La face cachée de la révolution digitale

Alors que la vague numérique modifie en profondeur les usages des consommateurs et transforme les business-models, les outils digitaux opèrent une autre révolution moins visible mais cruciale. Appliqués aux processus des entreprises, ils libèrent la productivité tant attendue de l'informatique. Déployés au coeur des organisations, ils offrent une alternative au modèle à bout de souffle du taylorisme. Par Elsy Boglioli et Vanessa Lyon, directrices associées du Boston Consulting Group

« On voit des ordinateurs partout sauf dans les statistiques de productivité ». Ce paradoxe dit de Solow peut aujourd'hui être résolu. L'Américain, Prix Nobel d'économie en 1987, avait mis en lumière le faible impact de l'informatique sur la productivité alors même que les entreprises investissaient massivement pour s'équiper. Un véritable casse-tête pour les économistes. En France, selon le Crédoc, 55% des employés du secteur privé disposaient d'un ordinateur en 2013 (contre 45% en 2008) et la productivité ne décolle toujours pas.

 40 indicateurs de performance contre 5 au plus en 1955

Pourquoi ce progrès technique majeur apporté par les technologies de l'information ne tiendrait-il pas ses promesses de croissance ? Pourquoi ce formidable gisement de productivité ne s'est-il pas ouvert dans le sillage de cette nouvelle révolution industrielle ? Nous sommes convaincus que la complexité exponentielle des grandes organisations bloque la productivité.

Elle reste prisonnière des multiples procédures, règles, outils de contrôle et de reporting créés au fil du temps par des entreprises engagées dans une course à la taille, confrontées aux enjeux de la mondialisation mais aussi, comble du paradoxe, à l'intégration de systèmes d'information de plus en plus sophistiqués. Ce phénomène s'est emballé. Les dirigeants doivent aujourd'hui piloter jusqu'à 40 indicateurs de performance contre 5 au plus en 1955 !

Un millefeuille contenant d'autres millefeuille...

Très vite, les entreprises, prises dans un cercle vicieux, ajoutent de nouveaux process pour faire face à la complexité. Ce millefeuille contenant d'autres millefeuilles ralentit les prises de décisions, consomme les ressources et les énergies disponibles, entrave les échanges d'informations, brise la créativité et engendre de la frustration. Face à un management occupé à gérer la complexité, les salariés adhèrent de moins en moins au contrat social proposé par l'entreprise.

En 2014, 51% des employés américains sont désengagés dont 17% le sont "activement", quitte à agir contre l'intérêt de leur employeur*. En apportant au fonctionnement des entreprises la connectivité, l'interactivité et la puissance d'analyse des données, le digital promet des gains de productivité à la hauteur des grandes révolutions industrielles. Toutefois, pour donner toute sa mesure, la révolution numérique a besoin de nouveaux modèles organisationnels.

Les outils digitaux libèrent la productivité

Dans les usines 4.0, les machines « intelligentes » dotées de capteurs, connectées entre elles via Internet, assurent elles-mêmes leur maintenance et adaptent d'elles-mêmes leurs tâches dans un souci d'efficacité maximum. Nous estimons à 150 milliards de dollars les gains de productivité qui seront ainsi générés en Allemagne dans les 5 à 10 ans. Cette nouvelle étape de l'automatisation sert également l'innovation en réduisant les coûts de la R&D. Ainsi, Ford a investi 15 millions de dollars pour expérimenter un système intégré capable de modéliser et de tester de nouveaux produits avant de fabriquer un prototype. Cette « digitalisation » du processus d'innovation pourrait faire économiser jusqu'à 120 millions de dollars à la firme de Détroit*. Dans ces usines numériques, les ordinateurs sont partout y compris, enfin, dans les chiffres de la productivité.


Les outils digitaux transforment les modèles organisationnels

Dans la plupart des cas, il faut pro-activement aller chercher la productivité quand elle est prisonnière des organisations complexes. Dans un grand groupe international, chaque entité opérationnelle et chaque filiale a développé ses propres outils informatiques de reporting. A rassembler, harmoniser et consolider les chiffres dispersés et traités de façon différente dans ces multiples unités, on voit bien où se perd la productivité. Il n'est pas rare qu'une équipe de 5 à 15 personnes y soit dédiée alors même que les marchés exigent plus que jamais de la réactivité.

La mise en place d'une plateforme digitale rendra accessible les données en temps réel et permettra de partager les mêmes outils d'analyse. Appliqué à une stratégie commerciale européenne, ce travail en mode collaboratif via une plateforme digitale rassemble autour du projet de lancement d'un produit les patrons des différentes business-units, les équipes du contrôle de gestion, du marketing et les forces de ventes. Cette coopération permet de raccourcir et d'optimiser l'opération commerciale en ajustant au plus près les actions aux besoins du marché tout en respectant les budgets.

Le numérique dessine un nouveau monde

Dans les services de maintenance, les outils digitaux utilisés par les techniciens et partagés par les directions commerciales accélèrent la prise en compte des demandes des clients mais surtout contiennent une mine d'informations susceptibles d'inspirer de nouveaux services innovants répondant aux usages des clients. Enfin, cette nouvelle façon de travailler en mode collaboratif favorise l'autonomie, encourage les échanges d'idées et la créativité de collaborateurs mieux impliqués et donc mieux engagés.

L'utilisation des outils digitaux interroge donc un modèle inadapté né de la révolution industrielle et offre aujourd'hui aux entreprises les moyens de créer une organisation plus agile, seule capable de libérer la productivité. Le numérique dessine en effet un nouveau monde qui repose sur 6 règles, en rupture avec les anciens paradigmes du Taylorisme. Ces « Smart Rules » * décloisonnent les organisations, ouvrent l'information à tous, favorisent la coopération et la création de communautés d'intérêt et accroît le pouvoir en le partageant. Dans cet environnement, chaque entreprise devra inventer son propre modèle dans le respect de ses valeurs, de son histoire et de ses enjeux business. Ne nous y trompons pas, il s'agit d'une remise en question au plus haut niveau de la culture du management, du rôle du collaborateur et du rapport au travail. Mais c'est là que commence la véritable révolution digitale.

Elsy Boglioli et Vanessa Lyon, directrices associées du Boston Consulting Group

* Y. Morieux, P. Tollman, Smart Simplicity, Six règles pour gérer la complexité sans devenir compliqué, Les Belles Lettres, 2014

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Commentaires 4
à écrit le 08/09/2015 à 18:45
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C'est quoi ce blabla ? Article qui démontre que ceux qui ne sont pas techniciens ne devraient pas parler d'un sujet...sauf pour du blabla...

à écrit le 03/09/2015 à 20:52
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je préfère entendre des techniciens, des informaticiens ou encore des roboticiens, etc... sur ce genre de sujet merci on vous avez déjà expliqué tout ça gratuitement depuis presque deux décennies merci de ne pas faire d'argent; nous postons gratuite...

à écrit le 03/09/2015 à 19:42
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Et bien... vous êtes pas consultantes pour rien Le genre d'article où les auteurs se font de la pub et où on apprend pas grand chose. Ahhh le management perdrait son temps avec trop de reporting ??? wouhhaaaaa mon préféré ... l'usine 4.0 :D

à écrit le 03/09/2015 à 17:03
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"la puissance d'analyse des données, le digital promet des gains de productivité à la hauteur des grandes révolutions industrielles." Si le paramétrage est correct et encore... "Dans les usines 4.0, les machines « intelligentes » dotées de cap...

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