Président Macron, ne tuez pas l'ISF PME !

Après avoir indiqué sa volonté de prendre du temps pour réaliser une réforme fiscale globale, le gouvernement vient d'annoncer que la suppression de l'ISF PME(*) sera mise en vigueur dès 2018. Par Julien Benayoun et Eva Sadoun, fondateurs de 1001PACT.
Julien Benayoun et Eva Sadoun.

"Monsieur Macron, Président des startups... Faites ce que vous voulez de l'ISF et de la taxe d'habitation, mais ne tuez pas la principale source de financement des PME, des startups et des entreprises sociales."

_ _ _

Celui qui a fait campagne sur le renouveau de la vie politique, et sur la fin des réformes au coup par coup pour faire plaisir aux uns et aux autres, vient de tout faire à l'envers. Il a suffi que quelques personnes de l'opposition râlent pour que le Président « pivote ». Finie la réforme globale de la fiscalité, dont la France a besoin de plus de vingt ans... Il faut faire des cadeaux à droite et à gauche : réforme de l'ISF et, « en même temps », fin de la taxe d'habitation.

C'est une politique dangereuse qui ne prend pas en compte les externalités. En effet, réformer l'ISF et supprimer l'ISF PME, c'est mettre une croix sur l'un des rêves du président, répété notamment lors du lancement de Station F : « La France va devenir la terre des startups. »

Libérer le capital, favoriser l'investissement ?

La réforme présentée consiste à remplacer l'ISF par un impôt sur la fortune immobilière. C'est la création d'un impôt sur la rente immobilière. L'argument principal annoncé est de libérer le capital et de favoriser l'investissement dans l'économie réelle. Ici, l'investissement dans l'économie réelle prend en compte tout le patrimoine financier possible : les actions cotées, les fonds de placement, les assurances-vie... Ce n'est pas une mauvaise idée dans l'ensemble, mais il va être difficile, toutes choses égales par ailleurs, d'inciter les épargnants à investir dans une PME (risque de perte de capital et risque d'illiquidité) plutôt que dans une assurance-vie (sécurité financière, diversification, exonération de plus-value). Et, cerise sur le gâteau, pour maintenir une certaine "logique", il décide de supprimer l'ISF PME.

Il faut savoir que l'ISF est la source principale pour financer l'innovation environnementale, sociale et technologique. Chaque année, c'est plus de 1 milliard d'euros qui financent un millier de PME, startups et entreprises sociales, dont plus de 60% provenant de la réduction ISF PME (620 millions d'euros en 2015, selon la Cour des comptes).

Soutenir l'économie réelle au lieu de payer des impôts

Sur notre plateforme, plus de la moitié des investissements sont motivés par la réduction ISF. De nombreuses personnes assujetties à l'ISF préfèrent investir dans des PME et soutenir l'économie réelle, au lieu de payer des impôts. Ces sources de financement correspondent à un maillon clé de la chaîne de financement des entreprises, celui de l'amorçage. C'est le moment où les besoins d'investissement sont vitaux et où aucun investisseur institutionnel ne prend de risque... A ce stade d'avancement, les entreprises ont comme seules ressources le travail non rémunéré des dirigeants, et quelques subventions. Avec ces premières ressources, ils parviennent à développer un premier produit et une preuve de marché. Cette preuve leur permet ensuite de trouver les premiers investisseurs et business angels. C'est donc une période où l'on investit sur peu de preuves. C'est risqué. Il ne faut pas se mentir, ceux qui investissent le font aussi parce que c'est un investissement qui réduit de moitié leur ISF*.

Nous ne sommes pas contre la réforme de l'ISF mais, si réforme il y a, il faut créer de nouvelles incitations pour orienter l'épargne des Français vers l'innovation. Cela peut passer par exemple par une réduction d'impôt passant de 18% (actuellement) à 30% ou 45% de son investissement PME sur l'impôt sur le revenu. En 2016, nos amis belges et italiens ont voté ce type de dispositif incitatif.. et c'est ce qu'avait proposé Alain Juppé, ancien mentor d'Edouard Philippe.

Si cette réforme est menée sans réflexion globale sur notre fiscalité, ce sont les PME et les entreprises sociales qui vont en pâtir.

_ _ _

"Alors oui, Monsieur Macron, la fin de l'ISF PME, sans aucune réflexion fiscale pour inciter les Français à soutenir l'innovation et l'entrepreneuriat social, c'est la fin de votre rêve."

___

Par Julien Benayoun et Eva Sadoun, fondateurs de 1001PACT, première plateforme d'investissement participatif dédiée aux startups sociales et environnementales.

___

(*) Le dispositif ISF PME permet aux particuliers de réduire leur impôt de 50% des sommes investies dans des entreprises de moins de 7 ans, un montant plafonné à 45.000 euros.

| Lire aussi : ISF : les réductions pour investissement dans les PME (sur le site du gouvernement)

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaires 2
à écrit le 20/07/2017 à 13:09
Signaler
Rarement lu autant de betise et de veulerie : l'ISF PME tue de nombreuses entreprises car leurs fondateurs doivent vendre des parts pour le payer. Il se trouve que quelques dispositifs permettent de s'exonerer en investissant dans des startup ... ou...

à écrit le 20/07/2017 à 10:15
Signaler
Les entreprises qui profitent des niches fiscales vont toutes monter au créneau pour expliquer qu'elles sont importantes pour l'économie, surtout la leur, et qu'il ne faut pas les supprimer car qui investirait déjà avec une presque certitude de pert...

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.