Victorieuse, Marine le Pen n'est pas encore assurée d'être au second tour de la présidentielle

Le PS est le grand perdant de ce scrutin départemental, alors que l'UMP gagne des points. Si la droite et la gauche parviennent à se rassembler en 2017, la présence de Marine Le Pen au second tour n'est pas assurée. Par Jean Christophe Gallien, Professeur associé à l'Université de Paris 1

Au lendemain du premier tour des élections départementales, et alors que l'on s'interroge sur les futurs rapports de force locaux et surtout nationaux, plusieurs enseignements émergent. Première évidence, ce scrutin a d'abord été démocratiquement saccagé.
Changement de nom de l'élection, changement en profondeur du mode de scrutin, changement de la carte et du nombre des circonscriptions électorales et ultime « performance » démocratique : un vote pour élire des assemblées qui devaient disparaître et qui finalement semblent se maintenir dans l'édifice institutionnel national sans que l'on sache pour combien de temps et surtout dont ni les candidats, ni surtout les citoyens appelés à voter, ne connaissent les futures compétences !

Un édifice territorial chamboulé

L'Assemblée nationale vient seulement d'en finir, la semaine d'avant premier tour, avec l'examen, en première lecture, du projet de loi NOTRe pour Nouvelle Organisation Territoriale de la République. Le texte doit désormais faire l'objet d'une seconde lecture au Sénat, puis reviendra à l'Assemblée, le tout suivant un calendrier qui ne sera connu qu'une fois les élections départementales passées !
Plus largement c'est l'ensemble de notre édifice territorial en plein chamboulement qui tangue. Après ce premier passage devant les députés, difficile de parier sur les compétences qui seront, au final, attribuées au bloc communal, au futurs départements ou aux nouvelles grandes régions.
A défaut de contrat démocratique électoral clair, on aurait pu imaginer que la campagne se centre autour d'un débat citoyen légitime sur le devenir et le rôle des départements et leur articulation institutionnelle par rapport aux autres strates en devenir, les grandes régions et les métropoles. Rien de tout cela, on assista davantage à une hyper-dramatisation des enjeux nationaux de ces scrutins locaux, en particulier déployée par le Premier ministre Manuel Valls qui recevait comme un écho narratif de l'opposition UMP à travers ses joutes à distance mais répétées avec Nicolas Sarkozy.

Un sentiment de relégation

Face à ce déni citoyen d'une gouvernance hors sol et s'échappant du réel, au cœur d'une France en crise économique, sociale et identitaire, en particulier celle des territoires qui tentent de survivre à la désertification entre les métropoles urbaines, ceux-là même qui contribuaient nombreux à l'élection de leur conseil général, le sentiment de relégation voire d'oubli démocratique se répand sans qu'une réponse, autre que narrative, lui soit formulé. La défiance se maintient. Ce dimanche la moitié des citoyens électeurs sont passés sans s'arrêter devant les bureaux de vote de ce scrutin sans contenu.

Une défaite du PS et de Manuel Valls

De la moitié de France qui a participé au premier tour, on peut lire plusieurs enseignements. C'est d'abord une défaite du Parti socialiste et en particulier du Premier ministre, Manuel Valls, tellement monté en première ligne que ce résultat tant en terme de suffrages que d'éliminations au premier tour est forcément aussi le sien. Que dire, à gauche, des autres partis presqu'en voie de disparition départementale.

Une première réussite pour Sarkozy, Juppé improvise

A droite, Nicolas Sarkozy, l'UMP et leurs alliés UDI et MODEM retrouvent des couleurs positives qu'il leur faudra transformer en présidences dimanche prochain. Il s'agit là, indiscutablement, d'une première réussite pour un ex Président de la République qui distance ainsi ses adversaires déclarés à la future primaire. L'intervention, que l'on peut qualifier d'improvisée, d'Alain Juppé dans la foulée immédiate de celle du Président de l'UMP comme pour revendiquer sa part de succès notamment dans la dynamique d'union en disait beaucoup.
Marine Le Pen et le Front national, s'ils n'atteignent pas les sommets prédits par les sondeurs, poursuivent, sur un terrain départemental traditionnellement hostile, leur impressionnant déploiement territorial tout en confirmant de réels attributs de second tour sur leurs places fortes, sans oublier une intense capacité de nuisance triangulaire.
En portant plus loin notre regard vers 2017, François Hollande et Nicolas Sarkozy marquent tous les deux des points en direction respectivement de leurs potentiels alliés, des gauches pour le premier, et du centre pour le second : la victoire est possible à condition d'être unis dès le premier tour ! Et c'est là la seule mauvaise nouvelle pour Marine Le Pen de ce premier dimanche départemental. Une place au second tour de la présidentielle n'est pas encore assurée.

Jean Christophe Gallien
Professeur associé à l'Université de Paris 1 la Sorbonne
Membre de la SEAP, Society of European Affairs Professionals

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Commentaires 4
à écrit le 24/03/2015 à 16:01
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La possibilité que le FN ne soit pas au 2° tours de la présidentielle ne peut reposer que sur la non participation du front de gauche à celle ci , et implique une telle redistribution du champ électoral que cela n est pas possible , sauf à revenir au...

à écrit le 23/03/2015 à 12:24
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Opposer la République à la Nation comme le fait Vals avec son front républicain contre front national est très dangereux. D'autant plus que le "front républicain", composé de familles politiques nombreuses, se comporte comme prédateurs (argent + pouv...

à écrit le 23/03/2015 à 10:49
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Une véritable opposition est déjà un succès pour les français! Et, la lutte contre la disparition des départements est devenue une résistance a ce que l'UE de Bruxelles nous impose!

à écrit le 23/03/2015 à 10:44
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On constate que ce n'est pas le département qui est a l'origine du milles-feuilles administratif mais simplement ce que l'on a rajouté par la suite pour soi disant "décentraliser"!

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