Contre le chômage des jeunes, une solution

Contre le chômage des jeunes on a tout essayé, sauf de faire de l'enseignement professionnel une voie royale ! Par Bernard Capron, Président d'AGEFA-PME

Le projet de loi sur la formation professionnelle est en débat au Parlement. Il intègre un volet qui concerne l'apprentissage. Il y a lieu d'être inquiet. Le Gouvernement a effet prévu de confier les fonds de l'enseignement professionnel aux organismes qui gèrent déjà ceux de la formation professionnelle. Il ne s'agit pas là d'une réforme mineure. Cela traduirait-il la persistance d'une politique qui réserve l'enseignement professionnel à l'accueil des seuls élèves en difficulté?

 Dans de nombreux pays, un véritable tremplin

Il faut bien prendre conscience que l'enseignement professionnel doit être un véritable tremplin vers l'avenir pour tous les jeunes. C'est le cas dans de nombreux pays européens où l'on regarde cet enseignement comme une voie d'excellence. Impensable ! La France a en effet construit deux filières cloisonnées : d'un côté la voie considérée comme royale - l'enseignement général - et de l'autre la voie de garage - à savoir toutes les autres et particulièrement l'enseignement professionnel.

Une autre voie d'excellence

Nos voisins ont au contraire compris que seul un enseignement professionnel fort, diversifié, qui repose sur la même exigence que l'enseignement général et technologique permettra de lutter structurellement contre le chômage des jeunes. En somme que l'enseignement professionnel soit à terme, une autre voie d'excellence.

Valoriser un véritable socle d'enseignements généraux, pour faciliter des voies de passage

Pour atteindre ces objectifs essentiels, la première des mesures est de valoriser un véritable socle d'enseignements généraux commun à tous les diplômes de l'enseignement professionnel, en lien avec les humanités, les réalités sociales et culturelles. En somme, être aussi exigeant, en matière de culture générale, avec les élèves de toutes les filières. Ce serait une petite révolution dans le schéma actuel de l'enseignement professionnel français.

Cette ambition ouvrira la porte à un rapprochement nouveau. Elle facilitera le passage, pour un élève, de la voie générale à la voie professionnelle, et inversement ; ce qui reste aujourd'hui extrêmement difficile. En somme, mettre fin à une forme d'irréversibilité qui pénalise nos élèves. Il s'agit donc de permettre à un élève de la voie professionnelle de réintégrer la voie générale s'il le souhaite. A l'inverse, les filières professionnelles rénovées et plus ambitieuses seront plus attractives auprès des jeunes pour la poursuite de leurs études au lycée ou à l'université. C'est d'ailleurs dans cet intervalle du brevet à la Licence que tout se joue.

Une demande des jeunes

Cette exigence sur les contenus et les programmes rejoint donc une demande formulée par les jeunes eux-mêmes qui souhaitent pouvoir poursuivre des études reconnues leur permettant de s'intégrer et de s'épanouir sur le marché du travail.

C'est ainsi qu'un tiers des apprentis sont aujourd'hui inscrits à l'université. Leur nombre augmente de près de 10 % chaque année. Et ne croyons pas qu'ils préparent des diplômes au rabais. Du BTS au Master, du diplôme d'ingénieur aux écoles de commerce, ils prouvent que l'enseignement professionnel est déjà une voie d'excellence. Là encore, les exemples européens montrent que nous pouvons aller beaucoup plus loin en généralisant cette approche.

L'exemple allemand...

La faiblesse du taux de chômage des jeunes en Allemagne, qui atteint 7,7 %, ne trouverait-elle pas ses origines dans le succès de l'apprentissage outre-Rhin ? Quand la France se fixe pour objectif d'éduquer 500 000 apprentis par an d'ici 2017, 1,5 million d'étudiants est formé en alternance chaque année en Allemagne. En Autriche, où le taux de chômage des jeunes s'élève à 8,7 %, ce sont 40 % des jeunes de 15 ans qui ont fait le choix de l'alternance.

Les études montrent que ces jeunes s'épanouissent dans ce dispositif qui offre de nombreux avantages. Le premier est de pouvoir financer leurs études tout en poursuivant leur cursus car leur présence dans l'entreprise est rémunérée. A l'heure où l'on s'interroge sur la démocratisation des études supérieures, on gagnerait à s'inspirer de ces parcours.

Faciliter l'accès aux bourses pour lutter contre le décrochage

D'autres mesures doivent venir en complément en s'assurant par exemple que l'accès aux bourses soit le plus large possible pour les jeunes qui ont fait le choix de l'apprentissage et/ou de l'enseignement professionnel. Ainsi, le gouvernement lutterait efficacement contre le décrochage scolaire.

Au final, c'est une politique publique ambitieuse en faveur non pas de l'enseignement mais de l'éducation professionnelle qui doit être mis en œuvre. La voie à suivre à déjà été tracée de longue date : des formations plus généralistes (c'est-à-dire qui ne cantonnent pas l'élève à l'apprentissage d'un geste technique en particulier) et plus professionnalisantes, des enseignants mieux formés aux réalités de l'entreprises ; une promotion de l'esprit d'entreprendre dans les établissements scolaires. En somme, une évolution des mentalités qui rendra possible la construction de passerelles entre l'enseignement général et professionnel.

Mieux former aux mutations de notre économie

Cette proposition a un but unique : lutter contre le chômage structurel des jeunes qui dépasse actuellement les 25 %. Mieux formés aux mutations de notre économie et dotés d'un solide bagage culturel et professionnel, ces élèves pourront enfin s'intégrer sur le marché du travail.

Rien ne sera possible si à l'origine nous baissons les bras par avance et refusons de donner les moyens à l'enseignement professionnel la capacité d'être une voie d'excellence, aussi exigeante que la voie générale. Le débat au Parlement est l'occasion de se saisir de cet enjeu. Tous ensemble.

Bernard Capron

Président d'AGEFA-PME

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Commentaires 31
à écrit le 26/02/2014 à 16:46
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voilà une bonne idée, habitant dans le sud de l'Allemagne depuis + de 30 ans, j'ai écouté la radio ce midi on y parlait comme caque année des fameux "Zeugnis", ce sont les bulletins scolaires des élèves et l'on a tout de suite parlé de ce qui est nor...

à écrit le 18/02/2014 à 19:02
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Il serait plus judicieux de pouvoir travailler avec un CAP car à l'heure actuelle on cherche plus à embaucher un ingénieur payé à bac+2 pour faire un travail de bac+2. Du coup celui sans diplôme est au chômage...

le 24/02/2014 à 16:16
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Et pourquoi pas travailler avec un brevet des collèges ? Plus besoin de faire des études, on pourra travailler dès 15 ans, génial non ?

à écrit le 16/02/2014 à 12:28
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L'autre solution , ( sur laquelle j'ai réfléchi toute cette nuit ) , consisterait à créer une Ecole Supérieure de la Politique. -On pourrait ne demander aucun diplôme , c'est inutile. -Ces étudiants...il en faudrait quelques centaines de mille , éc...

le 23/02/2014 à 14:17
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Ca existe déjà et la politique se transmet aussi de père en fille ou en fils , comme la mafia. Les exemples sont nombreux en france.

à écrit le 14/02/2014 à 18:38
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Ayant tourné et retourné le problème dans tous les sens , sans trouver de solution , je propose qu'on supprime la cause du problème par le problème , supprimons le travail et l'auteur de l'étude.

à écrit le 14/02/2014 à 2:43
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Compte tenu des fermetures des entreprises consécutive à un matraquage fiscal insensé il est logique que les jeunes souhaitent fuir cette Europe en plein déclin pour tenter de s'épanouir ailleurs. Comment trouver le bonheur avec le chômage, les emplo...

à écrit le 13/02/2014 à 17:10
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Je vais bientôt avoir 2 masters. Avec le recul, je me dis que j'aurais du faire dentiste, patissier ou menuisier. D'accord avec Didier, pas la peine d'aller dans l'industrie si celle ci s'écroule. J'en ai vu des BTS qui finissaient ouvriers...

à écrit le 13/02/2014 à 14:10
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Pour apprendre un métier industriel, il faut avoir la foi, au rythme où l'industrie française s'écroule... On trouve encore du boulot quand on a un bac pro recherché, mais dans 10 ans ?

à écrit le 13/02/2014 à 14:02
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Pour parler de la haute savoie, demandez à cluses s'ils trouvent des soudeurs et des tourneurs qui partent à Genève. Vous Etes tous risibles avec l'apprentissage pour apprendre les défauts de l'entreprise au lieu d'un geste sur à l'école et toutez c...

à écrit le 13/02/2014 à 11:21
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Ce qui fait que les jeunes iront vers les filières professionnelles, ce sera quand leurs parents qui y travaillent ne reviendront pas du boulot écoeurés par le mépris de leur directions, leurs salaires médiocres, leurs perpectives d'évolutions minabl...

le 13/02/2014 à 17:13
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Oui, mais c'est comme ca dans tous les métiers en France, à moins d'être son propre patron. Vous vous souvenez de cet article paru il y a quelques mois, un restaurateur au Texas qui avait vendu son restaurant pour pouvoir payer l'opération chirurgic...

à écrit le 13/02/2014 à 10:18
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Alors ? qui veut se mettre en bleu de travail devant une machine-outil plein d'huile de coupe dégeulasse, être payé au smic et être la risée des petits copains ?

le 13/02/2014 à 10:34
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D'autant que l'âge de la retraite sera la même qu'un col blanc avec une durée de vie plus courte en moyenne de 7ans !

le 13/02/2014 à 19:03
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J'y suis et je suis titulaire d'un Master...

à écrit le 13/02/2014 à 10:14
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"On a tout essayé", affirme l'interviewé... sauf, entre autres, la hausse des seuils sociaux qui bloquent les recrutements !! Demandez donc aux chefs d'entreprise de 9 salariés pourquoi ils ne recrutent pas ..! Posez donc la même question aux employe...

le 13/02/2014 à 10:43
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C'est une remarque fort pertinente, merci de l'avoir rappelé !

le 13/02/2014 à 12:20
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Les effets de seuils existent et existeront toujours! On peut les lisser mais cela ne changera pas fondamentalement la donne. Il y en a d'autres notamment 1.5 smic...

à écrit le 13/02/2014 à 10:05
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Rendez-vous prochainement aux urnes, et surtout sans bulletin blanc !

à écrit le 13/02/2014 à 9:55
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C'est quoi "l'enseignement professionnel" ? Est-ce l'enseignement dispensé dans les filières technos qui débouchent sur les petits boulots, l'enseignement de l'histoire des entreprises et de la micro-économie (dont les grandes écoles ont l'exclusive....

à écrit le 13/02/2014 à 9:31
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J'ai fait de l'apprentissage. Mon école itin était très peu connue mais m'a apporté de nombreuses compétences connaissances et expériences. C'est grâce a a ça qu'a 24 ans on me proposait que des CDI pendant la crise ( dixit les recruteurs ). A dével...

le 13/02/2014 à 10:18
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Merci de ce témoignage auquel je m’associe. J’ai suivi une filière technique de la classe de 4-eme au bac Math et Tech. Ce fut la période la plus enrichissante de ma scolarité, contacts humains, éveil technologique, gout de la création, sans négliger...

le 13/02/2014 à 10:55
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On a réssucité le Dodo à cinq pattes grâce aux techniques de l'agit-prop ! Quand on a fait une école d'ingénieur et une fac "prestigieuse" après un bac pro, en ayant aussi réussi dans les affaires, on figure dans le who's who ! Alors, encore un petit...

à écrit le 13/02/2014 à 8:56
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Il faut ouvrir des bars et des boites de nuit partout. Le problème des jeunes sera alors résolu à la racine Ontologique du Mal.

le 13/02/2014 à 9:58
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les "boites de nuit" peuvent être un bon complément des "boites de jour", surtout au moment où l'on parle du travail du dimanche ;-)

le 13/02/2014 à 10:08
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@maxime piolet: vous parlez "petits boulots"... vous n'avez jamais payé la facture d'un plombier, d'un électricien ou d'un garagiste ???!!!

le 13/02/2014 à 11:01
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@Lyon69 : je comprends votre remarque et je dois donc préciser que les filières technos auqelles je faisais référence ne sont pas celles qui débouchent sur les métiers dont vous parlez et dont l'exercice est encadré par les chambres des métiers. Votr...

à écrit le 13/02/2014 à 8:52
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Je pense que si l'Allemagne a un faible taux de chômage c'est surtout d'un côté du au fait que les entreprises ont besoin de ressources car les affaires marchent tout simplement et aussi car la pyramide des âges est très avantageuse aux jeunes allema...

le 13/02/2014 à 11:01
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J'ai été dans des usines françaises, qui quelquefois ont du mal à produire car elles manquent d'ouvriers spécialisés (fraiseurs, etc). Ca paraît incroyable mais c'est le cas.Et en Suisse , on rencontre des directeurs d'usine qui sont passés par l'app...

le 13/02/2014 à 14:14
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Oui, c'est vrai maintenant, mais elles proposent souvent des salaires très quelconques et rien ne dit qu'elles seront là encore avec des salariés dans 10 ans.

le 24/02/2014 à 16:19
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Oué ya plein de fraiseurs et jeunes spécialisés, mais au lieu de les embaucher, on les rejettes car ils ont un mauvais prénom ou de mauvaises origines, ou du mauvais quartier. C'est pas une blague, c'est vrai, et vous pouvez en rire, ou dire que c'e...

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