Les "crypto-euros", la monnaie bitcoin du futur

Le futur du bitcoin et des crypto-monnaies dépendra de la patience des gouvernements face à un outil qui facilité l'anonymat et l'évasion fiscale. Comme rien n'est plus simple que cloner le bitcoin ou en améliorer la technologie, des États plus audacieux pourraient créer leur propre crypto-monnaie, afin de mêler les vertus d'une monnaie officielle aux innovations des cryptomonnaies. Par Jean-Jacques Quisquater, École Polytechnique de Louvain, Université de Louvain et Charles Cuvelliez, École Polytechnique de Bruxelles, Université de Bruxelles.
Qu'est-ce qui empêcherait l'arrivée d'euros bien réels, transformés en leur équivalent crypto, injectés par la banque centrale au sein du blockchain du bitcoin. On élimine ainsi un autre de ses défauts récurrents pour en faire une vraie monnaie : sa volatilité.

N'en déplaise aux contempteurs du Bitcoin qui prédisent sa chute, la Bourse de Chicago lui donne un sérieux coup de pouce en honorabilité, en proposant fin 2017, des contrats à terme en bitcoin. Elle a déjà lancé un instrument de cotation du bitcoin en agrégeant les données des plus importantes plateformes d'échanges, mais elle se garde bien d'être une plateforme elle-même. Sa stratégie est de proposer des produits dérivés du bitcoin pour lisser sa volatilité.

L'anonymat et l'évasion fiscale, pour combien de temps encore ?

Parallèlement, le régulateur financier européen a émis une mise en garde sur les ICO (Initial Coin Offering) en bitcoin, un droit d'utiliser un service d'une startup qui n'existe pas encore  (un moyen de lever des fonds hors de tout cadre régulé).

Le futur du bitcoin et des crypto-monnaies dépendra de la patience des gouvernements face à un outil qui facilité l'anonymat et l'évasion fiscale. Comme rien n'est plus simple que cloner le bitcoin (en témoigne la multitude de concurrents) ou en améliorer la technologie, des États plus audacieux pourraient créer leur propre crypto-monnaie, dans le but de mêler les vertus d'une monnaie officielle aux innovations des cryptomonnaies. Bref, que donneraient des crypto-euros ?

Stopper la dérive des trois briques de base

Tout d'abord, au lieu de laisser dériver les trois briques de bases des paiements en crypto-monnaie (les clés publique et privée, l'équivalent d'adresse email pour valider et recevoir les transferts en bitcoin) dans le réseau du bitcoin qui les génère automatiquement, on peut les confier aux banques qui les créeraient pour vous. Un premier principe de base serait respecté : know your customer, à savoir l'obligation pour une banque de connaitre son client avant de lui ouvrir un compte. La clé privée reste sous le contrôle de l'utilisateur final et elle suffit aux paiements en bitcoins. On n'enlève pas son âme au bitcoin : on peut toujours se passer des banques mais en cas de requête judiciaire, avec la clé privée, on peut remonter à la clé publique que la banque conserve. Elle n'identifie l'utilisateur final qu'en cas de besoin. L'anonymat des paiements bitcoin n'est plus irréversible.

Confier un rôle de gardien aux banques

C'est bien un rôle de gardien de bitcoin qu'on confie aux banques qui, pour ce faire, recevraient une autorisation-licence de la banque centrale. Elles forment les nœuds du réseau pair-à-pair dont le rôle est la validation des transactions en bitcoin. Les banques joueraient donc, par elles-mêmes, le rôle de chambre de compensation...sans devoir en créer une. C'est un autre avantage du bitcoin qu'on garde.

Les nœuds, les banques, ne sont pas des PC anonymes de particuliers.  Ils sont connus, identifiés, dignes de confiance : il n'est plus nécessaire de passer par ce couteux et stupide défi mathématique à résoudre (aléatoirement) par les ordinateurs (une étape nécessaire pour éviter qu'un groupe d'ordinateurs ne prenne le contrôle pour fabriquer de la fausse monnaie) puisque on opère en cercle fermé. C'est ce qui rendait le bitcoin peu écologique et rentable au vu de la puissance de calcul commune nécessaire. La transaction en bitcoin validée se retrouverait, comme avant, sur le blockchain du bitcoin, transparente, visible de tous, auditable et irréversible, comme tout paiement.

Les protagonistes de ce transfert garderaient la discrétion tant qu'une  requête ne force pas la banque à établir un lien entre la clé publique et l'utilisateur. Car les bitcoin ont uniquement besoin de la clé privée. Ceci dit, rien n'empêche l'épargnant en bitcoin d'ouvrir un compte à sa banque et y transférer ses avoirs : des sites existent déjà pour héberger des portemonnaies en bitcoin. Ils en sont d'ailleurs le maillon sulfureux (le stockage de bitcoins par des tiers n'est pas prévu dans le protocole de son inventeur).

Bitcoin ou crypto-euro ?

On peut pousser la réflexion plus loin : pourquoi faut-il créer une crypto-monnaie ex-nihilo ? Qu'est-ce qui empêcherait l'arrivée d'euros bien réels, transformés en leur équivalent crypto, injectés par la banque centrale au sein du blockchain du bitcoin.  On élimine ainsi un autre de ses défauts récurrents pour en faire une vraie monnaie : sa volatilité. La banque centrale a alors, dans ce schéma, sa propre clé privée, comme tout autre utilisateur. Elle la manie pour transformer des euros en crypto-euros. Elle les introduit ensuite dans le blockchain.

Rien ne l'empêche de pratiquer ensuite sa politique monétaire, ici, comme dans le monde réel : les banques auraient, en plus de leur compte traditionnel auprès de la banque centrale, un compte blockchain pour lesquels la banque centrale  imposerait ratios et autres obligations de dépôts. Elle peut même imposer des taux d'intérêts différentiés entre euros et crypto-euros pour contrôler la masse monétaire dans l'un et l'autre système. L'effet sur l'inflation serait détonnant.

Rendre le bitcoin "crypto-euro" respectable ? Tout le monde y gagnerait

Il ne faut pas grand-chose pour rendre le bitcoin « crypto-euro » respectable et tout le monde y gagnerait : les banques, au lieu de subir, pourront développer de nouveaux services liés au crypto-euro. Elles s'assurent une rémunération sur les transactions de validation des paiements entre utilisateurs. Les bitcoins « crypto-euros » viendront  garnir le portefeuille de produits de la banque. Si elle cherche à se distinguer devant le tsunami de solutions de paiements mobiles, qui font intervenir énormément d'intermédiaires, qui déferle, voilà un moyen idéal : c'est une affaire entre la banque et l'utilisateur... sans compte en banque.

Qui dit mieux ? En plus,  gérer un blockchain est bien moins cher que de participer à des chambres de compensation (d'où la mauvaise humeur de JP Morgan). Les gouvernements des pays qui reposent sur le cash peuvent y réduire leur dépendance sans avoir à bancariser d'abord la population.

Enfin, un bitcoin non sulfureux va permettre aux investissements de se lâcher, une aubaine pour les banques en quête d'un second souffle.

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Par Jean-Jacques Quisquater, École Polytechnique de Louvain, Université de Louvain et Charles Cuvelliez, École Polytechnique de Bruxelles, Université de Bruxelles.

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> Pour en savoir plus :
State-Sponsored Cryptocurrency, Eric Piscini, Deloitte, 2015

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Commentaires 12
à écrit le 14/03/2018 à 0:45
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Oh mon dieu, vous êtes à polytechnique et pourtant vous n'avez absolument rien compris au principe même du Bitcoin et de sa technologie Blockchain. Encore un dinosaure qui veut que le monde continue avec les banques, celles-là mêmes qui ne font pl...

à écrit le 12/03/2018 à 23:19
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j'ai hurlé de rire et faillit fracasser ma table en lisant l'article du géniale auteur de cette tartuferie interplanétaire. "confier aux banques le rôle de gardien"!!! on comprend bien que dans vos sphères que vous soyez des peignes fesses coincés ma...

à écrit le 26/12/2017 à 13:20
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L'auteur ne semble pas avoir compris que l'objectif final des cryptos est de se débarrasser des banques...

à écrit le 14/12/2017 à 14:43
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vous savez que vous avez écrit mot pour mot ce qu'est XRP et XLM ? Bref, vous n'y connaissez rien.

à écrit le 18/11/2017 à 17:35
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Mon dieu, vous n'êtes pas en train de decrirlz futur de Ripple 😱

à écrit le 18/11/2017 à 9:50
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Une fois qu’une flêche sort de l’arc : on l’attrape plus ... la cible est virtuelle & c’est pour détourner la programmation qui a été faite pour un système qui existe depuis très longtemps , beaucoup d’erreurs ont été faites jusqu’à Présent , notamme...

à écrit le 17/11/2017 à 17:38
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Demandez donc aux grecs pourquoi ils ne veulent plus faire confiance ni confier leurs avoirs aux banques, qui ont tout pouvoir de les bloquer et de les rendre sans valeur.. Les nouvelles monnaies qui s'affranchissent des banques c'est un choix qui...

à écrit le 16/11/2017 à 14:07
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Difficile de faire pour expliquer qu'on ne comprend rien au protocol Bitcoin. Bravo.

à écrit le 15/11/2017 à 23:16
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Il serait urgent de faire un cours genre bitcoin pour les nuls car pour l'instant le charabia 2.0 n'explique pas sur quoi repose cette monnaie quand il n'y a pas d'électricité.

à écrit le 15/11/2017 à 22:52
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Bonjour M. Quisquater. La banque qui génère vos adresses publiques connait forcément les clés privées associées. Certes, dans le cadre d'une blockchain consortiale, on pourrait effectivement envisager que les banques qui valident n'incluent dans...

à écrit le 15/11/2017 à 17:12
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Visiblement, le bitcoin embête bien ces messieurs. Le bitcoin existe car les gens veulent une monnaie libre, décentralisé, non contrôlé par les banques et les états, c'est une monnaie d'adhésion. Qui va adhérer à une monnaie virtuelle émise et contrô...

le 15/11/2017 à 22:03
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monnaie tellement libre qu'elle est convertie en monnaie des banques centrales dès que la spéculation a portée ses fruits ! XD

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