Assurance emprunteur : pourquoi la loi Hamon ne sera pas une révolution

Certes, les consommateurs auront plus de liberté de choix de leur assurance emprunteur en cas d'achat immobilier. Mais les banques, qui risquaient de perdre des clients, ont trouvé la parade. Par Xavier Florit, Directeur du Développement pour la France et la Belgique, Genworth

 La loi Hamon, qui entrera en vigueur le mois prochain, permettra aux souscripteurs de crédit immobilier de bénéficier d'un délai de 12 mois pour changer leur contrat d'assurance de prêt. Une nouvelle avancée après la loi Lagarde de 2010, qui permettait de choisir librement son assureur à la signature de l'emprunt. Mais face à cette nouvelle loi, les banques renâclent : les consommateurs se rendent-ils comptent qu'en faisant jouer une concurrence élargie, ils sortent des pistes balisées des contrats de groupe ? Certains pourront certes en tirer profit, mais d'autres, les profils dits « à risque », risquent de ne plus trouver - ou plus difficilement - à assurer leur crédit. Alors, la loi Hamon : véritable révolution ou planche savonnée pour le consommateur?

 

Aujourd'hui, des couvertures mutualisées

 

Les contrats d'assurance de prêt proposés aujourd'hui par les groupes bancaires - qui détiennent 80% de ce marché - reposent sur des couvertures de risques mutualisés au sein de portefeuilles collectifs. Le principe étant celui de la mutualisation, chaque emprunteur peut avoir accès à une couverture, les « bons risques » affichant une forte rentabilité permettant aux « risques dégradés » d'intégrer le contrat moyennant un ticket d'entrée acceptable. La réalité est toutefois quelque peu différente : les souscripteurs présentant un risque dégradé sont souvent traités à la marge pour compenser la prise de risque.

 

 Vers des critères plus sélectifs

 

En partant du principe que les changements annoncés par la loi Hamon profiteront au consommateur, avec une baisse des prix et des couvertures plus compétitives, ils entraîneront immanquablement le renforcement des critères d'éligibilité, par exemple un apport minimum plus important, pour une approche du risque plus qualitative. Parallèlement, il apparaît tout aussi clairement que la loi Hamon signera la fin des taux historiquement bas que nous connaissons aujourd'hui : la réduction des marges des banques sur l'assurance sera vraisemblablement compensée par l'accroissement de celles sur les conditions financières du prêt.

 

L'argument des banques sur le risque qu'engendre la loi Hamon, à savoir « détricoter » les contrats collectifs pour ne proposer que des contrats individuels plus sélectifs, peut donc s'entendre.

 

 La parade des banques

 

L'autre danger de la loi Hamon, pour les Bancassureurs cette fois, est de voir les profils « bons risques » chassés et progressivement délogés par la concurrence. Mais les banques ont déjà préparé leur contre-attaque, avec de nouvelles offres individuelles pour reprendre rapidement l'initiative auprès de leurs clients et juguler la potentielle évaporation de leur portefeuille. N'oublions pas que la première des préoccupations des candidats à l'accession à la propriété demeure l'acceptation du prêt immobilier. De ce fait, les banques disposent d'arguments les plaçant dans des prédispositions favorables : simplification des formalités, rapidité de la procédure, facilité d'adhésion, effort sur le taux de prêt...

 

 Un besoin accru de transparence

 

Alors, pour l'emprunteur, comment identifier parmi les offres disponibles les meilleures couvertures, conditions générales, bénéfices ? La récente polémique autour de la rétrocession de la participation des emprunteurs aux bénéfices techniques et financiers de leur assurance le montre parfaitement : tout ceci reste opaque aux yeux du grand public, qui manque cruellement d'information et de transparence. Et c'est là que les banques ont une carte à jouer : elles doivent s'attacher à vulgariser au maximum ces produits de façon à les rendre compréhensibles par tous. Il en va de l'intérêt du client, mais aussi de tous les acteurs du marché. Car un consommateur mieux informé est un consommateur qui consomme... mieux.

 

Les changements apportés par la loi Hamon devraient donc indéniablement profiter aux consommateurs, dans la mesure où l'ouverture du marché reposera sur les prix, de meilleures garanties et davantage de transparence.

 

 Les rapports de force ne devraient pas changer

 

Mais in fine, les rapports de force ne devraient pas fondamentalement changer ; le marché de l'Assurance Emprunteur devrait rester dans l'escarcelle des mêmes acteurs. Et la révolution annoncée n'aura finalement pas eu lieu.

 

 Xavier Florit, Directeur du Développement pour la France et la Belgique de Genworth, spécialiste de l'Assurance Emprunteur

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Commentaires 4
à écrit le 25/07/2014 à 1:01
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"les consommateurs se rendent-ils comptent qu'en faisant jouer une concurrence élargie, ils sortent des pistes balisées des contrats de groupe ? Certains pourront certes en tirer profit, mais d'autres, les profils dits « à risque », risquent de ne pl...

le 13/10/2014 à 12:03
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La concurrence a du bon dans le sens où tous les distributeurs concernés sont contraints de sortir de "leur zone de confort", je partage complètement votre conclusion, elle est saine et in fine souvent profitable au consommateur. Mais je maintiens p...

à écrit le 20/06/2014 à 11:37
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Le client est ROI , il peut changer de banque pour de meilleurs prestations ailleurs et cela facilement .

à écrit le 20/06/2014 à 8:09
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Avec un risque supposé dégradé mon contrat personnalisé (surprime +50%) reste plus avantageux que le contrat groupe qui m'a été proposé en 2007.

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