Big Data et énergie : gare à la Big Désillusion !

Le Big Data peut-il réellement être un plus pour les entreprises du secteur de l'énergie? Oui, sous certaines conditions. Par Antoine Junqua, Directeur Energie Teradata France

Il y a encore 24 mois, voici à quoi ressemblait l'agenda de beaucoup de mes réunions de travail : une introduction sur les types de données à disposition des acteurs de l'énergie (Génération, Transport, Distribution et vente d'énergies) et les avantages qu'ils pouvaient tirer de cette mine d'informations. Ensuite, les types de fonctions analytiques utilisées par les précurseurs du big data dans ce secteur, ainsi que les avantages associés. En clair, une approche dédiée aux néophytes de la thématique du Big Data dans le secteur de l'énergie.

 L'enthousiasme de rigueur, mais...

Cette année, à l'occasion de l'évènement Smart Grid Paris 2015, force est de remarquer que les sujets : « Big Data et Smart Data », « Big Data pour l'analyse en temps réel », « Objets Connectés et Big Data » étaient quasi systématiquement abordés, associés au traitement analytique de la données, pour mieux servir les smartgrids et la smart energy.
Ainsi donc, l'heure de la ruée vers l'or du big data et des traitements analytiques associés a sonné pour le secteur de l'énergie!

Si l'enthousiasme est de rigueur à l'idée que ce secteur connu pour être très conservateur s'ouvre au big data, des précautions s'imposent néanmoins. Pour avoir travaillé ces dernières années avec ces acteurs de l'industrie de l'énergie ces dernières années, je ne suis pas du tout convaincu que toutes les offres de traitement analytiques des données se valent... D'autre part, les nouveaux acteurs du Big Data ont tout pour générer une certaine confusion dans ce secteur. Jusqu'à noyer des avantages tangibles dans une fumée marketing et échauder le secteur par rapport au traitement analytique des données ? Big Désillusion ? Voilà qui est fort possible.

Attention aux solutions conceptuelles

Reste à savoir comment séparer le bon grain de l'ivraie. Pour cela, deux idées clés :
1. Attention aux solutions conceptuelles. Certains assurent que leur outil de traitement analytique des données est tellement évolué qu'aucune organisation dans l'énergie n'utilise la plupart des fonctionnalités qui sont proposées. « Mais vous pourriez être les premiers », vous conseille-t-on. Ou encore : « Nous recherchons un organisme partenaire pour concevoir des fonctions de traitement analytiques qui assureront tous les avantages escomptés ».

Et dans la réalité ? Si personne n'utilise des fonctions analytiques, et que, d'ailleurs, personne ne souhaite le faire, autant s'interroger sur leur pertinence. Comment prouver que l'outil aura un impact financier positif sur les métiers utilisateurs (meilleure maintenance des réseaux de transport ou de distribution par exemple)? Lorsque vous évaluez une solution, exigez des exemples réels de réalisations menées chez vos pairs utilisateurs de l'outil évalué. Ceux qui proposent une solution pertinente ne peuvent se contenter d'en vanter les mérites sur PowerPoint, mais doivent mettre en avant des études de cas confirmant leurs allégations.

Se méfier du "plug and play"


2. Des solutions Plug and Play. Ça existe vraiment ? Oui... À en croire le discours de certains : « Nous disposons de LA solution à vos problèmes : installez-la, importez vos données... Et le tour est joué ».
Et dans la réalité ? le secteur de l'énergie évolue dans un cadre réglementé, concurrentiel ou non, et qui fonctionne de manière différente d'un pays à l'autre. Très complexe donc de proposer une solution standard à disposition de tous les clients. Et même si cela était possible, quel serait l'avantage ? Dans un contexte concurrentiel, l'objectif est de prendre une longueur d'avance sur le concurrent. Pas de l'imiter. Dans un contexte réglementé, il faut savoir répondre aux demandes du régulateur, investir efficacement pour la maintenance ou l'extension du réseau par exemple...
Il faut également penser au coût lié à la collecte et à l'intégration de données (à vrai dire, exécuter un traitement analytique est ce qui est le plus simple). Imaginez que vous ayez à gérer cette intégration pour chacun de vos outils d'analyse. Les coûts et les ressources nécessaires à ces opérations peuvent se révéler plus importants que les avantages escomptés.

Les conditions d'une solution gagnante


On dit souvent qu'aux USA un projet innovant (Big Data par exemple) est jugé d'abord sur ce qu'il peut rapporter alors qu'en France ce qu'il va coûter. C'est bien entendu caricatural, mais le propre de la caricature est de receler un fond de vérité.
Un industriel de l'énergie qui veut créer de la valeur avec l'analytique et le Big Data doit donc être à la fois ambitieux et pragmatique et se poser les bonnes questions :
1- Que gagneraient ses différents métiers à analyser le patrimoine de données (quelque soient leurs volumes, natures et origines) dont ils disposent déjà ? Et pour quels coûts ? (y compris les coûts liés à la collecte, la non-qualité de certaines données et leur intégration)
2- Quel(s) avantage(s) supplémentaire(s) auraient les métiers à ajouter aux données existantes de nouvelles données, et à analyser ce nouvel ensemble. Et pour quels coûts (y compris par exemple les investissements nécessaires pour instrumenter les objets non communicants existants et les rendre «bavards » et/ou ajouter de nouveaux objets communicants)
Le pragmatisme amène à considérer deux moyens (cumulables !) pour vérifier que le jeu du Big Data en vaut la chandelle:
-rencontrer et prendre exemple sur d'autres acteurs de la même industrie ou d'industries comparables qui l'auraient déjà fait. Dans l'énergie, elles ne sont pas encore si nombreuses.
-construire un scénario « comme si » on avait toutes les données actuelles et futures, les générer et tester le passage à l'échelle des solutions analytiques actuelles (et pas les promises). Et vérifier que la solution d'analyse Big Data répond bien aux besoins métiers d'aujourd'hui et de demain, avec l'agilité, la flexibilité et l'extensibilité nécessaires. Une solution fonctionnelle et agile sur le long terme pour l'énergie doit privilégier des plateformes analytiques flexibles, qui permettent d'utiliser et de réutiliser les données, à l'aide d'un traitement analytique répondant à vos données et besoins actuels, mais aussi capables de s'adapter à vos données et besoins futurs.

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Commentaire 1
à écrit le 24/08/2015 à 21:40
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Effectivement y a 15 ans est apparu le datamining en france Comme personne n y comprenait rien il a ete vendu plein de solutionsmiracle manipulables par des bac -2 Ca a ete un fiasco general On a droit a la redite avec le big data ( recrutement de...

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