L'affaire Volkswagen : un épiphénomène révélateur de l'impasse allemande

La Tribune publie chaque jour des extraits issus des analyses diffusées sur Xerfi Canal. Aujourd'hui: l'affaire Volkswagen, un épiphénomène révélateur de l'impasse allemande !
Olivier Passet, directeur des synthèses économiques de Xerfi. / DR

Il y a quelques mois, j'avais évoqué le revers de la médaille que pouvait constituer pour l'Allemagne son hyper-domination industrielle, et notamment l'ampleur des risques auxquels étaient confrontés les géants industriels aux pieds d'argile : risques de perte de contrôle, de déclassement brutal des modèles d'affaires ou des technologies, risque réputationnel etc. L'affaire Volkswagen en est une illustration, mais elle nous détourne sans doute du cœur du problème.

Car ce séisme médiatique n'est probablement qu'un épiphénomène au regard de l'ampleur des défis auxquels est confrontée cette industrie emblématique de la seconde révolution industrielle, industrie structurante, que l'on pourrait qualifier d'industrie des industries tant elle a eu une emprise, sur  les choix énergétiques, le design des infrastructures, et toute une série d'usages qui modèlent notre consommation.

Une fissure inattendue

La fissure n'est certes pas apparue là où on l'attendait. Mais elle n'est sans doute pas un pur accident de l'histoire. Rappelons d'abord que l'automobile représente 17% des exportations allemandes, et le vrai risque auquel est confrontée l'Allemagne, qui a fait de cette industrie du siècle passé l'un des pivots de sa puissance industrielle, c'est celui du bouleversement de son modèle d'affaire.

C'est celui de son adaptation à un nouveau paradigme de la mobilité en lien avec les contraintes de la transition énergétique et avec l'irruption des nouveaux géants de l'information. Et c'est bien sur ce défi que les acteurs du secteur braquent leur attention depuis plusieurs années. Le risque que les Google ou Apple deviennent les véritables pivots de l'écosystème automobile, et réduisent les constructeurs en simples sous-traitants.

Le risque surtout que la révolution qui se dessine en matière de mobilité, bouleverse totalement l'acte d'achat automobile. Que l'on bascule dans une logique de parc, géré par les réseaux d'information, et que l'automobile, avec tout ce qu'elle véhicule de valeur symbolique, de marqueur social, devienne un objet banalisé. Une évolution aux antipodes du positionnement allemand.

D'autres défis redoutables pour l'industrie allemande

S'adapter aux changements de normes qu'impose la transition énergétique relancer ensuite les débouchés sur les marchés développés avec le ralentissement des émergents, encaisser enfin la convergence des coûts salariaux dans régions de sous-traitance Est européennes.

Or comme dans d'autres domaines, l'obsession de la performance allemande est moins mue par un désir de leadership que par la sourde inquiétude que son modèle a mangé son pain blanc et doit s'armer pour préparer des lendemains qui déchantent. Face à cette incertitude, elle  a recherché la parade en renforçant sa domination du marché, en partant à la conquête effrénée des marchés émergents et en modérant ses salaires. Une fuite en avant entièrement concentrée vers la survie du modèle ancien.

Un course à la taille non maîtrisée

Elle met notamment en lumière la vulnérabilité de ce que l'on considérait être un point fort de la stratégie allemande : son ancrage territorial et sa forte polarisation décisionnelle sont aussi facteur de concentration des risques. Elle souligne aussi la difficulté de jouer sur deux tableaux, celui de la qualité et celui de la modération des salaires.

La triche Volkswagen peut sembler étrangère à tout cela, mais elle peut être perçue aussi comme le type d'erreur insensée que l'on commet lorsque l'on est acculé. Et dans un pays qui a fait de l'exportation l'alpha et l'omega de sa stratégie de long terme, qui justifie ses écarts de prix par la réputation de ses marques, et qui a fait surtout du « made in germany », un actif immatériel clé, l'onde de choc est puissante.

Xaviel Niel a défini récemment ce qu'était son modèle de réussite : low price et high cost... pointant ce qu'était la clé du succès industriel d'aujourd'hui. Or c'est précisément tout l'inverse que fait l'industrie allemande. High price et low cost. Et c'est peut-être là que se situe la vraie impasse allemande.

>> Plus de vidéos sur le site Xerfi Canal, le médiateur du monde économique

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Commentaires 8
à écrit le 06/10/2015 à 0:42
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On ferait mieux de parler de l'impasse française. Que dis-je ! Sa débâcle ! Mais question arrogance, la France grotesque n'est pas en reste. Critiquer ainsi le succès allemand est indécent de la part d'un pays comme la France.

à écrit le 05/10/2015 à 19:52
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L' impasse est réelle quand ce matin les ingés VW avouent "en 2008 nous ne pouvions pas faire un moteur qui respecte les normes", ce qui a conduit à cette tricherie pendant 7 ans, et après ils se sont reposés ?? Et l' ADAC qui a truqué les élections ...

à écrit le 05/10/2015 à 18:52
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Nous savions tous que le modèle VW était à l'agonie, les marges de toutes ses marques en repli sensible, une incapacité à développer de nouvelles technologies efficientes et non pas pipeautées, le tout assorti d' une fuite en avant au quotidien... L...

à écrit le 05/10/2015 à 13:23
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Arrêtez le Ricard et la moquette Il faudrait donc etre petit ,faible ,mal organisé pour etre pret au changement Mort de rires

à écrit le 05/10/2015 à 12:12
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N'importe quoi cet article. Comment parler d'impasse du modèle allemand quand on voit ce sont les constructeurs qui ont les plus grosses croissances de ventes avec les meilleures marges de rentabilité? Si l'auteur disait vrai, que le marché devait s...

le 05/10/2015 à 15:48
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La marge OP de PSA est de 5% en phase de guérison celles des autres de 7% à 10 % celle de VW a 2.5%. Vous devriez lire la Tribune. La triche de VW est à la fois une cause et un effet. Cause : Être en retard technologique. Effet : Faire de la c...

le 05/10/2015 à 15:50
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"Quand les riches ont le Cancer Les pauvres regardent le corbillard passer". Époque TANG IXÉME siècle.

le 05/10/2015 à 20:22
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Comment voulez-vous qu'ils puissent faire face à 50 milliards de pénalités quand ils disposent de 20...???

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