Payer ce que l'on veut consommer, la nouvelle économie de la consommation à l'usage

Le modèle de consommation à l'usage émerge dans les pratiques des Français, et pourrait largement transformer notre modèle économique. Par Philippe Van Hove, Directeur Europe de l'Ouest, Zuora
Autolib, un exemple montant de consommation partagée

Crise économique, explosion du numérique et impératifs environnementaux font évoluer de manière durable le comportement des consommateurs. En effet, un Français sur deux se déclare aujourd'hui en rupture avec les modes de consommations traditionnels et privilégie désormais une consommation à l'usage lui permettant de jouir de produits et services de manière personnalisée, libre et au juste prix.

Le modèle de consommation à l'usage émerge dans les pratiques des Français


Si l'idée de propriété est toujours présente à l'esprit des Français, on constate, en analysant les résultats détaillés d'une enquête menée par l'IFOP (1), que ce modèle se fissure : 49% des français indiquent souhaiter consommer plus de produits et de services par abonnement pendant l'année à venir et 73% pensent que ce modèle va se développer dans les deux années qui viennent.
La consommation à l'usage offre une réelle alternative à l'achat traditionnel aux yeux des Français et est davantage associée à l'idée de nouveauté (53%), d'illimité (53%) et de partage (57%). Posséder un objet n'a tout simplement plus de sens pour certains consommateurs. On assiste à un phénomène nouveau où la satisfaction du besoin ne passe plus par le produit mais par un service de qualité. A l'heure où l'obsolescence de la plupart des biens de consommation courante n'a jamais été aussi rapide (téléphone, ordinateur, voiture, électroménager, etc.), les consommateurs privilégient de plus en plus des services qui leur permettront de changer périodiquement leur appareil. La valeur ajoutée ne se situe donc plus dans le produit mais bien dans le service qui permet d'en bénéficier, temporairement.


Vers une généralisation à tous les produits et services

Les produits culturels et immatériels symbolisent aujourd'hui la réussite du modèle de la consommation à l'usage. La presse écrite, les films et la musique sont les plus consommés via l'abonnement : respectivement 22%, 10% et 9% des Français en profitent déjà, via un abonnement.
De manière générale, si les produits et services dématérialisés sont identifiés en priorité par les Français comme bien adaptés à ce nouveau mode de consommation, la tendance mise en relief par l'enquête dévoile une généralisation future de la consommation par abonnement à un large éventail de produits et services. Ainsi, 87% des français considèrent que ce modèle est adapté à la consommation de films, 74% de livres et produits culturels et 69% de musique. A l'avenir, l'ensemble des produits et services devrait être concerné : plus de la moitié des Français lui prédisent un bel avenir dans les domaines de l'automobile (69%), des services de voyage (58%), des téléphones portables (55%) et du matériel informatique (51%).


L'avenir passe par les services

Bien que le modèle de propriété reste encore dominant aujourd'hui en France, il n'est donc plus aussi dominateur. La consommation à l'usage s'impose comme un nouveau mode alternatif à la possession, car elle répond mieux aux attentes des consommateurs qui aspirent à une consommation libre, flexible et sans contrainte. Auchan a récemment lancé une offre par abonnement permettant à ses clients de se faire livrer leurs produits de première nécessité (hors frais) chaque mois (2). Cette offre permettra au distributeur de connaître davantage ses clients et de proposer par la suite des offres toujours plus proches des attentes de ses consommateurs. Amazon réfléchit au même type d'offre pour s'attaquer au marché alimentaire (3).

De nouveaux modèles économiques


Imaginez maintenant souscrire à un service dans votre automobile connectée (4) qui prendra rendez-vous chez le garagiste dès l'instant où vos plaquettes de freins auront atteint un point d'usure déterminé. Imaginez pouvoir vous désabonner temporairement de votre journal pendant vos vacances comme c'est déjà le cas chez The Times, et lire du contenu personnalisé et enrichi grâce à une analyse fine de vos goûts. Imaginez conduire une berline la semaine, louer un cabriolet le vendredi soir et la changer contre un monospace le weekend, et ce, grâce à un même et unique service, sans formalité à n'en plus finir...
Cette évolution ouvre d'innombrables perspectives aux entreprises. Elle offre l'opportunité d'imaginer de nouveaux modèles économiques, de relancer la consommation et de créer de nouvelles sources de revenus, tout en fidélisant leur clientèle à travers des engagements récurrents. Dans ce nouveau monde connecté, où la possession n'est plus de modèle dominant, c'est la notion de service qui devient essentielle. Et c'est bien là que résident les enjeux liés à la transformation numérique des entreprises.

________________________________________
[1] https://www.ifop.com/media/poll/2711-1-annexe_file.pdf
[2] https://altaviawatch.com/activation-commerciale/auchan-teste-les-courses-abonnement/
[3] https://www.amazon.com/gp/subscribe-and-save/details/
[4] https://lexpansion.lexpress.fr/entreprises/l-auto-connectee-trace-sa-route_1594968.html

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Commentaires 8
à écrit le 03/03/2015 à 8:33
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de vous rappeler, cher moutonsommateurs, que dans cette nouvelle économie vous troquez votre capital contre le paiement d'une rente... ce qui favorise le capital de connivence, votre perte de liberté financière et votre asservissement. Mais qu'import...

à écrit le 03/03/2015 à 6:34
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Ce système à la consommation revient en fait au même: c'est de l'achat à plusieurs. En général dans ce type d'achat le produit est vendu plusieurs fois son prix !

à écrit le 02/03/2015 à 21:44
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Si la possession d'objets est remplacée par un service, pas besoin d être bien malin pour déterminer que la consommation et les revenus des constructeurs-fabricants-commerçants vont chuter, on l'a bien vu avec la musique. ce qui rend ces services att...

à écrit le 02/03/2015 à 14:58
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Soyons à la pointe de la nouvelle modernité avec l'économie de la fonctionnalité. On vend des photocopies au lieu de vendre des photocopieuses. On vend des km parcourus au lieu de vendre des pneus. On vend de litres d'eau filtrée de son robinet...

le 03/03/2015 à 8:35
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cela permettra d'imposer l'internet des objets et notre perte totale d'autonomie et de de vie privée...

à écrit le 02/03/2015 à 13:21
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Pour l'anecdote: en Russie, au restaurant, ils pèsent l'assiette et vous payez en fonction du plat et du poids. Pour le pain, c'est un supplément en fonction du nombre de tranches. L'alcool est aussi selon. Pourquoi pas, mais c'est la mort annoncée d...

le 02/03/2015 à 13:39
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Effectivement, il y a ce qui est produit et la satisfaction qu'on en retire. Cette satisfaction nécessite une reconnaissance qui correspond à un pourboire. C'est ce qui correspondrait à une fiscalité basée sur la consommation: TVA ou fiscalité énergé...

à écrit le 02/03/2015 à 13:12
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Cela correspond au fait qu'on taxe surtout la production (le travail et l'outillage) et moins la consommation (la nourriture, l'énergie). Il faut basculer la fiscalité du travail et du capital sur la fiscalité énergétique.

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