Insecticides : les dégâts du principe de précaution

Le principe de précaution poursuit inexorablement sa route : c'est le cas avec les néonicotinoïdes, ces insecticides d'un type nouveau qui ont été interdits au nom de la préservation des abeilles. Alors même que rien ne prouve qu'ils sont à l'origine de leur destruction. Par Cécile Philippe, Institut économique Molinari

Aujourd'hui, le principe de précaution est omniprésent. Il est devenu une sorte de « passe-partout » universel pour les politiques souhaitant interdire n'importe quel produit. Après l'interdiction des OGM, puis celle du BPA, la France veut maintenant interdire l'ensemble des insecticides de la famille des néonicotinoïdes.
Ainsi, l'Assemblée nationale a voté, en début d'année et dans le cadre du projet de loi sur la biodiversité, l'interdiction à compter de janvier 2016 des produits phytosanitaires de cette famille d'insecticides, accusés de nuire aux abeilles. Le projet de loi va maintenant être examiné au Sénat fin juin.

Effets indésirables?

Le discours militant entourant cette question se focalise sur les éventuels effets indésirables de ces produits sans chercher à savoir s'ils se révèlent plus efficaces et moins nocifs que leurs prédécesseurs. L'opinion publique, quant à elle, travaillée par cet activisme anti-progrès technologique et son attachement aux abeilles, a plutôt tendance à soutenir cette interdiction. Au mieux, elle ne voit pas pourquoi il faudrait la combattre activement.

Un stresse biotique...

À notre époque, le citadin moyen n'a plus la moindre notion de ce qu'est le stress biotique et abiotique. Le premier résulte de l'exposition du champ à divers ravageurs : animaux nuisibles (insectes, acariens, nématodes, rongeurs, limaces et escargots, oiseaux...), organismes phytopathogènes (virus, bactéries, champignons, chromistes...) et plantes dites adventices (plus connues sous le nom de « mauvaises herbes », végétaux indésirables ponctionnant les ressources vitales des cultivars). Le second type de stress est lié aux sécheresses, inondations et gelées, au manque de certains nutriments ou encore à la toxicité des sols ou de l'air.

...qui provoque de lourdes pertes agricoles

Un rapport de 2009 estimait à près de 131 milliards de dollars les pertes agricoles mondiales dues au stress biotique, dont 95 milliards de dollars pour les seules mauvaises herbes, et 70% dans les pays en développement. Les sources de stress abiotique expliquaient, pour leur part, entre 6% et 20% des pertes agricoles.
C'est pourquoi, de tout temps, les agriculteurs se sont efforcés de protéger la récolte au moyen de diverses pratiques et techniques innovantes relevant de la chimie (engrais et pesticides), de la biotechnologie (sélection, croisements d'amélioration) ou de la gestion (rotation des cultures, gestion intégrée des parasites, calendrier et logistique agricoles).
Évidemment, aucune innovation scientifique ne peut prétendre à la perfection. De fait, la question devrait seulement être de savoir si elle engendre effectivement une situation moins problématique que celle qui l'a précédée. C'est à ce genre de question qu'il faudrait pouvoir répondre au sujet des néonicotinoïdes.

L'interdiction, une solution naïve apportée à un problème complexe

Car ne nous y trompons pas, leur interdiction ne créera pas un monde meilleur, tout simplement parce qu'elle applique une solution naïve à un problème complexe. Elle ne fera effectivement pas disparaître le stress que subissent les récoltes, ni le besoin des individus de se nourrir. Par conséquent, elle ne fera pas non plus disparaître la nécessité de recourir à des agents protecteurs des récoltes.
En bout de ligne, l'interdiction de ces insecticides - principalement accusés de nuire aux abeilles (dont le problème de mortalité semble pourtant être multi-variable) - va conduire les agriculteurs à les remplacer par des produits a priori moins performants puisqu'ils les avaient justement remplacés. Or justement, il semblerait bien que ces néonicotinoïdes - aussi peu attrayants qu'ils apparaissent - présentent bien des avantages.

Des produits plus sûrs pour les humains


Tout d'abord, comme l'explique le chercheur Henry I. Miller, ces produits sont beaucoup plus sûrs pour les humains et les autres vertébrés que les générations de pesticides qui les précèdent, tels que les carbamates ou les organophosphorés.
Ensuite, ils seraient plus sélectifs dans leur mode d'action que leurs prédécesseurs. « Utilisé comme moyen de traiter les semences ou appliqué au niveau des racines, le pesticide est assimilé par la plante et devient plus dilué au fur et à mesure que la plante grandit, de sorte que les concentrations sont plus faibles dans les fleurs et les fruits des plantes. De loin, on trouve les plus fortes concentrations de néonicotinoïdes dans les tiges et dans les feuilles - là où les insectes nuisibles pour les plantes se nourrissent le plus souvent - et non pas dans les fleurs que les pollinisateurs butinent.

L'idée que la perfection est de ce monde

Du coup, surtout au moment où les jeunes plants sont les plus vulnérables, les néonicotinoïdes leur permettent de contrôler uniquement les insectes qui s'en nourrissent. C'est un progrès notable par rapport à d'autres pesticides qui tuent les insectes de façon indiscriminée. »
Enfin, un seul traitement des semences suffirait, avec parfois une pulvérisation supplémentaire pour toute la saison, là où avec d'autres produits, il faut multiplier les pulvérisations tout au long de la saison.
Ces améliorations peuvent peut-être sembler négligeables mais c'est pourtant comme cela que les choses progressent, par un processus d'essais et d'erreurs auquel l'application du principe de précaution met un coup d'arrêt brutal.

Fondé sur le risque zéro (autrement dit, l'idée que la perfection est de ce monde) et n'ayant que l'apparence du bon sens, il interdit de facto l'émergence de modes d'action meilleurs ou moins nocifs, en particulier l'application de la chimie et de la biotechnologie aux systèmes agricoles.
Il est important que l'opinion publique comprenne que ces interdictions ne sont pas la solution aux problèmes que nous devons résoudre au quotidien. De cette façon, les politiques auront sans doute une incitation puissante à en faire usage avec modération et à en comprendre les effets pervers.

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Commentaires 30
à écrit le 24/06/2015 à 6:44
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Ou comment nous prendre pour des imbéciles mal informés ! Il n’y a aucune limite a la manipulation et au lobbying. Ceux qui defendent une societe plus respectueuse de leur environnement n’ont pas les moyens de se payer ce genre de services...

à écrit le 17/06/2015 à 10:09
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Institut Molinari ? Rappelez-moi. Un groupe de scientifiques reconnnu ou un lobby ultra-libéral ?

à écrit le 16/06/2015 à 22:05
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Tout à fait d'accord que la perfection n'est pas de ce monde, vous en êtes la preuve vivante Madame !

à écrit le 16/06/2015 à 18:24
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Du bon sens et de l'information sérieuse, à l'opposé de l'obscurantisme écologiste politiquement correct. Bravo !

à écrit le 16/06/2015 à 12:28
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Il est dommage que le "principe de précaution" ne s'applique pas à la bêtise (je reste poli) des hommes et femmes politiques.

à écrit le 16/06/2015 à 11:20
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Nous sommes tout à fait d'accord qu'il y a des excès dans le principe de précaution. Néanmoins, il serait bon de le remplacer par le principe de responsabilité qui voudrait qu'en cas de dégâts avérés, le responsable paye financièrement et aille en pr...

à écrit le 16/06/2015 à 11:07
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l' institutmolinari.org lutte contre le paquet de cigarettes neutre, contre la neutralité de l'internet, pour la diffusion des ogm et l'usage des pesticides, pour l'usage du bisphénol et autres perturbateurs endocrinien. On dirais Claude Allegre en ...

à écrit le 16/06/2015 à 10:34
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Quand on est "expert" et qu'on classe la limace en nuisible alors même qu'elle est le lien indispensable avec l'humus et les fameux mycorhizes, qu'on fait la chasse aux adventices sans même en connaître ni leur rôle ni le lien qu'elles entretiennent ...

à écrit le 16/06/2015 à 9:06
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Encore un effort, et elle va nous dire que les produits chimiques, c'est bon pour la santé. 5 produits chimiques par jour, autant que les fruits et légumes.... Je me demande si on n'en ingurgite pas déjà beaucoup plus...Bel exemple de désinformatio...

à écrit le 16/06/2015 à 8:15
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Je suppose que l institut ou travaille cette brave dame est genereusement sopnsoirise par les fabriquants des fameux pesticides. Ce qui ne veut pas dire qu elle a tort mais l honnetete serait de le dire. Sur le fond, nous produisons deja trop de nou...

à écrit le 15/06/2015 à 21:59
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Les tueurs d'abeilles ; ---Le véroa ---Le frelon asiatique ---Aethina tumida (coléoptere ) ---Des virus ---Perte de fleurs a butiner (avec temoignages de nombreux apiculteurs ) ---Pesticides (et pas que les néonicotinoides ) ---Dereglement ...

à écrit le 15/06/2015 à 21:17
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Très bon article. On apprend des choses ici pour une fois, dans un pays où l'obscurantisme rejaillit comme au moyen âge.

le 16/06/2015 à 1:42
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Vous n'apprenez habituellement rien sur la tribune et avalez la propagande de cet article! Le moyen age de la réflexion...

à écrit le 15/06/2015 à 20:43
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Juste un rappel on est champion des pesticides et aussi champion du cancer Aucun rapport ??? Regarder tous les rapports de vrai spécialistes et ils disent que c'est une évidence sur canal plus il y a eu une très bonne émission investigation la des...

à écrit le 15/06/2015 à 20:10
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PLANETE TERRE : LES DEGATS DES PENSEURS DE BRUXELLES. On aura un début de solution le jour où l'on empêchera les gens qui n'ont jamais vu une plante ou une abeille s'exprimer sur des sujets où ils n'ont aucune compétence et où ils sont encore plus ...

à écrit le 15/06/2015 à 19:43
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Lu sur wikipedia: Institut économique Molinari C'est un organisme de recherche et d'éducation qui se donne pour mission d'influencer les parlementaires, les journalistes et les faiseurs d'opinion dans le but de favoriser une politique économique lib...

à écrit le 15/06/2015 à 17:50
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Ok, c'est la rubrique opinion, mais là ça touche le fond. Des affirmations à la limite du comique, des sources totalement absentes, des enchainements logiques pauvres... Je crois que cet article est de la pure manipulation et va à l'encontre d...

à écrit le 15/06/2015 à 17:03
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du grand n'importe quoi, on croit rêver.... y a en qui fument trop.

à écrit le 15/06/2015 à 16:51
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Cet article est effarent de naïveté et de mensonges; a tel point que je me demande s'il n'a pas été écrit purement et simplement par les lobbies!

à écrit le 15/06/2015 à 16:39
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et son institut est financé par qui ? Monsanto ? Bayer ? Aventis ?.... les 3 peut etre

à écrit le 15/06/2015 à 16:36
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les abeilles ont des durées de vies courtes, souvent 3 ans parfois moins. les apiculteurs achètent les reines auprès d'éleveurs fréquemment Italiens. les apiculteurs choisissent une génétique sur plusieurs critères de performances tels couleur de tra...

à écrit le 15/06/2015 à 16:35
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L'Institut Molinari, c'est le titre d'un roman de Kafka revisité par Orwell. Bien sûr que le principe de précaution est la cause de tous nos maux, d'ailleurs je bois du Round up tous les matins et je ne m'en porte pas plus mal, je suis entouré d'abei...

à écrit le 15/06/2015 à 16:25
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Le principe de précaution protège le "collectif" face aux erreurs des intérêts privés!

le 15/06/2015 à 16:39
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@Bah on pourrait aussi dire que le principe de précaution vise à faire paniquer "le collectif" au profit d'intérêts privés!

le 15/06/2015 à 17:08
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Le principe de précaution c est l arme des faibles et des peureux !!!Aurions nous découvert la pénicilline ,le vaccin de la rage ,la radio activité etc !!!si à l époque le principe de précaution avait été inscrit dans la constitution????

à écrit le 15/06/2015 à 16:19
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Désolé chère Madame mais votre argumentation ne tient pas. Les "carbamates ou les organophosphorés" nous ont été vendus comme des produits miracles et nous en connaissons aujourd'hui les effets. D'ailleurs nulle part vous n'évoquez la problématique d...

à écrit le 15/06/2015 à 16:17
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Passez moi la colonne débit du journal du compte banque du dit Institut Molinari

à écrit le 15/06/2015 à 16:04
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A pleurer. Le pb du monde serait le pcpe de precaution. De qui se moque t-on? Le climat, la bio diversite et j'en passé tout ceci serait le fruit de trop de precaution. Le pb c'est une precaution pas suffisament efficace. Une precaution incapable d'i...

à écrit le 15/06/2015 à 16:02
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Le point de départ est l'INDIGNATION populaire, mais celle-ci n'a nul besoin de réflexion pour s'amorcer...

le 16/06/2015 à 9:55
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bien vrai ! mais la réflexion est bien le principe de base des sociétés petro chimiques, axée sur le "gagner toujours plus " sans se préoccuper des conséquences sur la nature et l'être humain ! donc le principe de précaution est indispensable et l'on...

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