Quantitative easing, comment la BCE fait tourner la planche à billets

La Tribune publie chaque jour des extraits issus des analyses diffusées sur Xerfi Canal. Aujourd'hui, comment fonctionne le "quantitative easing"
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J'aimerais vous expliquer ici à grands traits comment fonctionne le Quantitative Easing (QE), mis en pratique par la BCE depuis janvier 2015 et inspiré de ce qu'ont fait avant elle les Banque du Japon, d'Angleterre ou la FED.

Commençons par une définition d'abord.  Pour une banque centrale, pratiquer le QE, signifie de racheter massivement des titres de dette publics et privés auprès des banques, des compagnies d'assurances et d'autres fonds d'investissement.

Pourquoi parle-t-on de politique non-conventionnelle ?

La vocation normale de la BCE c'est de fournir de la liquidité à très court terme  aux banques via des opérations de refinancement d'une durée d'une semaine. En échange de ce cash, elle prend alors en pension des actifs qui servent de garanti. Autrement dit elle ne les achète pas, mais les prends en contrepartie d'un prêt. Tout cela est complété par un arsenal d'instruments de réglage fins.

Ce qu'il faut surtout retenir, c'est qu'à travers ces opérations dites « d'open-market », et les taux qu'elle applique à ces opérations, les fameux « taux directeurs », la BCE facilite ou, au contraire, resserre les conditions auxquelles les banques se prêtent des liquidités à très court terme. Et par effet de cascade, elle influence les taux des dépôts et des prêts que consentent les banques aux entreprises et aux ménages.

En résumé, à travers sa pratique conventionnelle, la BCE cherche à agir sur l'offre et la demande de crédit en manœuvrant principalement les taux d'intérêt.

A la frontière entre le conventionnel et le non conventionnel

Il y a ensuite ce que l'on appelle les opérations de refinancement à plus long terme, les LTRO,  pour Longer-Term Refinancing Operations. Dans le cadre conventionnel, il n'existe qu'une forme de LTRO, d'une maturité, c'est-à-dire d'une durée de remboursement de 3 mois.

Mais leur nombre et surtout leur maturité se sont accrus à partir de 2007. Elles ont mêmes été étendues à 3 ans voire à 4 ans. Il s'agit donc, de fait, de prêts à long terme accordés par la BCE aux banques. En 2011 et 2012, 1.100 milliards d'euros ont ainsi été distribués aux établissements financiers de la zone euro pour une durée de trois ans.

Le changement de paradigme est suffisamment considérable par rapport à la pratique habituelle de la BCE, pour que beaucoup de commentateurs aient parlé de Quantitative Easing dès cette époque. On pourrait qualifier plus exactement ce type d'opérations de Quantitive Easing à durée déterminée. Et c'est bien parce que ces opérations arrivent aujourd'hui à échéance qui est urgent pour la BCE de réinjecter massivement de la liquidité dans le système.

Changement de politique

Et c'est bien ce que fait la BCE depuis janvier, en pratiquant un quantitative easing au sens stricte du terme, se lançant ainsi de plain-pied dans une politique vraiment non-conventionnelle.

  • Premièrement, elle procède à des achats fermes de titres, principalement des titres souverains, c'est-à-dire de la dette d'états. Mais il peut s'agir aussi d'obligations d'entreprises et même de produits titrisés.
  • Deuxièmement, il s'agit bien d'achats massifs (1.140 milliards d'euros répartis sur 19 mois). Les mécanismes de transmission attendus sont plus complexes qu'il n'y paraît.

Lorsque la BCE achète massivement des titres souverains, son objectif n'est pas vraiment de prêter aux États en faisant jouer la planche à billet. La dette des administrations en % du PIB est en effet en voie de stabilisation en zone euro et contingentée par les règles de stabilité.

En siphonnant donc une partie de l'encours des obligations d'Etat détenus au portefeuille des intermédiaires financiers, la BCE restreint le marché des titres publics et pousse ainsi les investisseurs à recomposer leurs portefeuilles en faveur des titres corporate (c'est-à-dire d'actions et obligations d'entreprises), bien plus rémunérateurs que les titres publics.

Elle tire donc vers le bas les taux sur ce type de produit, faisant baisser le coût de financement des États et des entreprises.

Elle pousse du même coup à la hausse le prix des actifs et notamment les cours de bourse. Elle augmente le volume de financement auquel ont accès les agents privés. En diminuant de surcroît l'ensemble des rendements, notamment à long terme, et en émettant de l'euro, elle favorise la dépréciation de la devise européenne.

C'est en jouant sur ces quatre canaux de transmission qu'elle espère aujourd'hui extraire la zone euro du piège déflationniste qui se refermait sur elle,  et favoriser ainsi la reprise économique.

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Commentaires 3
à écrit le 30/03/2015 à 14:06
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Une preuve de plus que les banques ne sont QUE des coquilles vides dont la fonction est juste de pomper l'économie réelle, soit, vous et moi.

le 30/03/2015 à 15:51
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Exactement et ce n'est pas nouveau mais cela va en s'aggravant de manière explicite et assumee avec la propagation des taux dintérêt négatifs

à écrit le 30/03/2015 à 13:11
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Ou comment créer de l'inflation que les détenteurs de capitaux ne désire pas subir! De là l'investissement a minima et les cours de bourse qui flambe!

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