Paroles d’experts : La responsabilité du chef d’entreprise face aux risques nouveaux ou en croissance

Les dirigeants des petites et moyennes entreprises sont souvent mal informés sur les nouveaux risques qu’ils encourent dans le cadre de leur activité. La Tribune et AXA ont mis en place un cycle de conférences pédagogiques qui se déroule dans six villes. Troisième étape : Strasbourg

La Chambre de Commerce et d'Industrie de Strasbourg et du Bas-Rhin a accueilli, hier matin, la troisième conférence du cycle Paroles d'Experts, instauré en partenariat par La Tribune et AXA Entreprises. Frédéric Coppin et Jean-Claude Hinault, les deux intervenants d'AXA Entreprises, ainsi que Paul Adam, chef d'entreprise invité pour partager son expérience, ont débattu pendant une heure trente devant une cinquantaine de participants, lors du débat portant sur « la responsabilité du chef d'entreprise face aux risques nouveaux ou en croissance ».

                           

De nouveaux risques dont la fréquence augmente

Face à un monde en pleine mutation, les chefs d'entreprise sont confrontés à de nouveaux risques. « Le tissu économique global de notre région est composé à 90% de petites entreprises, dans lesquelles le dirigeant doit souvent suppléer plusieurs postes, la gestion du risque n'est donc souvent pas sa priorité. Pour pallier  cela, notre Chambre de Commerce et d'Industrie mène beaucoup d'actions de formation, de prévention et d'information, à leur encontre », a précisé Christian Geissmann, trésorier de la CCI de Strasbourg et du Bas-Rhin en introduction de notre débat.

Il est aujourd'hui assez difficile, pour un dirigeant de PME de se tenir informé au jour le jour de l'évolution de la réglementation, des nouveaux risques, et surtout de connaître les couvertures qui existent. « C'est la raison pour laquelle notre réseau d'agents généraux et d'intermédiaires est là pour les rencontrer et les mettre en garde contre les sinistres qui risquent de porter atteinte à leur activité », précise Frédéric Coppin, directeur de la région Nord-Est d'AXA Entreprises. Parmi les nouveaux risques en augmentation : le cyber risque, le risque environnemental et le risque d'image.

 

Une protection nécessaire du dirigeant

A coté de ces nouveaux risques, qui touchent toutes les activités, un point essentiel pour les chefs d'entreprises concerne la protection de leur patrimoine propre. En effet, de plus en plus souvent, la responsabilité personnelle du dirigeant est mise en cause en cas de problème avec un tiers. « Si un salarié est lésé et se retourne contre son entreprise, il attaquera de plus en plus souvent en parallèle son dirigeant », précise Frédéric Coppin. Plusieurs cas précis ont été explicités par Jean-Claude Hinault, agent général AXA à Nancy. Ainsi un salarié qui a mis en cause le dirigeant de son ancienne société dans laquelle il avait été victime de harcèlement moral de la part d'un supérieur hiérarchique. Mais aussi le cas d'une veuve qui a attaqué le chef d'entreprise de son époux décédé car ce dernier n'avait pas été affilié aux caisses de retraite des cadres. « Elle a gagné en justice et les dommages et intérêts que le dirigeant a du régler sur son patrimoine propre dépassaient les 200 000 €, cette somme a été prise en charge intégralement par notre contrat », précise Frédéric Coppin. Outre ces jugements en civil, en cas d'accident grave, la responsabilité du dirigeant peut être mise en cause au pénal. Les contrats de responsabilité des dirigeants couvrent également contre ce risque et prennent en charge les frais de justice. A noter : ce type de couverture assure le chef d'entreprise mais aussi les autres dirigeants si la société en compte plusieurs.

 

Un risque environnemental et un risque d'image à ne pas négliger

Ces deux risques ont été abordés par nos experts, car ils sont de plus en plus répandus. « Ils impliquent des sinistres avec des fréquences peu importantes, mais en terme d'intensité ils sont très graves et peuvent mettre en péril la pérennité de l'entreprise », explique Jean-Claude Hinault.

Le risque environnemental est souvent mal perçu par les chefs d'entreprise, persuadés qu'il ne touche que les entreprises industrielles « à risque ». Or aujourd'hui, la loi impose le principe de « pollueur-payeur », même si aucun dommage n'a été fait sur un tiers. Ainsi, Jean-Claude Hinault a cité l'exemple d'un de ses clients, dont une cuve contenant des produits toxiques avait fuit dans le sol du bâtiment de l'entreprise. « Cette dernière a du enlever 25 mètres de terre sur 3 mètres de profondeur, puis faire dépolluer ses sols, et ce sans qu'aucun dommage n'ait été subi par un tiers, puisqu'il s'agissait de son site. Heureusement le chef d'entreprise avait souscrit un contrat spécifique, sinon il aurait du payer le coût de cette dépollution, son assurance en responsabilité civile ne pouvant pas être actionnée dans ce cas », précise-t-il.

L'autre risque est celui qui peut frapper l'image de l'entreprise suite à un incident grave. « Avec la médiatisation de plus en plus forte et l'augmentation du nombre de sites d'informations sur Internet, la réputation d'une entreprise peut être durement frappée si son dirigeant réagit mal face à une crise. Une gestion efficace de l'image de l'entreprise lui évite d'afficher une image négative », explique Frédéric Coppin.

 

Le cyber-risque, frappe toutes les sociétés

Paul Adam, dirigeant d'ITL, société de gestion de base de données, a apporté des exemples concrets dans le cyber risque. « N'importe quelle entreprise qui dispose de matériel informatique peut être touché par ce risque. Il faut que les dirigeants prennent conscience que cela n'arrive pas qu'aux autres », martèle-t-il. « Il n'y a pas encore eu de gros krach à l'échelle nationale, mais je pense que toutes les entreprises, à un moment donné, auront à faire face à un incident majeur, ne serait-ce qu'une panne importante d'Internet qui pourrait avoir des conséquences importantes pour une personne qui ne l'a pas prévue », confie-t-il. Ce témoin professionnel a fait partager sa propre expérience : malgré la mise en place d'un protocole de sécurité très important et précis, signé par tous les salariés et intervenants extérieurs à l'entreprise, sa société a été victime d'un virus qui a touché le logiciel de comptabilité. Il a été introduit via une clef usb apportée par le stagiaire de l'expert-comptable, qui n'avait pas respecté la procédure. Autre exemple, toujours mis en lumière par Paul Adam, la convocation par Hadopi d'un dirigeant donc l'un des salariés avait téléchargé un film sur son ordinateur depuis la connexion wifi de l'entreprise.

Pour faire face à ces nouveaux risques, les assureurs ajustent leurs contrats. « Il y a une dizaine d'années, nous ne couvrions que les dégâts propres au matériel en cas de casse ou de destruction d'ordinateurs, désormais nous couvrons l'immatériel », explique Jean-Claude Hinault. Car c'est aujourd'hui sur ce segment que les coûts d'un sinistre explosent. « En cas de piratage de données commerciales, la loi oblige l'entreprise à notifier ce vol à chaque personne, cela coûte 120 € par client, un tel sinistre peut donc mettre en péril la trésorerie d'une société si elle n'est pas couverte », explique Frédéric Coppin.

 

Un débat utile pour la prise de conscience

Au terme du débat, le maître mot de chacun des intervenants a été d'inciter les chefs d'entreprise à anticiper ces nouveaux risques. « C'est la chose la plus importante aujourd'hui, car il vaut toujours mieux prévenir que guérir. J'incite tous les dirigeants à mettre en place un exercice de « krach-test », en simulant ce qui se passerait si le système informatique ne fonctionnait plus par exemple. C'est seulement lorsque il est bien couvert qu'un chef d'entreprise a l'esprit libre et peut bien faire son travail », affirme Paul Adam.

Pour l'intégralité de ces nouveaux risques, civil et pénal pour le chef d'entreprise, environnemental, d'image ou cyber-risque : « ce sont des sujets qu'il ne faut pas minorer ou mettre de côté, c'est la raison pour laquelle, lorsque nous faisons le point avec un client, nous balayons avec lui l'ensemble des risques auxquels peut être confronté sa société, pour lui proposer des garanties adapté à son activité, ensuite, à lui de choisir », note Jean-Claude Hinault.

Le plus important, surtout en période de crise : la prise de conscience de certains sujets très importants par les dirigeants, « au cours de ce débat, beaucoup ont découvert le montant des préjudices qu'ils pouvaient avoir à prendre en charge, en cas de sinistre, la pérennité de leur entreprise peut donc être mise en péril », conclut Frédéric Coppin.

 

                                                                                                          Marie Pellefigue

 

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