Le dollar et le yen, seules vraies monnaies refuges

Lors de paniques financières, les investisseurs cherchent à se protéger en délaissant leurs actifs risqués pour s'orienter sur des actifs sans risque ou des valeurs refuges. Des monnaies peuvent jouer ce rôle. Une récente étude du CEPII montre que seuls le dollar et le yen le jouent vraiment. Par Virginie Coudert, Cyriac Guillaumin, Hélène Raymond, CEPII

 Pendant les crises financières, les investisseurs ont tendance à se débarrasser de leurs actifs risqués, dont les prix s'effondrent, au profit d'autres actifs, soit sans risque (comme du cash ou des bons du Trésor d'un Etat très bien noté) soit des valeurs dites refuges, comme l'or ou les métaux précieux dont les prix quoique fluctuants sont censés bien se tenir pendant les crises. Certaines devises -le dollar, le yen, l'euro, le franc suisse… - sont souvent considérées comme pouvant constituer aussi des valeurs refuge. Nous avons cherché à vérifier si elles le sont vraiment.

Valeur refuge: un rendement positif pendant la crise

Pour ce faire, nous commençons par définir les notions de « valeur refuge » et   d'« actif sans risque ». Ce dernier terme désigne une dette sans risque de défaut, qui offre donc des rendements sûrs. Au contraire, les « valeurs refuge » ont des rendements aléatoires, qui sont corrélés négativement au cycle financier ; elles ont ainsi tendance à procurer des rendements positifs pendant les crises. En contrepartie, leurs excès de rendement anticipé (ou « primes de risque ») sont négatifs sur le long terme.

Nous considérons donc une monnaie comme une valeur refuge si deux conditions sont réunies : premièrement, sa prime de risque est négative sur le long terme ; deuxièmement ses excès de rendement sont positifs en moyenne durant les crises. En suivant cette définition, nous tentons d'identifier les monnaies refuges parmi un ensemble de 26 devises sur la période 1999 et 2013.

Taux d'intérêt versés sur la monnaie supérieurs, ou appréciation de la devise

Pour caractériser les crises financières, nous retenons les périodes où le VIX (volatilité implicite sur l'indice SP500) dépasse un seuil fixé arbitrairement à 30, ces crises étant qualifiées de « sévères » lorsque la volatilité dépasse le niveau critique de 40. Nous calculons ensuite les excès de rendements à 1 mois de ces monnaies par rapport au DTS sur l'ensemble de la période et sur les périodes de crises. Les gains peuvent provenir de deux composantes : des taux d'intérêts versés sur la monnaie supérieurs à ceux du DTS ou bien une appréciation de la devise contre DTS pendant la période de placement considérée (ici 1 mois). En réalité, les plus fortes pertes constatées sur les monnaies pendant les crises correspondent non pas à des taux d'intérêt faibles mais à des dépréciations brutales.

Le dollar et le yen, seules vraies valeurs refuges

Seules deux monnaies, le dollar et le yen, satisfont les conditions pour être des valeurs refuges, car elles ont bien des excès de rendements négatifs sur le long terme (respectivement de -0,1 % et -1,1 % en moyenne annualisée) et positifs pendant les crises (respectivement de 2,3 % et 10,3 %, voir graphique). Pendant les crises sévères, la rentabilité de ces deux monnaies augmente encore atteignant 8,5 % pour le dollar et 25,3 % pour le yen.

L'euro accentue ses pertes en cas de crise sévère

Toutes les autres monnaies ont le comportement symétrique : elles présentent des excès de rendements positifs sur longue période et négatifs pendant les crises ; les pertes sur toutes ces monnaies sont encore accentuées pendant les crises les plus sévères. C'est notamment le cas de l'euro. La monnaie unique a eu tendance à se déprécier pendant les pics de volatilité de 2010 et 2012 car ceux-ci ont été précisément engendrés par les craintes d'un défaut souverain à l'intérieur même de la zone et les risques de contagion qui auraient pu en résulter.

Le franc suisse suit les mouvements de l'euro

Malgré son appréciation tendancielle, le franc suisse n'apparaît pas non plus comme une valeur refuge, car il a tendance à suivre les mouvements de l'euro, tendance qui s'est accentuée depuis septembre 2011 avec l'instauration d'un taux de change fixe CHF/EUR ; au total un placement en franc suisse faire perdre 0,9 % contre le DTS en moyenne annualisée sur les périodes de crise.

 La livre sterling fortement perdante pendant les crises

La livre sterling présente aussi des rendements très négatifs pendant les crises (-5 %) et encore plus lors des crises plus sévères (-28,5 %). Quant aux dollars canadien, australien et néo-zélandais, leurs excès de rendements confortables sur longue période (respectivement de 3,1 % ; 6,3 % et 6,3 %), s'accompagnent de pertes drastiques pendant les crises (-28,0 %, -30,5 %, -31,5 % pendant les crises sévères.

Ces résultats sont confirmés par une estimation économétrique non linéaire qui mesure la réaction des devises aux variations du VIX, et permet d'estimer le seuil de volatilité de manière appropriée plutôt que de le fixer arbitrairement. Le dollar et le yen sont bien les seules monnaies à s'apprécier lorsque le VIX augmente, même lorsque le seuil de volatilité critique est dépassé.

 Rendement supplémentaire à un mois des monnaies par rapport au DTS, pendant les crises. En % moyen, annualisé, 

monnaies refuge

source: Virginie Coudert, Cyriac Guillaumin & Hélène Raymond , 2014.

 

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Commentaires 25
à écrit le 22/05/2014 à 10:57
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Et ben moi je vous garantis qu'au prochain crash on retrouvera en effet les memes tendances: les investisseurs se porteront a nouveau massivement vers le dollar. Il n'y a simplement pas d'autre alternative credible. Et ne parlez pas de l'euro: il ne ...

à écrit le 06/03/2014 à 23:14
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un petit mot sur le carry-trade avec le yen n'aurait pas été de trop me semble-t-il. Car sans lui on ne comprend absolument rien de ce qui se passe actuellement. Pour seule information, regardez la corrélation de la paire et des marchés et vous compr...

à écrit le 06/03/2014 à 15:39
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C'est moi ou les auteurs sont des rigolos? pas un seul commentaire en leur faveur... le yen et le dollar des valeurs "refuges" ?!? ça fallait oser quand même lol ! je crois que le Gorafi peut reprendre cet article sans changer un seul mot :) / bon au...

à écrit le 06/03/2014 à 14:44
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Vous vous trompez tous !!! Les seules VRAIES monnaies refuges au Monde , ce sont l'Honnêteté , l'Intégrité et la Compétence de nos z'Hommes Politiques. Tout droit et le doigt sur la couture du pantalon ...'arde à Vous !!! Clairon : Tatatata...

à écrit le 06/03/2014 à 7:53
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Un bel article de propagande pour le roi dollar ... Sauf que le roi est nu ... 91 millions d américains n ont plus de boulot et ne sont pas comptes dans les stats du chomage (source cnn money pour pas etre taxé de theorie du complot) , 40 millions d ...

le 06/03/2014 à 15:08
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Rien à redire. Mes chiffres sont les mêmes. Bernanke n'a pas su identifier la nature exacte de la crise , ce qui fait que les QE se sont transformés en arrosage de l'incendie avec de l'essence. Etant donné la quantité fantastique de prouits dérivés ...

à écrit le 05/03/2014 à 15:23
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a mon avis si vous cherchez une valeur refuge, c'est dans l'or qu'il faut taper..

le 05/03/2014 à 17:09
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.. ou le bitcoin ;)

le 05/03/2014 à 20:56
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@alain: si tu parles de l'or physique que tu as dans ta poche, c'est en effet un peu mieux., mais faut pas non plus rêver parce l'or est indexé sur le dollar et ne peut se négocier ou se transporter facilement. Le refuge dont on parle est selon moi l...

le 05/03/2014 à 23:43
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La dette du Japon représente 245 % de son produit intérieur brut, d'après le FMI. Malgré cela, il faudrait croire que le Yen fait partie des 2 seules monnaies refuges dans le monde ??? Il ont besoin de s'y mettre à 3 pour écrire une ânerie pare...

le 07/03/2014 à 8:21
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@ Patrickb Oui , la pièce en platine... Concernat l'or physique , il n'obéit plus à ses anciens fondamentaux car il est toujours manipulé. Il y a l'argent physique , qui se comporte comme l'or , mais qui possède des milliers d'applications industr...

à écrit le 05/03/2014 à 15:19
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les performances passées ne peuvent préjugées de performances futures.. Si le yen et l' usd ont bien étés valeurs refuge en leurs temps... ceci est terminer ( on imprime au laser ), si l' euro ne pouvait être prit en référence au vu de sa jeunesse.....

à écrit le 05/03/2014 à 14:01
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1. le hausse du vix ne caracterise pas une crise mais la hausse du risque américain UNIQUEMENT. 2. L'EURO n'est pas une valeur refuge lorsque la ZONE EURO est en crise MERCI !!!!! 3. Oui le FRS SUISSE suit l'EURO car les 2 économies sont fortement ...

le 05/03/2014 à 16:01
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OK avec "erreur methodologique " Méthodologie d'analyse incorrecte , donc résultats faux. Moi , je dirais syntax error.

le 05/03/2014 à 19:07
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L'interprétation du VIX ne se réduit pas à sa définition de volatilité implicite du marché boursier US. Hélène Rey a montré en 2013 que c'est un indicateur du cycle financier international.

le 07/03/2014 à 8:27
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Il y a plusieurs cycles. C'est ça qui complique tout. Cycle immobilier , cycle de l'économie , cycle séculaire , cycle de Kondratieff... Le plus sûr à mettre en oeuvre et à analyser est le Cycle de Jugla. Vix. Il faut faire attention : il tradu...

à écrit le 05/03/2014 à 13:56
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Personnellement, mes seules valeurs refuge sont la terre, la pierre, l'or ... et le plomb pour défendre le tout. Toutes les monnaies ne sont que des suites de 0 et de 1 sur des serveurs dans le cloud, ou du papier coloré plus joli que du PQ mais ...

le 05/03/2014 à 17:26
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Vous avez oublié l'alcool,un lapin ou un sac de patates contre un litre de gnoole il faut toujours avoir une reserve de plusieurs dizaines de bouteilles,ca mange pas de pain

le 06/03/2014 à 15:30
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avec beaucoup de cartouches calibre 12 on peut avoir tout ça, mais c'est bruyant :)

à écrit le 05/03/2014 à 13:12
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Faire une étude pendant la crise de l'euro pour conclure que l'Euro n'était pas une valeur refuge pendant la crise de l'euro, il fallait oser le faire ! Et ils l'ont fait.

à écrit le 05/03/2014 à 13:02
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Je n’ai pas l’impression que l’euro soit en train de baisser face au dollar. Hélas. Quant aux dettes américaines… « Another day, another dollar » devient « another day, another dolour ».

à écrit le 05/03/2014 à 12:42
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Acheter vite du dollar papier car a force d'imprimer bientôt il n'y aura plus de forets et là le cour va exploser!!

le 05/03/2014 à 13:03
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La création monétaire est virtuelle, personne n'imprime physiquement des billets!!!

à écrit le 05/03/2014 à 12:33
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Compte tenu de la politique monétaire menée par ces deux pays ces dernières années, on peut avoir des doutes sur le fait que ce constat restera valable lors des crises à venir ...

le 05/03/2014 à 13:13
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En effet, Xy. Tout le monde commence à bien comprendre leurs manips.

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