La France de l'emploi bloqué : chômage et postes vacants

La Tribune publie chaque jour des extraits issus des analyses diffusées sur Xerfi Canal. Aujourd'hui, chômage et postes vacants !

Paradoxe en France, le chômage métropolitain flirte encore avec 9%, et pourtant, les entreprises peinent de plus en plus à recruter. Certains y voient un facteur bloquant de la reprise en cours.

Et c'est vrai qu'en France, c'est compliqué de recruter, notamment pour une PME. Mais, ça on le sait depuis longtemps. Les PME désignent même la « difficulté à embaucher » comme le premier frein à leur croissance. Selon le baromètre trimestriel réalisé par Bpifrance et Coe-Rexecode, 52 % des PME signalaient en mai cet élément leur principal frein à leur croissance, loin devant la concurrence accrue ou le manque de débouché. Un chiffre en hausse par rapport aux trimestres précédents. Et 46 % des entreprises butant sur ce frein, estimaient que cela impactait déjà leur niveau d'activité. Les PME, on le sait se font siphonner les compétences par l'administration et les grands groupes qui recrutent des surqualifiés au regard de leurs besoins réels. C'est l'avantage des perspectives de mobilité professionnelle, de sécurité et des avantages monétaires et non monétaires qu'offrent les grandes structures. Les PME, elles ne disposent pas des mêmes moyens RH, des mêmes outils de formation en interne. Elles recherchent la perle rare, soit hyperspécialisée, soit polyvalente. Et elles n'ont pas droit à l'erreur, car l'erreur leur coûte cher. Mais, cela c'est un problème structurel. Latent. Propre aux PME... de France, ou d'ailleurs.

Et puis en France, en période de reprise, les indicateurs de difficulté de recrutement se tendent rapidement dès que l'emploi reprend et qu'un nombre croissant d'entreprises se met en quête d'une nouvelle embauche.

  • 1/ D'une part, au premier souffle de reprise, les entreprises sont brutalement confrontées à un taux de départ volontaire accru, de salariés qui cherchent mieux ailleurs. Et c'est un problème pour des employeurs sous-équipés en DRH.
  • 2/ Elles recherchent davantage de CDI, ou des CDD plus longs et là, les exigences changent. Trouver le candidat remplissant les critères, c'est compliqué.
  • 3/ Et puis lorsqu'une crise dure, elle détruit des compétences hyper spécifiques dans certains domaines qui ont tourné durant 10 ans au ralenti.

Les difficultés de recrutement, signes de la vitalité des embauches

Mais tout cela signifie-t-il que l'embauche constitue déjà un facteur bloquant de premier ordre pour la croissance ? Cela veut-il dire que le taux de chômage structurel, incompressible, à 9%, coince toute perspective de prolongation de la reprise et que les entreprises sont déjà condamnées à faire des enchères sur les salaires, pour attirer les rares talents disponibles. Bref que la surchauffe n'est pas loin.

 
Il y a ceux qui fixent leur attention sur la courbe des difficultés de recrutement que délivrent les enquêtes de conjoncture auprès de l'industrie et des entreprises de service. A première vue, les pics de difficulté d'embauche sont proches de ceux observés à la veille de la crise de 2008. Pire, le pourcentage d'emplois vacants bat tous ses records. C'est spectaculaire en effet. Nous vivons des difficultés d'embauche aussi intense, qu'à la veille de la crise de 2008, avec un taux de chômage qui est pourtant près de deux points supérieurs. Pour ceux-là il est clair que c'est symptomatique d'une aggravation du chômage structurel.

Mais il faut revenir sur le sens de ces indicateurs. Si embaucher est intrinsèquement compliqué pour une entreprise, alors, le taux des entreprises qui peinent à embaucher augmente avec la proportion d'entreprises qui recrutent. C'est tautologique. Et vu sous cet angle, le rythme d'embauche, et la proportion d'entreprises qui recrutent dans le privé, sont proches des niveaux observés avant la crise de 2008. Pas étonnant donc que l'on observe le même degré de difficulté à embaucher donc. La difficulté à embaucher est juste un indicateur redondant avec la vitalité de l'embauche, et non le signal de l'épuisement du stock de main-d'œuvre disponible.

Et puis, il faut mettre en perspective la dégradation si spectaculaire en première analyse de la proportion de postes vacants. En comparaison internationale, la France reste logiquement en bas de l'échelle aussi bien dans l'industrie que dans les services. En ligne avec le niveau élevé de son taux de chômage. Ne nous hâtons pas donc d'en faire le symptôme de nos rigidités et de la piètre performance  de nos services de l'emploi.

Bref, c'est vrai. L'accélération brutale des embauches s'accompagne tautologiquement de la proportion d'entreprises exprimant une difficulté à embaucher. Mais n'en tirons pas argument pour étayer l'idée qu'à 9%, la France est déjà au plein emploi et faire porter le chapeau du ralentissement de la reprise et aux disfonctionnements de notre marché du travail.

>> Plus de vidéos sur le site Xerfi Canal, le médiateur du monde économique

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Commentaires 14
à écrit le 11/11/2018 à 0:42
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à écrit le 10/11/2018 à 15:58
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Tous les jours, en allant au travail, je passe devant les vitrines de deux agences d'intérim (ville moyenne de province, 60 000 habitants). Hier, j'ai attentivement regardés les offres. Il y en a, c'est vrai, même si pour la plupart la durée de la mi...

à écrit le 10/11/2018 à 9:13
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Le problème c’est Pôle Emploi. Les 100% d’employés à Pôle Emploi n’ont jamais connu le chômage et les difficultés de la vie par rapport à l’emploi , l’exclusion, le rejet, la discrimination... Explication : hier je téléphoné pour un renseignement , ...

à écrit le 09/11/2018 à 19:50
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"Une bonne nouvelle maquillée en catastrophe: Chômage, le mythe des emplois vacants" https://www.monde-diplomatique.fr/2015/02/CLOUET/52623

à écrit le 09/11/2018 à 17:41
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Entonnant et en effet. D'autant que la flexibilité et l’intérim se sont beaucoup développés en France, comme partout ailleurs. Il faudrait analyser cela par catégorie ou secteur d'activités. D’après le BMO il serait difficile de trouver des charpent...

à écrit le 09/11/2018 à 17:39
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C'est pas grave : Alors que la France a accordé l’asile à 43 000 personnes en 2017, l’une des questions qui se pose concerne l’insertion dans l’emploi des réfugiés. Dans de nombreux cas, ils peinent à trouver du travail, faute de réseaux ou de rec...

à écrit le 09/11/2018 à 17:25
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Ce qui est désolant dans ce type d'articles c'est que leurs auteurs se répètent à longueur de temps sans jamais chercher à savoir ce qui se fait dans certains secteurs . Dans l'automobile les constructeurs et leurs réseaux de réparateurs se mobilise...

à écrit le 09/11/2018 à 17:17
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Propos convenus qui n'apportent rien de nouveau . Il serait préférable que tous les ces spécialistes se penchent sur la question de savoir pourquoi la France est le seul pays où la reprise économique n'a pas d'impacte sur le taux de chômage !! Sur ...

à écrit le 09/11/2018 à 17:13
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Propos convenus qui n'apportent rien de nouveau . Il serait préférable que tous les ces spécialistes se penchent sur la question de savoir pourquoi la France est le seul pays où la reprise économique n'a pas d'impacte sur le taux de chômage !! Sur ...

à écrit le 09/11/2018 à 14:16
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Tant que les employeurs chercherons des "5 ans d'expériences requise" et/ou le bon papier (tel ou tel diplôme) à la place des compétences réelle, il n'y aura pas d'amélioration possible.

à écrit le 09/11/2018 à 14:06
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oui, les pme cherchent la perle rare, effectivement! on appelle aussi ca le mouton a 18 pattes! un jeune de 18 ans, qui a au moins 10 ans d'experience, niveau bac, bac -2, avec un doctorat en maths, un en intelligence artificielle, et un en physiq...

à écrit le 09/11/2018 à 13:21
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Toutes les écoles cherches des stages en entreprise, les PME devraient prendre plus de stagiaires pour les recruter ensuite si besoin !

à écrit le 09/11/2018 à 13:20
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Cette situation « restera ainsi » tant que « les politiques bloquantes «  seront aux pouvoirs. Politiques bloquantes : ( définition) Favoriser des groupes par rapport à des groupes afin d’éliminer «  les groupes minoritaires » mais avant éliminatio...

à écrit le 09/11/2018 à 13:15
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C'est a croire que l'on veut protéger l'emploi du "travailleur détaché" sinon il y a menace de délocalisation, bref... tout pour l'uniformisation vers le moins disant social européen! C'est la politique vicieuse de cet administration hors sol qu'est ...

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