Comprendre le financement de la protection sociale

La Tribune publie chaque jour des extraits issus des analyses diffusées sur Xerfi Canal. Aujourd'hui, comprendre le financement de la protection sociale

Le basculement des cotisations salariés maladie et chômage sur la CSG, constitue une mesure phare de la réforme fiscale portée par le gouvernement. Essayons de contextualiser cette réforme au regard du mode de financement actuel de la protection, sur la base de ce que l'on appelle les comptes de la protection sociale, dont la DREES établit un état exhaustif tous les ans, incorporant les régimes publics et privés, c'est-à-dire essentiellement les mutuelles. Sa dernière parution porte sur 2014.

Financement de la protection sociale = cotisations sociales + impôts

Abordons les choses de façon agrégée d'abord. La protection sociale mobilisait 730 milliards de ressources en 2014, c'est-à-dire 34,2% du PIB. Ces ressources, ce sont d'abord des cotisations sociales pour 61,7%, dont 42,5 points de cotisations patronales, le reste étant versé par les salariés et les indépendants. Ce sont ensuite pour 35,1% des impôts directement affectés ou reversés par l'État. Cette part est en nette augmentation depuis le début des années 1990. Ce sont enfin 3,2% de ressources diverses.

Les ressources provenant de l'impôt

Arrêtons-nous quelques instants sur le volet financement par l'impôt de la protection sociale, puisque c'est sur lui qu'agit la réforme proposée.

Il s'agit d'abord de la CSG, pour 98,9 milliards en 2017, dont 70% va sur la branche maladie, le reste étant ventilé sur la branche famille, le fond de solidarité vieillesse, et la caisse d'amortissement de la dette sociale (la CADES).

Il s'agit ensuite de la taxe sur les salaires pour 13,9 milliards, répartis sur les branches vieillesse, maladie et famille ; des droits d'accise sur le tabac, pour 11,8 milliards ; d'une portion de la TVA, pour 11,4 milliards qui sont affectés à la maladie ; de 7,1 milliards des CRDS fléchés sur la CADES ; de 5,7 milliards de prélèvement social qui va au fond de solidarité vieillesse ; de 5,2 milliards de forfait social et de 3,7 milliards de C3S qui vont à la vieillesse ; des taxes sur les boissons ; et d'une myriade d'autres petits prélèvements.

Le financement des branches par l'impôt dépend du risque couvert

Au total, cela aboutit à une part du financement par l'impôt très différenciée selon les branches et la nature du risque couvert. Le financement par l'impôt est maximal là où les prestations relèvent de la solidarité nationale. C'est le cas du fond de solidarité vieillesse, qui verse le minimum vieillesse.

Il est plus important pour les branches dont les prestations ne sont pas liées à une activité de la part des bénéficiaires, mais à leur simple résidence sur le territoire : c'est le cas de la santé et de la famille notamment.

Cette part est faible ou nulle dans les branches qui couvrent un risque spécifique et individuel, adossé à une activité (les accidents du travail, le chômage hors ASS, ou la retraite).

A travers son mode de financement, le système français reste donc attaché à sa logique assurantielle contributive.

Un mouvement long de fiscalisation de la protection sociale

C'est dans ce contexte qu'il faut restituer la réforme du financement de la protection sociale proposée par le gouvernement. Le basculement du financement sur la CSG, qui porte sur un montant de 22 milliards d'euros, pourrait porter la part de l'impôt à 38% du financement, contre 35% aujourd'hui.

Ce n'est pas en soi une révolution : ce basculement ne fait que poursuivre un mouvement long de fiscalisation de la protection sociale déjà largement amorcé. Son ampleur peut paraître importante sur longue période. La France n'en reste pas moins encore en bas de l'échelle européenne en termes de fiscalisation. Bien loin de l'Europe du Nord ou du Royaume-Uni.

Basculer le financement de l'assurance chômage sur l'impôt,
c'est s'attaquer au principe assurantiel

Là où la réforme comporte une véritable portée symbolique, c'est qu'elle propose d'étendre le financement par l'impôt au chômage. C'est là que le bât blesse. Car ce faisant, on dépasse la simple réforme de financement. On s'attaque au principe assurantiel de l'assurance chômage.

Une façon d'amorcer sans doute une reprise en main plus drastique du système, passant par la remise en cause de la gestion paritaire, et ouvrant la possibilité de déconnecter l'indemnisation du revenu.

>> Plus de vidéos sur le site Xerfi Canal, le médiateur du monde économique

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Commentaires 3
à écrit le 15/06/2017 à 10:10
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J'appelle cette réformette du "rafistolage" en fait en France on est incapable de baisser les prélèvements obligatoires à plus de 45% du PIB, car on ne veut pas s'attaquer à baisser la dépense publique laquelle comprend les prestations sociales, les ...

à écrit le 14/06/2017 à 13:19
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Les cotisations sociales (chomage et retraites) doivent être réparties sur les entreprises (la production) et sur la consommation, et plus particulièrement sur la consommation d'énergie. Le travail et l'énergie, c'est la même chose, le travail concer...

à écrit le 14/06/2017 à 9:06
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Article intéressant, merci.

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