La triple erreur de la réforme du code du travail

Avec la loi El Khomri, même revue, le gouvernement commet une triple erreur: celle de déterrer la hache de guerre avec les syndicats, celle de donner l'impression de prendre le parti des patrons contre les salariés, et enfin de détourner l'attention de la question économique essentielle, à savoir la création d'activité. Par Gilles Lecointre, entrepreneur, professeur à l'Université de Paris Ouest et enseignant à l'Essec

Comme dans tout projet de réforme, il y a de bonnes et de moins bonnes choses. Clarifier les conditions d'indemnités de rupture du contrat de travail me paraît positif. Cela sera favorable au salarié qui touchera son indemnité beaucoup plus rapidement (en tombant d'accord  avec son employeur sur un montant reconnu valable) ; cela garantira une égalité de traitement entre les salariés et entre les employeurs ; cela réduira l'incertitude de l'entreprise sur le coût de sa décision.

En revanche les règles envisagées pour mener à bien un licenciement économique me paraissent plus contestables car trop floues, sujettes à discussion, susceptibles de manipulations ; on voit bien (une fois encore) que ces règles ne peuvent être les mêmes dans une petite entreprise indépendante et dans un grand groupe ramifié en multiples filiales.

Etablir un équilibre syndicat-patronat

Favoriser les accords d'entreprises, pousser les syndicats (de salariés et d'employeurs) à changer de logiciel pour être davantage représentatifs sont des objectifs acceptables par tous. Mais il faut les envisager dans un cadre plus général où on essaierait d'établir un équilibre des obligations réciproques des parties.

En fait, ce qui manque dans ce projet de loi, c'est une vision de l'économie que l'on souhaite privilégier et l'objectif prioritaire que l'on poursuit. Fluidifier la gestion du contrat de travail dans le temps pour tenir compte de la saisonnalité des commandes, pour faire face à une rupture ou bien à un excès d'activité, pour mieux coller à la réalité des rapports sociaux au sein de chaque entreprise, tout cela, d'accord. Mais ce n'est pas avec ces recettes-là que l'on trouvera le gisement de nouveaux emplois dont on a besoin pour sortir du chômage de masse.

Fallait-il déterrer la hache de guerre avec les syndicats?

En mettant l'accent uniquement sur la nécessité de précariser les relations de travail afin de tenir compte des fluctuations de l'économie, on commet une triple erreur. D'une part, on déterre la hache de guerre avec des syndicats de salariés qui ont ainsi une occasion unique de se relégitimer sur la base d'un discours radical et nécessairement excessif. On dessert l'image de l'entreprise en donnant l'impression qu'on prend ouvertement le parti des patrons contre les salariés, ravivant ainsi une opposition frontale dont on espérait enfin sortir. Et, pour finir, on détourne l'attention de la question économique essentielle : comment favoriser la création d'activité.

L'amélioration de l'emploi vient des PME

Car il faut le répéter une nouvelle fois : l'amélioration de l'emploi provient essentiellement  des PME « de croissance » (entreprises de 20 à 200 salariés). Ces PME exceptionnelles créent de l'emploi parce qu'elles ont un projet de développement et des produits nouveaux à présenter sur leur marché. En dehors de ce cadre, point de solution durable. Tout le reste est secondaire, y compris ce projet de Loi.

En conséquence, il faut favoriser tout ce qui va dans le sens des investissements en faveur de la création de richesses (les crédits innovations pour financer l'amélioration du capital immatériel sont un bon exemple à développer). Il faut revenir à une vision positive de l'économie, une vision dans laquelle salariés et employeurs sont solidaires et confiants dans leur avenir commun. Cette réalité, on la rencontre quotidiennement chez nos jeunes « pousses ». Suivons leur exemple !

Le choix du court terme

En mettant l'accent sur la flexisécurité, on fait du court terme, on privilégie au mieux l'indifférence, au pire la défiance d'acteurs qui devraient pourtant être partenaires. Discutons enfin de ce qui lie employeurs et employés. Mettons sur pied un nouveau contrat d'obligations réciproques qui dessinera une relation apaisée et constructive au service du développement de l'entreprise et de l'emploi.

L'économie a besoin de confiance et de temps. Les entrepreneurs indépendants connaissent parfaitement cette équation. Laissons les travailler et réfléchissons à la meilleure manière de favoriser leur prise de risque et leur investissement sur l'avenir. Arrêtons de subventionner l'économie négative, celle de la peur, et mettons toute notre force et nos moyens sur le moteur de la création d'activités.

Gilles LECOINTRE

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Commentaires 41
à écrit le 11/03/2016 à 16:46
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Il n'est évidemment pas question de remettre en cause les compétences de l'auteur de cet article. Sauf sur une omission, volontaire sans doute, nulle part il est précisé :"Qu'un investisseur (plus connu sous le vocable entrepreneur) n'a pas d'autre o...

à écrit le 09/03/2016 à 19:18
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Arrétez de nous rebattre les oreilles avec cette loi vous savez très bien que c'est le MEDEF et Bruxelles qui sont derrière. barre, elle ne connaissait meme pas le nombre de CDD renouvelables alors autant de technicités , je me marre (jaune) gouvern...

à écrit le 08/03/2016 à 11:04
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Résumé rapide: il ne faut absolument, surtout, rien changer. Et c'est ce que pense le Français moyen, à en juger par les sondages. C'est ce que font nos politiques depuis plus de 30 ans. En France on préfère entretenir des chômeurs à vie plutôt que d...

le 08/03/2016 à 18:06
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Pourquoi ? Changer c'est forcément régresser ? On supprime tous les gardes fous obtenus par les salariés depuis au moins 50 ans et la machine va repartir ? On peut déjà licencier en France ce qu'on ne peut pas faire c'est abuser du licenciement. On v...

à écrit le 08/03/2016 à 8:37
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Il y a aussi un problème de clarté dans la communication. On nous dit vouloir lutter contre le chômage et tout aussitôt on choisit l'exemple des PME qui ne recrutent qu'en CDD, ce qui est injuste, etc...Il me semble que lorsqu'on a un CDD ou un contr...

à écrit le 05/03/2016 à 17:33
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Résumé de l'article: ne réformons rien, cela pourrait fâcher les syndicats.

à écrit le 04/03/2016 à 16:47
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Dans cette analyse il manque un constat c'est que les salaries. du Prive sont très peu syndicalises du fait que les syndicats actuels : Cgt .Cfdt,Fo sont surtout des syndicats de la Fonction Publique qui defendent surtout les interets des fonctionnai...

le 05/03/2016 à 8:42
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Ce qu'il faut faire surtout c'est supprimer toute référence à la durée légale hebdomadaire du travail pour les emplois non pénibles (dont tous les cols blancs) avec en contrepartie l'obligation de négocier par branche une norme de salaire horaire par...

à écrit le 04/03/2016 à 14:52
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Dans cette analyse il manque un constat c'est que les salaries. du Prive sont très peu syndicalises du fait que les syndicats actuels : Cgt .Cfdt,Fo sont surtout des syndicats de la Fonction Publique qui defendent surtout les interets des fonctionnai...

à écrit le 04/03/2016 à 14:35
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Dans cette analyse il manque un constat c'est que les salaries. du Prive sont très peu syndicalises du fait que les syndicats actuels : Cgt .Cfdt,Fo sont surtout des syndicats de la Fonction Publique qui defendent surtout les interets des fonctionnai...

à écrit le 04/03/2016 à 7:55
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Il faut établir un équilibre entre le cout du travail et le prix de l'énergie.(On augmente l'un en réduisant l'autre)

à écrit le 03/03/2016 à 17:54
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Ils bloquent un jour,deux jours et après ils se calment.

à écrit le 03/03/2016 à 17:54
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Ils bloquent un jour,deux jours et après ils se calment.

à écrit le 03/03/2016 à 15:28
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On se plaint mais avec l'arrivée de la droite et ses projets de réformes ultra-libérales c'est toute la France qui sera bloquée !

le 03/03/2016 à 22:32
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Sauf Mariton, tous les autres n'ont rien de liberal... - toujours plus d'intervention de l'état - aucune diminution des dépenses ( sérieuses et douloureuses) - pas de mise en concurrence des assurances sociales ,de l'éducation - le maintien de...

à écrit le 03/03/2016 à 14:06
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Approche très intéressante, pertinente et constructive. Mais pour cela, encore faut-il que les gouvernants dépassent la vision à court terme et purement politicienne et stratégique. Mais pour en arriver là, il y a encore un sacré boulot. Ceci dit...

à écrit le 03/03/2016 à 13:38
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Très bonne analyse. Ce qui compte en effet, c'est que patron et employé travaillent dans un climat apaisé vers un but commun. C'est l'intérêt de tous ! C'est pourquoi je ne comprends pas ces demandes incessantes du patronat de faciliter les licenciem...

le 04/03/2016 à 14:45
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42 ans dans l'industrie ,une carrière commencee comme ouvrier et échelon après échelon j'ai termine cadre. Vous racontez des betises. Un employeur ne licenciera jamais un ouvrier serieux. !!!!! et n'oubliez pas que les patrons de PME sont souvent des...

le 04/03/2016 à 14:52
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42 ans dans l'industrie ,une carrière commencee comme ouvrier et échelon après échelon j'ai termine cadre. Vous racontez des betises. Un employeur ne licenciera jamais un ouvrier serieux. !!!!! et n'oubliez pas que les patrons de PME sont souvent des...

le 05/03/2016 à 8:52
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@Réponse de Duhamel "Ceux sont ces gens que l'on doit pouvoir virer. " Du point de vue de l'entreprise vous avez raison. Après du point de vue de la société ça signifie que la personne ne sera jamais recrutée dans le secteur marchand et on a donc l...

à écrit le 03/03/2016 à 13:14
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Toutes les fois que quelque chose est proposée, c'est toujours la même chanson !!! Les "soviets" syndicaux, les (faux) étudiants, mais vrais activistes, les "professeurs" et autres économistes de bazar, les Médias friands de polémiques, tout cela s'a...

le 03/03/2016 à 17:23
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Pour MADUF. A part votre aréopage d'idées préconçues coupées de la réalité, avec le même discours que dans les années 1970 (bonjour le progrès), vous avez quelque chose de concret à proposer ? Moi je pense que c'est en favorisant les licenciements...

le 04/03/2016 à 9:52
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Il vous suffit de regarder ce que les autres pays ont fait !!! Tous, vraiment tous, Canada, Suède, DK, Allemagne, UK, Espagne, Italie, tous ont rendu leur marche du travail plus flexible et le résultat est la : presque le plein emploi... Vous dites q...

le 05/03/2016 à 8:56
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Oui c'est comme les pétitions anti impôts. Il ne faut jamais oublier quand on entend légiférer qu'on est en France et c'est en France qu'habitent les français en majorité encore.

le 05/03/2016 à 9:02
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@Réponse de Maduf Pour rendre le travail plus flexible en le faisant accepter aux français, il suffit d'étendre les conditions d'emploi d'intérimaires. Ensuite, en baissant simplement de manière importante le coût du CDI tel qu'il est, on développer...

à écrit le 03/03/2016 à 12:00
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Cette loi est surtout injuste car elle crée une catégorie corvéable à merci et sous payée ! Si vous voulez faire avancer la France dans le domaine économique la première chose à faire c'est déjà de remettre à plat tous les régimes. Remettons tous le ...

le 05/03/2016 à 9:12
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Pourquoi parler de 39h ou de 35h ? La seule chose importante pour les fonctionnaires comme pour les autres, c'est le salaire horaire par niveau de classification. Si on veut que la concurrence soit loyale, il faut imposer une négociation par branche ...

le 08/03/2016 à 18:26
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@Théophile : arrêtez de dire n'importe quoi. Les salariés gagnaient bien plus du temps des 39 heures. Et les 35 heures ont considérablement désorganisé l'économie. Vos nuances machin chose cout horaire et classification gardez les pour impressionner ...

le 08/03/2016 à 21:26
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@Réponse de Fredo30 Et expliquez-moi je vous prie comment outre Manche vous pourriez convaincre les entreprises qui recrutent avec des contrats à zéro heure de recruter avec des contrats à 39h ? Faire travailler les fonctionnaires 39h ne fait rien g...

à écrit le 03/03/2016 à 11:26
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Un peu de lucidité fait du bien... alors écoutons les patrons ( pas le medef non représentatif) « Je croule sous les obligations administratives » 1.1- doubler les seuils d'obligations et contraintes sociales 1.2- rendre aux salariés...

le 05/03/2016 à 9:33
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« Je croule sous les obligations administratives » - développer l'externalisation (et la variabilisation des coûts) des fonctions non cœur de métier. Un gestionnaire de site peut fournir l'expertise RH et juridique, une fonction achat, une cantine e...

le 07/03/2016 à 17:40
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+1 pour les propositions de CAP2006. Pour ce qui concerne le revenu universel, ce serait quoi le montant ? 1500, 2000, 2500 ?

à écrit le 03/03/2016 à 11:04
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Chacun a bien compris désormais que toute réforme de structure en France devra se faire sans l'accord des syndicats! Il faut aussi avoir présent à l'esprit que seuls 8% des salariés sont syndiqués !

le 03/03/2016 à 18:03
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Et aussi sans l"accord des français . L' essentiel c 'e

le 08/03/2016 à 21:57
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Ce ne sont pas les syndicats qui bloquent en général. Ce sont les français car ce sont les français qui font grève ou manifestent au point de bloquer le pays. Les syndiqués eux sont beaucoup trop peu nombreux pour y parvenir. Dans les pays où il y a...

le 08/03/2016 à 21:58
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Ce ne sont pas les syndicats qui bloquent en général. Ce sont les français car ce sont les français qui font grève ou manifestent au point de bloquer le pays. Les syndiqués eux sont beaucoup trop peu nombreux pour y parvenir. Dans les pays où il y a...

à écrit le 03/03/2016 à 10:59
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On ne peut pas demander aux entreprises privées et notamment aux PME d'accorder à leur salarié le statut de fonctionnaire. Qu'une loi ne plaise pas aux syndicats c'est courant ils sont contre tout. Il faut savoir s'adapter à la réalité même et surtou...

à écrit le 03/03/2016 à 10:48
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analyse objective, hélas gattaz prefere garder les milliards d'aide de l'état pour lui. comment se fait-il que ce patapouf représente les patrons" ? c'est son père qui lui a laissé les clés de la boutique, il a jamais bossé lui.

le 03/03/2016 à 11:45
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Parce que bien entendu pour vous, une PME du secteur industriel totalement exposée à la concurrence mondiale roule toute seule 22 ans après le départ de son fondateur... Quant au CICE et au pacte de compétitivité ce ne sont que de petites mesures qui...

le 04/03/2016 à 16:48
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se qui bloque la reprise ! se sont les charges sociales ! voter une LOI DU TRAVAIL ! qui ne vas faire revenir les emplois delocaliser ! et les capitaux qui sont partie avec !

le 10/03/2016 à 19:04
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Réponse à Bruno : il y qd meme un problème : 40 milliards d'aides aux entreprises -> aucune création d'emploi et un chomage qui < . Imaginons que l'état ait consacré cette masse â creer des emplois . Sur la base d'un coût annuel chargé de 30k€ , on ...

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