L'allocation universelle européenne, une idée pas si saugrenue

Dans un contexte de crises économique et sociale, l'allocation universelle refait surface à la fois dans le but de lutter contre les inégalités, mais aussi, et cela est nouveau, dans le but d'une stabilisation des économies de la zone euro. Par Yoan Robin, PSE-Ecole d'économie de Paris

L'initiative européenne pour le revenu de base n'a pas rassemblé assez de signataires pour être évaluée devant le Parlement Européen. Cette idée qui date de Thomas Paine au XVIIIème siècle refait régulièrement surface. Il s'agit de distribuer à tous les citoyens une allocation d'un certain montant sans condition aucune, mis à part peut être une limite d'âge. Les Suisses seront amenés à se prononcer sur la création d'une allocation universelle en 2015. Même si la proposition a peu de chance de remporter l'adhésion, c'est la première fois qu'elle sera débattue à l'échelle d'un pays. Les citoyens et dirigeants européens feraient peut être bien de s'en inspirer, car l'allocation universelle européenne pourrait être un très bon outil pour résoudre les problèmes de la zone euro.

La nécessité d'un stabilisateur automatique entre les États membres de la zone euro

La nécessité d'un stabilisateur automatique entre les Etats membres de la zone euro
La zone euro est une Union monétaire inachevée, construite sur une monnaie unique sans mécanismes stabilisateurs, comme peuvent l'être les dépenses de l'assurance chômage en France. Ceci est une source de déséquilibre, et donc de futures crises.

Tous les états membres de la zone euro sont soumis aux mêmes taux d'intérêts directeurs (le coût de l'emprunt pour une économie) fixés par la Banque Centrale Européenne (BCE). Malheureusement, l'inflation diffère d'un pays à l'autre. Ceci est un problème car l'inflation « grignote » les taux d'intérêts. En général, et toutes choses égales par ailleurs, plus un pays côtoie une forte croissance, plus son inflation est élevée et plus son taux d'intérêt réel, c'est-à-dire son taux d'intérêt une fois l'inflation soustraite, est faible. Une économie de la zone euro en croissance bénéficie donc d'un coût réel de l'emprunt faible, ce qui correspond à une relance !

 Une politique monétaire unique pour des pays non homogènes

Alors même qu'une économie de la zone euro en panne de croissance aura une inflation faible (voire négative) et ainsi un coût de l'emprunt élevé, ce qui nuit à sa reprise. Au final, la politique monétaire de la zone euro ne peut pas fonctionner pour l'ensemble des pays tant qu'ils ne sont pas homogènes, et ne peut ainsi pas résoudre le problème des inégalités face au crédit. Ce phénomène a conduit les Espagnols à l'économie florissante en 2000 à s'endetter plus que nécessaire, et a ainsi accentué la bulle immobilière avec les conséquences désormais connues. C'est aussi pourquoi l'Allemagne connaît actuellement un boom des prix immobiliers. A l'inverse, les taux d'intérêts réels de la Grèce ne lui permettent pas de sortir de la crise.

Une réponse: la politique budgétaire contra-cyclique, via l'allocation universelle

Face à cette politique monétaire pro-cyclique au niveau national, il faut que la zone euro réponde par une politique budgétaire contra-cyclique (qui freine l'économie en période de surchauffe et l'aide en période de contraction) adaptée à chaque pays. L'allocation universelle européenne mérite en cela d'être observée.

Un outil simple, efficace, et stabilisateur

Il est très facile d'imaginer une allocation universelle européenne, ou du moins de la zone euro, qui ne serait pas redistributive l'année de sa création, mais qui ensuite le serait en cas de choc économique touchant une ou plusieurs économies de la zone euro. Une telle allocation doit être fondée sur le Produit Intérieur Brut, ou plutôt sur sa variation d'une année à l'autre, qui est la seule mesure totalement transparente et unifiée au sein des pays membres de l'eurozone.

50 euros par habitant, redistribués des pays en croissance vers ceux en stagnation

Le PIB de la zone euro est de 9600 milliards d'euros en 2013 , la mutualisation d'une croissance de 2% permettrait de mobiliser 192 milliards d'euros pour stabiliser l'économie de la zone de ceux qui ont une tendance inflationniste vers ceux qui ont une tendance déflationniste et représente un surplus de 50€/hab/mois au socle de l'allocation universelle mise en place. Cette redistribution est bénéfique aux pays en crise car elle maintient le revenu par habitant et ainsi la consommation qui est le principal moteur de la croissance, mais aussi aux pays à tendance inflationniste car elle freine la dépense et la bulle spéculative sur le crédit.

Un effet bénéfique pour les pays à faible croissance

Grâce à son effet sur la consommation, elle permet d'accroître l'inflation dans les pays à faible croissance, ce qui bénéficie à l'emprunt via la baisse du taux d'intérêt réel. L'inverse est vraie pour les pays à forte croissance car l'allocation freine l'inflation et ainsi augmente le taux d'intérêt réel, ce qui limite l'effet spéculatif. L'allocation agit alors comme un stabilisateur automatique qui va à l'encontre du cycle économique. Elle joue un rôle de relance d'autant plus important que les multiplicateurs budgétaires sont forts en bas de cycle et faible en haut de cycle. Ce qui signifie que la relance pour les économies en faible croissance est importante, tandis que la ponction sur les économies en forte croissance n'a qu'un faible impact négatif sur la croissance.
Par ailleurs, la stabilité créée par ce mécanisme aurait pour conséquence d'attirer les capitaux et permettrait alors d'accroître l'investissement, au profit d'une croissance future pour tous les Etats membres de la zone euro. L'allocation universelle bénéficie ainsi de nombreux avantages économiques pour pallier aux lacunes de l'Union Monétaire, mais d'autres mécanismes peuvent être imaginés comme une assurance chômage européenne cependant plus complexe à mettre en œuvre.

Plus d'informations sur le site de Paris school of economics

pse2

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaires 32
à écrit le 02/09/2014 à 11:34
Signaler
Une telle allocation, à l'instar du SMIC à 1500 euros, auraient un effet bénéfique à très court terme car les prix s'aligneraient très vite à la hausse du fait de la liberté de fixation des prix sur les biens de première nécessité... Un exemple : Le...

à écrit le 01/09/2014 à 16:59
Signaler
AYN RAND a raison, si quelqu'un a quelque chose sans rien faire, alors cela veut dire que c'est quelqu'un d'autre qui paye. Le fait que notre niveau de vie soit très important ne change rien à cela. Bref, "IL N'Y A PAS DE REPAS GRATUIT". C'est très d...

le 02/09/2014 à 16:48
Signaler
Vous ignorez tout des mécanismes de création de la monnaie, sinon vous ne diriez pas des choses aussi absurdes.

à écrit le 29/08/2014 à 17:26
Signaler
Pour ceux qui n’auraient pas suivi le discours de F. Hollande lors de la conférence des ambassadeurs : (« le monde est brutal et dangereux »), « la situation est bonne, les capitaux investissent ». Le président nous dit donc que le Capital investit....

à écrit le 28/08/2014 à 20:27
Signaler
L'allocation universelle pourrait être récupérée sur les tranches d'imposition de l'impot sur le revenu pour ceux qui sont assujettis à cet impot.

à écrit le 28/08/2014 à 12:04
Signaler
dans les faits certaines communautés en bénéficient déjà depuis longtemps !

le 28/08/2014 à 16:14
Signaler
"Certaines"! Justement, une allocation ne fonctionnera que si elle est universelle, sans condition. Personne ne se sent laisé et toutes les autres aides coûteuses à mettre en place mises à la poubelle petit à petit. L'idée de la mettre en place pet...

à écrit le 28/08/2014 à 11:34
Signaler
Dans la mesure où les choses dont l'homme a besoin pour survivre doivent être produites, et où la nature ne garantit le succès d'aucune entreprise humaine, il n'y a pas et il ne peut pas y avoir de garantie d'une sécurité économique. L'employeur qui ...

le 28/08/2014 à 17:04
Signaler
Dans la mesure où la production humaine ait atteint un niveau conséquent. Dans la mesure où le capital importe plus que le travail salarié. La sécurité économique, tout de même que la sécurité sociale, pourrait donc être garantie sans grande diffic...

le 01/09/2014 à 16:55
Signaler
aucune production humaine n'est garantie, aucun capital n'est garantie, rien en se crée sans travail, le capital sans être humain ne sert à rien. La sécurité sociale est garantie depuis quand ? par nos déficits récurrentsdepuis 30 ans ? ouvrez les ye...

le 02/09/2014 à 14:54
Signaler
@ Max Stirner : parce que vous croyez encore que notre haut niveaude production se fait tout seul ? Que le capital sans l'être humain qui el possède est capable de produire ? Que la machine peut exister et produire sans un être humain derrière ? tout...

à écrit le 28/08/2014 à 10:24
Signaler
Tous les économistes sérieux sont pourtant d'accord qu'il faut "baisser le coût du travail" donc prendre à ceux qui ont le moins pour donner à ceux qui ont le plus. La Grèce est un bon exemple.

à écrit le 28/08/2014 à 10:18
Signaler
Soit, un simple découvert bancaire remis a zéro mensuellement!

à écrit le 27/08/2014 à 21:23
Signaler
Après l’article « La mondialisation, une chance gâchée » tentant de vendre aux français (et/ou de les sonder) davantage d’investissements dans l’infrastructure et l’éducation (or : qu’est ce qui permet de penser qu’investir davantage dans l’éducation...

à écrit le 27/08/2014 à 19:52
Signaler
Aucune chance de voir le jour surtout quand on pretant verser 50 € par habitant des pays qui font de la croissance vers ceux qui n'en font pas.Es ce que ce mecanisme existe à l'interieur meme des états !Surement pas et les zonnes pauvres dans tous le...

à écrit le 27/08/2014 à 19:20
Signaler
L'allocation paresseux pour réduire les inégalités? Effectivement il est anormal que des gens puissent désirer travailler pour améliorer leur quotidien et avoir plus que celui qui reste assis chez lui... Soyons tous paresseux, cette valeur est univer...

à écrit le 27/08/2014 à 18:58
Signaler
En fait, cela n'arrivera pas. les gens seraient libres.. vous imaginez?

à écrit le 27/08/2014 à 18:44
Signaler
Il faut maintenant dépasser le cadre de la valeur travail et trouver un autre fondement à la valeur, comme la valeur sociale ou la valeur humaine. La production n'a plus pour effet de faire travailler des gens, contrairement au début du XX° siècle, u...

à écrit le 27/08/2014 à 17:53
Signaler
Sur le papier c'est bien beau le problème étant que si sur ces 50 € il y en a 40 qui partent dans des produits chinois on financera la croissance chinoise sur les impôts européens... Exemple un de mes amis est au RSA, ses achats s'orientent plutôt ve...

le 27/08/2014 à 18:28
Signaler
Remarquons simplement que si on utilise l'allocation universelle pour baisser le coût du travail faiblement qualifié (en gros cela équivaut à une généralisation des contrats d'avenir du secteur marchand) et si en plus on fait une grosse TVA sociale c...

le 27/08/2014 à 18:49
Signaler
50€ redistribué depuis les pays qui sont en croissance, vers ceux qui n'y sont pas. Ce n'est pas 50€ d'allocation à tous. Le revenu minimum c'est un truc genre 1000€ par personne et par mois. Il inclut TOUT, il n'y a aucune autre aide (plus de ...

à écrit le 27/08/2014 à 17:52
Signaler
Sans le dire, on propose en ce faisant à peu près la même chose que le CFR (Council on Foreign Relations) qui constatant l'inefficacité des QEs se demande s'il n'est pas temps de passer à une distribution directe. La seconde question, c'est de savoi...

à écrit le 27/08/2014 à 17:51
Signaler
MALHEUREUSEMENT AUCUN FONDEMENT CETTE PROPOSITION PUREMENT IDEALISTE EN OUBLIANT QUE LES PAYS RICHES CONTRIBUENT PLUS QUE LES MOINS RICHES AU BUDGET DE L UE CE QUI CORRESPON DEJA A UNE REALLOCATION . MAIS JE RECONNAIS QUE POUR AVOIR DU SUCCES DANS L...

à écrit le 27/08/2014 à 17:25
Signaler
Commencer par l’idée séduisante (surtout pour les jeunes, soit ceux qu’il convient (d’acheter) de canaliser pour éviter un dérapage) d’un revenu de base (revenu sans condition mis à part peut être une limite d'âge… pourquoi pas une allocation identiq...

à écrit le 27/08/2014 à 16:47
Signaler
Cela montrerait effectivement, concrètement, directement ce dont est capable l'UE pour être utile au citoyen pauvre. Ces 50 € seront-ils déduits du RSA ? Si oui quel intérêt ? Si non, ce sera le résultat inverse des fonds engloutis via le FSE dans d...

à écrit le 27/08/2014 à 16:15
Signaler
Personnellement je vois plutôt l’allocation universelle dans un contexte national financée par la CSG pour remplacer les dépenses de solidarité multiples (santé, ASPA, AF, ASS, RSA, PPE, emplois d’avenir…et le quotient familial de l’IRPP). Associée ...

à écrit le 27/08/2014 à 16:00
Signaler
Oui mais, au préalable, stopper ces vagues migratoires car cette idée ne fera que les conforter...

le 27/08/2014 à 17:48
Signaler
tu parles ! tout à fait !!

à écrit le 27/08/2014 à 14:35
Signaler
Je suis pour une allocation universelle, mais payée par la banque centrale qui ainsi génèrera de l'inflation chaque année, en injectant de la masse monétaire dans la consommation, et si cela fait baisser la monnaie par rapport au dollar et d'autres.....

le 27/08/2014 à 15:53
Signaler
Bien vu, mais trop complexe à expliquer à notre gouvernement...

le 27/08/2014 à 16:10
Signaler
Si l’allocation universelle est payé par la banque centrale cela revient à faire marcher « la planche à billets », ce qui n’est pas forcément néfaste en ces périodes de fortes dettes et de risque de déflation. Mais pour que le système soit plus vertu...

le 27/08/2014 à 16:19
Signaler
Si l’allocation universelle est payée par la banque centrale cela revient à faire marcher « la planche à billets », ce qui n’est pas forcément néfaste en ces périodes de fortes dettes et de risque de déflation. Mais pour que le système soit plus vert...

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.