Le « papy-boom », une mine d'opportunités pour les innovations responsables

Le papy boom n'est pas seulement un défi pour les finances publiques: il constitue une opportunité pour les entreprises par Alexandre Asselineau et Marc Ingham, enseignants-chercheurs, Chaire en Management & Innovation Responsables, Groupe ESC Dijon-Bourgogne

L'information n'est pas nouvelle : le nombre de personnes âgées ne cesse et ne cessera d'augmenter ces prochaines décennies dans bon nombre de pays de l'Union Européenne, en raison des effets conjugués du « baby-boom » d'après-guerre et de l'augmentation de l'espérance de vie.

S'il est d'usage de commenter les défis et contraintes qu'elle génère, il est en revanche moins fréquent d'évoquer les opportunités considérables que peut offrir cette transition démographique en faveur de l'innovation, de la croissance , de la compétitivité des entreprises, des Nations et des régions concernées.

Variété de domaines

S'agissant des innovations, de nombreuses technologies peuvent dorénavant contribuer à relever les défis liés au vieillissement, au bénéfice de l'autonomie et du confort de vie de nos aînés : progrès de la médecine, meilleurs systèmes d'information et de communication, adaptation de l'alimentation et de l'habitat, accroissement de la mobilité, robotique, domotique, etc. Ces avancées technologiques peuvent représenter des avancées majeures dans l'accompagnement du grand âge.

La technologie ne résout pas tout

De ce seul point de vue, le potentiel de développement d'activités et d'emplois est déjà important. Mais il faut aller plus loin, car la technologie ne résout pas tout, et ce pour au moins deux raisons. D'abord parce que les problématiques en jeu recouvrent deux dimensions qui doivent être dissociées, même si elles se combinent souvent : les aspects liés au vieillissement physique et/ou psychique, et les contextes et situations sociales et économiques dans lesquelles vivent ces personnes (sécurité, isolement, dépendance, etc.), appellent des considérations au moins autant humaines que techniques.

Ensuite parce que ces technologies ont un coût et ne peuvent donc bénéficier qu'à une frange restreinte - la plus aisée - de la population : couvrir davantage qu'aujourd'hui les besoins des plus démunis constitue notamment un enjeu de taille, appelant créativité et innovations à tous les niveaux.

Engagement volontariste et collectif

Le constat a été établi. Le contrat de filière « Silver économie » , engagé par le gouvernement français en décembre dernier, établit les bases d'une large mobilisation publique et privée. S'appuyant sur un diagnostic stratégique des domaines porteurs dans lesquels le pays bénéficie d'atouts et des obstacles à lever, l'approche retenue vise à inciter les acteurs privés et publics concernés à se structurer afin de définir des axes prioritaires et former un véritable écosystème de l'innovation dans le domaine de l'accompagnement du vieillissement de la population.

La taille critique des grandes entreprises

Les entreprises, au travers de partenariats publics-privés, leur inscription dans des pôles et réseaux d'innovation, sont appelées à jouer un rôle moteur. Les plus grandes entreprises disposent des moyens financiers et humains en R&D et d'une taille critique suffisante pour développer ces innovations et les déployer à grande échelle. Elles peuvent entraîner dans leur sillage des PME/TPE et générer la création de nouvelles entreprises capables de servir des niches de marchés.

Bon nombre d'innovations à destination de personnes âgées, en particulier celles qui visent à apporter des solutions intégrées pour celles qui sont les plus dépendantes, sont des innovations de « système ». Celles-ci nécessitent souvent l'intervention d'une variété d'acteurs privés et publics, tant pour ce qui concerne leur développement technologique que pour assurer les services qui accompagnent leur diffusion.

Véritable exercice de la responsabilité

Ces innovations sont « responsables », car elles sont des manifestations concrètes de l'exercice de la responsabilité des entreprises et collectivités au bénéfice de populations dont les besoins spécifiques sont habituellement moins servis ou non servis. Les acteurs concernés contribuent ainsi à faire face à des préoccupations et défis sociaux et sociétaux au-delà de la seule dimension économique, et sont incités à adopter et faire adopter par leurs partenaires des comportements éthiques dans les processus qui les sous-tendent et dans leurs relations avec les parties prenantes à ces innovations.

Les enjeux de la domotique

Le cas des solutions domotiques (sécurité du domicile, gestion de l'énergie, pilotage à distance et gestion des situations d'urgences) est révélateur. Actuellement essentiellement réservées à destination d'utilisateurs aisés, l'enjeu de société est de les rendre disponibles pour le plus grand nombre, pour permettre le maintien à domicile des personnes âgées dans les meilleures conditions de qualité de vie, de confort et de sécurité : protection contre le vol, commandes à distance des équipements ménagers, détecteurs de fumée ou de chutes, technologies de la communication facilitant les liens sociaux, appels d'urgence aux secours, assistance médicale, etc.

Venant en complémentarité de la conception de l'espace (architecture intérieure) facilitant l'accès et la mobilité des personnes à domicile, il s'agit de donner naissance à des « smart homes » parfaitement adaptées.

Lever les barrières au développement de l'industrie

Le potentiel de développement est donc considérable. Pour l'heure, les solutions développées restent assez traditionnelles, onéreuses, d'utilisation difficile et, souvent le fait de PME, déployées à petite échelle. Notre pays dispose de tous les atouts pour aller beaucoup plus loin et se positionner sur le plan international, à l'instar de ce qu'ont déjà fait quelques entreprises.

Hager, Legrand, Schneider Electric, Somfy, Delta Dore ou CDVI, alliées dans la Start-Up « Confluens », œuvrent par ce biais à lever une barrière majeure au décollage de ce marché : l'interopérabilité entre les différents équipements. D'autres initiatives existent un peu partout sur le territoire, comme à Guéret dans le Limousin, avec le Pôle Domotique Santé Odysée 2023.

Dans ce domaine comme dans beaucoup d'autres, de réelles perspectives de développement de marchés existent, aux niveau national comme international, avec à la clé croissance et création d'emplois. Au-delà de la dimension économique, essentielle dans un pays miné par le chômage depuis de nombreuses années, ces nouveaux marchés présentent en outre l'avantage d'avoir du sens : celui d'accompagner nos aînés, beaucoup plus que nous le l'avons fait jusqu'à présent, dans une période de leur vie souvent marquée par la perte d'autonomie, la dépendance et la solitude.

En cela, c'est un immense défi de société.

Alexandre Asselineau et Marc Ingham, enseignants-chercheurs, Chaire en Management & Innovation Responsables, Groupe ESC Dijon-Bourgogne

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Commentaires 17
à écrit le 29/08/2014 à 7:14
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Nous disposons de temps de travail disponible, mais pour l'utiliser, il faut réduire le cout du travail? Cherchez la solution!

à écrit le 29/08/2014 à 7:05
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Le problème sera explosif en 2025; c'est lié à notre démographie. Il faut l'envisager sérieusement dès maintenant.

à écrit le 27/08/2014 à 19:06
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Bla bla... Allez voir vos parents et donnez leur ce qu'ils préfèrent : votre temps.

à écrit le 26/08/2014 à 22:50
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L'habituel bla-bla techno-bureaucratique à deux balles de ceux qui s'écoutent rêver ...

à écrit le 26/08/2014 à 21:40
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Quel laius technocratique! Ce n'est pas celui du business. Il y a certainement un marché au service des seniors, mais ceux-ci ont vocation a devenir économiquement faibles s'ils se contentent de leur pension vieillesse en décroissance inévitable. Bus...

le 27/08/2014 à 10:52
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Boule, 100% d'accord. Personne ne le dit aujourd'hui. Rendez-vous dans 10 ans vos prédictions se seront réalisées. Et rien n'est fait (comme d'habitude) pour préparer des solutions à ce problème

à écrit le 26/08/2014 à 19:29
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Très juste : ils ont de l'argent à donf et ne sont plus capables de lire les petites lettres des clauses. Faut foncer.

à écrit le 26/08/2014 à 19:27
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J'ai cru un instant que les auteurs allaient reconnaitre que les seniors avaient des idées et des compétences qu'ils pourraient valoriser en dynamisant le milieu associatif ...

à écrit le 26/08/2014 à 19:11
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conneries

à écrit le 26/08/2014 à 16:38
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Des conneries. Les vieux, ils n'ont pas besoin de technologies. Il veulent du contact humain et être préservé dans leur environnement. Les vieux, ils ont besoin de leur famille, de leur entourage, leurs amis. La mobilité géographique a fait exploser ...

à écrit le 26/08/2014 à 16:28
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L'avenir de la France ce n'est absolument pas les vieux mais les JEUNES!

le 29/08/2014 à 7:24
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Les jeunes travaillent pour les vieux. C'est ça l'économie. C'est une boucle qu'il faut amorcer et entretenir. Relisez Sauvy. Merci.

à écrit le 26/08/2014 à 12:55
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Je connais la solution, elle consiste à financer les retraites par une taxe sur l'énergie. C'est long à justifier. La silver économie serait favorisée.

le 26/08/2014 à 19:28
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Toujours le même disque rayé en boucle... consultez d'urgence un ORL!

le 29/08/2014 à 6:59
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Essayer d'imaginer ce que serait notre situation économique si on réduisait le cout du travail en augmentant le prix de l'énergie? C'est une simple application du principe des vases communicants. Merci.

à écrit le 26/08/2014 à 12:36
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L'économie est liée à la démographie, au capital humain et à l'énergie. La démographie doit être compensée par l'énergie. Comment l'expliquer?

le 27/08/2014 à 19:07
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1 homme vapeur, 2 hommes vapeurs... ? Matrix?

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