Commentaires 3
à écrit le 12/07/2013 à 17:56
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D'où sortez vous ce chiffre de 44 A320 par mois en 2014??? La dernière fois qu'Airbus a évoqué ce chiffre, c'était en 2011! Depuis, toutes les communication du groupe sur le sujet insiste sur le fait que la candence, qui a atteint 42 appareils par mo...

à écrit le 01/07/2013 à 20:54
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Coquille ? "Les fourbisseurs de niveau intermédiaire " fournisseurs

à écrit le 01/07/2013 à 20:45
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et c'est reparti pour un tour. Tout passe, tout lasse et tout recommence. 20 ans a expliquer l'externalisation et soudain retour à la case internalisation .....

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