Retraites : le pari de Macron face à la démagogie de Le Pen

La Tribune publie chaque jour des extraits issus des analyses diffusées sur Xerfi Canal. Aujourd'hui : le pari de Macron face à la démagogie de Le Pen des retraites.

Avec la présidentielle, que peut-on attendre sur le front des retraites ? C'est un sujet crucial. Il s'agit du premier poste de dépenses sociales en France, principal contributeur à nos écarts de dépenses publiques avec les autres pays de l'OCDE.

Les réformes ont rééquilibré le système, à court terme seulement

Premier constat. Les pensions versées aux retraités ou aux survivants représentaient plus de 15% du PIB en 2015, ce qui place la France très nettement au-dessus de la moyenne européenne. Grâce aux réformes de 2010 et 2013, le régime vieillesse est peu ou prou équilibré aujourd'hui. En léger excédent de 1,1 milliard, même, si l'on s'en tient aux comptes du régime général. En déficit de 2,6 milliards si l'on intègre les pertes du fond de solidarité vieillesse.

Mais le choc de la dépendance, c'est maintenant. Il est moindre qu'ailleurs, compte tenu de notre natalité, mais se concentre sur les deux décennies à venir. Les ajustements de 2010-2013 sont calibrés pour permettre de tenir la route financièrement. Mais au prix d'un allongement de la durée de cotisation et d'une perte relative de pouvoir d'achat des retraités par rapport aux actifs, pour dire les choses très vite.

Avec Marine Le Pen, c'est le retour à la case départ

Marine Le Pen propose d'annuler les ajustements faits jusqu'ici avec un retour à 60 ans de l'âge légal de départ à la retraite, le rétablissement à 40 ans du nombre d'année de cotisations,  et une meilleure prise en compte de la pénibilité et des carrières précoces. Elle prévoit également de revaloriser le minimum vieillesse, de le conditionner à la nationalité française ou au temps de résidence en France, et de majorer les pensions de retraite pour les parents de familles nombreuses.. Bref, il s'agit là d'un retour à la case départ et d'un total déni des contraintes de financement du système sur le long terme.

La réforme Macron : suppression des régimes spéciaux et du RSI, retraites à points

Emmanuel Macron, de son côté, propose un statu quo de surface. Il ne remet en cause ni le principe de répartition, ni le paramétrage du système issu des réformes de 2010 et 2013 : que ce soit l'âge légal, la durée de cotisation ou le montant des pensions.  Mais sa proposition de basculement vers un système de comptes notionnels (appelé par abus retraite à points) change beaucoup de choses dans les faits.

Dans ce système, chaque actif dispose d'un compte virtuel qui agrège l'ensemble de ses cotisations tout au long de sa carrière. C'est ce capital virtuel qui se transforme en droit à la retraite grâce à un coefficient de conversion. Ce coefficient est modulé en fonction de l'âge de départ à la retraite, et de l'espérance de vie de chaque génération au moment de son départ à la retraite.

Tout cela revient à supprimer les régimes spéciaux et le RSI,  en créant un cadre universel, identique que l'on soit fonctionnaire, salarié du privé, ou indépendant.

Le départ à 62 ans deviendrait purement théorique

Ce système incite ensuite à travailler plus longtemps, puisque plus l'âge de retraite est décalé, plus la pension est élevée. Et cette incitation est d'autant plus forte que l'espérance de vie augmente, puisque le rallongement de l'espérance de vie tend à diminuer le coefficient de conversion. Autrement dit, le maintien à 62 ans de l'âge légal devient très théorique. Et les gouvernements n'auraient plus à légiférer sur l'épineuse question de l'âge de départ.

Ce système crée enfin une incertitude sur le montant des pensions à terme, puisque le candidat propose un étalement sur 10 ans de sa réforme. Le distinguo entre la fonction publique qui retient les 6 derniers mois de rémunération hors prime, et le privé qui retient les 25 meilleures années de salaire,disparaît dans ce système. Les modalités de revalorisation du taux de conversion, fixé de sorte à équilibrer en permanence le système, créent aussi une forte incertitude sur la trajectoire future du pouvoir d'achat des retraites.

Le futur psychodrame ?

Difficile, dans ces conditions, et alors que la réforme Macron doit s'appuyer sur une longue concertation, de dire qui seront les gagnants et perdants. Mais indéniablement, une redistribution s'opérera. Et cet élément en apparence très technique du programme d'Emmanuel Macron pourrait bien être le psychodrame n°1 de son quinquennat.

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Commentaires 19
à écrit le 05/05/2017 à 14:23
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Les comptes notionnels de Macron sont dramatiques pour tous les salariés. Les retraites seront très fortement diminuées et imprévisibles chaque année. On est loin des 25 meilleures années. C'est en gros le capital accumulé pour la pension divisé par ...

à écrit le 03/05/2017 à 22:54
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Aujourd’hui, il y a presque 14 millions de retraités....rendez vous compte ce que cela représente en effort financier chaque mois ...en sachant que la France emprunte pour cela ! Que va t il se passer lorsque les équilibres ne seront plus là ...?

le 05/05/2017 à 11:04
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Ce sont les cotisations des actifs qui financent les retraites et les retraités ont été des actifs. La solution pour le gouvernement est donc de réduire le chômage promesse non tenue de Mr Hollande

à écrit le 03/05/2017 à 15:34
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"Et cette incitation est d'autant plus forte que l'espérance de vie augmente" Cette esperance de vie est calculé à chaque fois sur la population de baby-boomer très nombreuse nées dans les années 45/55 ,ceux qui ont pu au contraire partir plus tôt...

à écrit le 03/05/2017 à 14:34
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E Macron ne propose t-il pas un système similaire à ceux de Arrco et Agirc ? Je n'ai pas vérifié en détail mais il me semble que ces retraites sont gelées depuis trois (?) ans et qu'à partir de 2018 (?) elles seront indexées à "inflation -1" (sans pe...

le 03/05/2017 à 15:48
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@Bernardino Le régime par points est le mécanisme de calcul de la retraite utilisé par les régimes de retraite complémentaires.Au lieu de calculer la retraite comme un pourcentage du revenu moyen, ces régimes attribuent aux assurés un certain nomb...

le 03/05/2017 à 18:47
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@la chose Je connais très bien les mécanismes que vous décrivez. Quand j'ai commencé à travailler, il semble me souvenir qu'on payait 120% pour 100% pour le calcul des points Arrco/Agirc et ensuite la cotisation a été augmenté à 125%. On peut donc ...

le 07/05/2017 à 14:15
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Si on veut homogénéiser les système de retraite, l'Etat va devoir introduire les primes (15% du salaire en moyenne) dans les salaires et donc dans les retraites pour les fonctionnaires ainsi il ne sera plus nécessaire de prendre les 6 derniers mois d...

à écrit le 03/05/2017 à 13:37
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Chacun essaie d'enfumer à sa manière. Le but recherché est de payer le moins possible de retraite, car les fonds collectés sont utilisés à d'autres fins. Le régime Hollande n'a fait que créer plus de pauvres en gelant toutes les retraites pendant son...

à écrit le 03/05/2017 à 13:22
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Suite. Je précise que tout cela est expliqué dans la note n°6 du conseil d'analyse économique, et qu'il est URGENT d'appliquer cette note. Il faut militer pour la faire connaître et l'expliquer.

à écrit le 03/05/2017 à 13:16
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Le problème des retraites est effectivement le problème essentiel. Il faut répartir le financement des retraites sur le travail sous forme de cotisations sur les salaires, et sur la consommation, sous forme de TVA sociale et de taxe sur l'énergie. L'...

à écrit le 03/05/2017 à 12:45
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REDUIRE LES ECARTS DANS LES RETRAITES ET UNE BONNEI IDEE DEPUIS LONGTENT. LE REGIME DES FONCTIONNAIRES SE SONT BIEN SUCREE SUR LE DOS DES BOITE PRIVES IL ET TEMP DE REMETTRE DE L ORDRE DANS CES INJUSTICES QUI COUTE CHERS AU CAISSES ET QUI LES ONT MIS...

le 03/05/2017 à 15:39
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" LE REGIME DES FONCTIONNAIRES SE SONT BIEN SUCREE SUR LE DOS DES BOITE PRIVES " Surtout les cadres , comme dans le privé d'ailleurs.Pour les non-cadres qu'ils soit du privé ou du public ce sera une peite retraite ni plus ni moins. On peut rapp...

à écrit le 03/05/2017 à 12:38
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L'un nous fait entrer sans le monde de l'abstrait avec l'UE de Bruxelles alors que l'autre veut nous remettre les pieds sur "Terre"! La France est une "mutuelle" qui se transforme en entreprise privée!

à écrit le 03/05/2017 à 12:35
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L'un nous fait entrer sans le monde de l'abstrait avec l'UE de Bruxelles alors que l'autre veut nous remettre les pieds sur "Terre"! La France est une "mutuelle" qui se transforme en entreprise privée!

à écrit le 03/05/2017 à 11:57
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vous oublier de preciser que Mr macron va augmenter de 1.7% la CSG pour les retraites donc une perte du pouvoir d'achat equivalente et ne parle pas des revalorisations pour les annees a venir ,car son mentor Mr hollande na pas revalorise les retraitr...

à écrit le 03/05/2017 à 11:30
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Tous les salariés concernés par des régimes de retraites spécifiques,fonctionnaires,SNCF,politiques,vont descendre dans la rue..Plus tous ceux qui vont de nouveau se mobiliser contre la loi travail bis de Mr Macron il devrait y avoir du travail pour ...

à écrit le 03/05/2017 à 11:26
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Vous oubliez un détail:Macron a dit que la réforme du régime de retraites prendrait dix ans.Donc suivant le bon vouloir de la CGTCFDTMEDEF on attendra sagement

à écrit le 03/05/2017 à 10:21
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Vous avez un niveau bien supérieur à ce titre digne des médias de masse. En ce qui concerne la retraite étant donné que macron redistribuera comme d’habitude les milliards aux milliardaires il est évident qu'il ne remettra pas l'individualisation...

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