A quand une vraie loi pour le Grand Paris ?

Le projet de loi sur « l'aménagement métropolitain » va surtout renforcer les pouvoirs de l'Hôtel de Ville de Paris par rapport aux maires de secteur et permettre la fusion des quatre premiers arrondissements de Paris, sur des motifs essentiellement électoralistes. Une vraie loi est nécessaire. Par Alexandre Vesperini, Conseiller de Paris, Groupe Les Républicains, Conseiller métropolitain Grand Paris

Le projet de loi sur le statut de Paris aurait pu être au rendez-vous de l'histoire de la capitale, en donnant à cette dernière les pouvoirs et la dimension d'une grande métropole mondiale. Hélas, nous en sommes bien loin...Véritable fourre-tout mêlant dispositions indigestes et gestes politiciens, le texte adopté par l'Assemblée nationale illustre l'incapacité des différents régimes, depuis la Révolution française, à définir un cadre stable et pleinement démocratique pour Paris.

Victime de la méfiance du pouvoir central, Paris subit aussi l'incompréhension de certains élus de province, le poids des égoïsmes de certains barons locaux, à commencer par la maire de Paris, et pour finir, l'absence de vision, ou plutôt l'inappétence extraordinaire du président Hollande pour la région parisienne.

Marchandages d'appareil

Exigé par la maire de Paris dans le cadre d'un marchandage d'appareil dont seuls les socialistes ont le secret, ce projet de loi sur « l'aménagement métropolitain » va surtout renforcer les pouvoirs de l'Hôtel de Ville de Paris par rapport aux maires de secteur et permettre la fusion des quatre premiers arrondissements de Paris, sur des motifs essentiellement électoralistes. Mises à part quelques mesures de bon sens en direction de la sécurité des Parisiens et de l'attractivité touristique (recentrage de l'action de la préfecture de Police vers ses missions premières, création de clubs de jeux en lieu et place des anciens cercles de jeu...), cette loi reste donc insuffisante au regard de la compétition que se livrent les villes-monde, qui sont déjà nombreuses à s'être adaptées au fait métropolitain (Londres, Boston, Chicago, Berlin...).

Rendre la gouvernance de l'agglomération parisienne clairement démocratique

Ce virage entrepris ailleurs parmi les pays développés aurait pu l'être avec une grande loi stratégique, en améliorant le dialogue entre Paris et ses communes voisines et surtout, en rendant la gouvernance de l'agglomération parisienne clairement démocratique, lisible et efficace. Trop vite écartées, certaines mesures demeurent pourtant pertinentes, voire essentielles.

Avant tout, nous devons alléger le millefeuille de collectivités, qui s'empilent et s'opposent au lieu de se compléter intelligemment. Il est absurde de voir aujourd'hui sept strates territoriales intervenir entre le citoyen et l'Etat, lequel est déjà très présent (Préfecture de Police, Préfecture d'Ile-de-France, SNCF, RATP...). Certaines pistes de bon sens devraient ainsi être étudiées ou davantage suivies : revenir à trois niveaux collectivités répartis entre la commune, la métropole ainsi que les établissements territoriaux qui la composent et enfin la région.

Aux communes reviendraient les compétences du quotidien, dont certaines sont encore dévolues au département (action sociale) ; la métropole serait chargée de traiter les enjeux qui concernent la « zone dense » concentrée autour de Paris (habitat, urbanisme, grands axes de circulation et attractivité économique...) ; tournée vers l'accès au Grand Paris, la région pourrait quant à elle relever en priorité le défi des transports et des équilibres entre espaces ruraux et centres urbains, en développant notamment l'axe Seine comme les enjeux fluviaux. La réduction des acteurs publics locaux passe en réalité par une délimitation plus claire des missions de chacun d'entre eux, par une définition de compétences exclusives sur une période de 5 à 6 ans.

Gagner en lisibilité

Ensuite, la gouvernance du Grand Paris doit gagner en lisibilité. Aujourd'hui, le maire de Paris peut être élu en étant minoritaire en voix et battu dans son propre arrondissement ; les conseillers régionaux d'Ile-de-France sont élus au cours d'un des scrutins qui réunit le moins de votants en France métropolitaine ; quant à la désignation des membres de la métropole et des territoires, elle se déroule pour l'instant au sein des 131 conseils municipaux du Grand Paris, en attendant un mode de scrutin direct en 2020... En bref, le citoyen ne s'y retrouve tout simplement pas.

Pourquoi ne pas inscrire clairement l'élection des conseillers métropolitains au suffrage uninominal à un tour, le même jour que les élections municipales ? De la même manière, une réflexion sur le nombre des élus devrait se tenir pour réaliser des économies d'échelle mais plus encore, pour accélérer les prises de décision (exemple : diviser par deux le nombre d'élus aux conseils de Paris, de la métropole et de la région).

Si elle est indispensable à l'attractivité du Grand Paris, cette clarification institutionnelle ne peut naturellement pas être engagée aujourd'hui en raison de la très faible légitimité du pouvoir exécutif actuel. Gageons que les prochaines élections nationales sauront donner à la France un Gouvernement déterminé à enjamber les appréhensions locales, pour rebâtir les institutions du Grand Paris autour de collectivités moins nombreuses, plus démocratiques et efficacement tournées vers les citoyens et les investisseurs.

Alexandre Vesperini, Conseiller de Paris, Délégué auprès du Maire du 6ème
Conseiller métropolitain Grand Paris

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