Digital : sommes-nous prêts à connecter nos corps ?

De plus en plus, pour des raisons médicales ou de confort, les objets connectés vont mettre en jeu notre corps. Jusqu'où? par Maxime Renaudin, Consultant UX Razorfish (ex Nurun)

Les nouvelles technologies répondent à un besoin d'automatisation et de performance, qui a rapidement débordé du seul monde du travail et de l'industrie : elles ont investi nos maisons, nos voitures et notre vie de tous les jours. À tel point qu'aujourd'hui, cette automatisation touche même nos relations sociales. Lorsque Facebook nous rappelle l'anniversaire de notre belle-sœur, quand nos smartphones nous proposent d'envoyer des messages pré-enregistrés ou lorsque Google nous permet de tout savoir tout le temps... toutes nos relations sociales sont imprégnées par cette technologie omniprésente.

Raisons médicales ou confort

Mais elle s'empare aussi d'un autre aspect encore plus intime de nos vies : le corps. Que ce soit pour des raisons médicales ou simplement pour des raisons de confort, les outils technologiques et digitaux corporels sont déjà visibles dans nos quotidiens. De la smartwatch d'Apple aux pacemakers, ils comblent une déficience permanente ou passagère, ou contribuent à l'augmentation de nos capacités physiques, par la mesure et l'amélioration de nos performances.
Ceux qui aiment à se faire appeler « cyborgs » ou « bio-hackers » modifient leurs corps comme les hackers modifiaient les premiers ordinateurs il y a 40 ans. Ils s'implantent des aimants, des puces RFID et autres dispositifs miniaturisés dans l'unique but d'augmenter leurs capacités physiques. Le corps devient l'interface la plus directe entre eux et leur environnement.

Une pilule mot de passe

Le smartphone, nouveau régulateur de nos relations sociales est un des premiers relais de cet usage de la technologie intracorporelle. Imaginez déverrouiller ou protéger les données de votre smartphone par l'unique fait de le tenir dans votre main. Dans ce but, Motorola a développé une pilule connectée : la Proteus Digital Health. Après ingestion par l'utilisateur, le corps agit comme un mot de passe permettant à distance de verrouiller ou de déverrouiller son smartphone. La pilule contient un microprocesseur alimenté en énergie par les acides de l'estomac et agit comme un token d'authentification.

La question des usages reste centrale

Que les nouvelles technologies ouvrent la voie à des profondes modifications de nos rapports au corps, c'est indéniable. La tendance du quantified-self pourrait bientôt se prolonger par le modified-self. Mais la question des usages reste centrale pour anticiper le succès de tel dispositif et l'échec de tel autre. L'utilité théorique avérée est souvent contrebalancée par la réalité de la pratique et par les modalités d'adoption des utilisateurs. Une nouvelle technologie ne saurait être utile qu'en situation. Imaginons par exemple des systèmes permettant de mesurer en temps réel notre taux de cholestérol, via une application mobile. L'utilité apparait ici clairement. Ce type d'information offrirait la possibilité d'ajuster nos habitudes alimentaires pour une vie plus saine.
Mais en pratique, sommes-nous réellement prêts à vivre en permanence avec la menace d'une alerte positive ou négative sur notre santé artérielle ? Au fond, voulons-nous vraiment tout savoir sur ce qui se passe en temps réel dans notre corps ? Ou est-ce que l'ignorance ne reste-t-elle pas, sur ces questions, une stratégie plus confortable qui pourrait nous éloigner durablement d'outils de mesure trop angoissants ?
Évaluer l'utilité d'une innovation technologique c'est explorer in situ les leviers pratiques, sociaux et psychologiques de chaque individu, qui en déterminent l'adoption ou le rejet. En somme, il faut aller à la rencontre des gens, être à l'écoute de leurs besoins et de leurs affects pour designer les meilleures solutions technologiques. Celles qu'ils utiliseront vraiment.


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Commentaire 1
à écrit le 20/03/2015 à 23:07
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J'avais comme l'impression, idiote sans doute, que c'était déjà le cas, non? Quant aux objets connectés, là encore au risque de décevoir, je leur demande de simplement faire ce pourquoi ils existent et ne viennent pas mettre le...

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