Le digital, un accélérateur historique pour la mixité

À l'occasion de la Journée de la Femme Digitale qui se tiendra le 9 mars à la Cité de la mode et du design à Paris, sa cofondatrice Delphine Remy-Boutang revient sur son engagement pour l'égalité économique femmes-hommes et encourage les femmes à entreprendre en créant un nouvel écosystème.
Delphine Remy-Boutang.

J'ai toujours été fascinée et passionnée par ce que représente la technologie et par le fait qu'une idée puisse devenir une réalité. Après treize années passées chez IBM, c'est ce secteur que j'ai choisi pour agir pour l'égalité femmes-hommes ; il représente le progrès et ne peut donc pas s'inscrire dans l'inégalité. Et c'est d'autant plus important que, si le secteur des nouvelles technologies accueillait autant de femmes que d'hommes, le PIB européen progresserait de 9 milliards d'euros.

Aujourd'hui, nous savons qu'en doublant la vitesse d'accession des femmes au digital, la parité progressera plus rapidement : 25 années gagnées pour les pays matures et 40 années gagnées pour les pays émergents, selon une étude d'Accenture de mars 201 : Getting to Equal : How Digital is Helping Close the Gender Gap at Work.

Partager est devenu le nouveau pouvoir

Le numérique n'est pas juste une révolution technologique, mais une véritable révolution culturelle, métamorphosant littéralement les usages, les valeurs et les postures. Expérimenter compte plus qu'anticiper, savoir où chercher l'information est plus important qu'être expert (e). Partager est devenu le nouveau pouvoir.

Aujourd'hui, les cartes de la compétence sont entièrement rebattues et les codes de la vie en entreprise redéfinis en profondeur. La bonne nouvelle, c'est que cette nouvelle organisation de l'entreprise convient bien aux femmes ! Toutes ces nouvelles valeurs que représentent la transmission, le partage, la création, la collaboration, sont au coeur de l'ADN féminin !

Le plafond de verre est un modèle du passé

Avec les innovations de rupture que représente le digital, il n'est plus question d'adapter nos modèles du passé, mais bien de réécrire notre avenir. La culture digitale est de nature à faire sauter beaucoup de freins à la progression professionnelle des femmes. C'est une chance historique que nous devons saisir. En 2015, à l'occasion de la 3e édition de la Journée de la Femme Digitale, l'étude de Capgemini "Les Femmes, l'audace et le digital" révélait que les femmes digitales sont audacieuses : 60% d'entre elles sont prêtes à porter des projets d'innovation avancée dans leur entreprise, et 90% à considérer que le digital offre des opportunités inédites à l'entrepreneuriat. Mais, pour cela, comme l'a mis en lumière l'étude de 2016 ("Le digital : quelles nouvelles perspectives pour les femmes ?"), 93% considèrent que « networker » est indispensable pour percer dans le digital.

Je suis convaincue que le schéma de carrière en entreprise ne doit plus se concevoir de façon verticale, mais bien horizontalement. Où chacun(e) est libre d'entreprendre toutes les actions qu'il ou elle estime les meilleures, comme l'a si justement défini Isaac Getz, qui a popularisé le terme de l'entreprise libérée. Ces nouveaux modes de fonctionnement sont fondés sur l'agilité et l'autonomie des collaborateurs qui permettent aux entreprises une réactivité et une adaptabilité favorisant ainsi la mixité.

La liberté individuelle au service d'une responsabilité collective

Quand une entreprise avance sur le chemin de l'entreprise libérée, elle va naturellement trouver des modes de fonctionnement proches de ceux sur lesquels les acteurs du digital se sont construits. Admettre l'erreur comme une opportunité de réagir plus vite et d'innover pour faire progresser l'entreprise. On le sait : l'innovation est le moteur numéro un de la croissance. Dans un monde où ce n'est plus le gros poisson qui mange le plus petit, mais le poisson le plus rapide qui mange le plus lent, il y a urgence à redéfinir la place des femmes dans la société.

Car c'est bien de cela qu'il s'agit au-delà de l'entreprise : la mixité est un combat sociétal.

Plutôt que de s'adapter ou de renoncer, je propose de poser ici une alternative, un troisième choix : créons cette nouvelle entreprise ! Les femmes doivent inventer une entreprise nouvelle, qui nous ressemble, dans laquelle la créativité serait au centre, et le présentéisme non plus une règle de promotion, mais où l'engagement, la collaboration, la persévérance, l'esprit intrapreunarial, le travail d'équipe et la loyauté seraient prônés. Une entreprise où nous n'avons plus à faire des choix. Choisir, c'est renoncer. Et pourtant "I want it all", comme l'a dit Sheryl Sandberg, doit être une réalité à convoiter pour tous et toutes.

Une femme digitale, c'est une femme libre

Pour encourager les femmes à entreprendre ou intraprendre, à créer ou transformer l'entreprise dans laquelle nous nous sentirons bien, je suis convaincue de l'importance de l'émergence de nouveaux rôles-modèles. Car les stéréotypes sont résistants. Pudiquement appelés d'antan "nos repères" qui nous rassurent mais qui nous enferment. Nous sommes 50% de l'humanité. Tant que nous ne serons pas à 50%, le monde sera en déséquilibre. Notre repère doit être celui-ci et n'acceptons aucun compromis : la moitié.

La liberté d'innover et de créer assure la puissance économique dans un monde en pleine transformation. L'émancipation des personnes est un combat sans fin et sans réserve. Et ce principe des rôles-modèles, auquel je crois plus que tout, pourra faire changer les mentalités. Car c'est bien de cela que nous devons nous débarrasser : nos propres limites.

Se vouloir libre, c'est aussi vouloir les autres libres, et c'est seulement par le travail qu'on peut se garantir une liberté concrète, pour reprendre les propos de Simone de Beauvoir.

On peut changer le monde, le rendre meilleur. Et si ce monde était un monde au féminin?

Par Delphine Remy-Boutang, cofondatrice de la Journée de la Femme Digitale, fondatrice du club JFD Connect et de l'agence de communication digitale The Bureau.

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Sources : https://www.fr.capgemini-consulting.com/ journee-femme-digitale-15 https://www.fr.capgemini.com/enquetejfd2016

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Commentaires 2
à écrit le 07/03/2017 à 20:23
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"Et c'est d'autant plus important que, si le secteur des nouvelles technologies accueillait autant de femmes que d'hommes, le PIB européen progresserait de 9 milliards d'euros." La digitalisation est à la mode et ce mot est mis à toutes les sauces s...

à écrit le 07/03/2017 à 16:15
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"Après treize années passées chez IBM, c'est ce secteur que j'ai choisi pour agir pour l'égalité femmes-hommes" Faudra le dire à la centaine de secretaires qui viennent d'être externalisées d'IBM dans une filiale de Manpower ce mois-ci , avec une ...

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