Keople veut lever les freins liés au numérique

La start-up Keople veut acculturer le monde de l'entreprise au numérique. Un défi relevé par la Banque Populaire Atlantique qui a diagnostiqué ses 1500 salariés. Résultat : Une cartographie des compétences va lui permettre d'emmener l'ensemble du personnel dans l'ère de la digitalisation.
Séverine Pirault, co-fondatrice de la société de conseil en tactique digitale Intuiti veut aider les entreprises à passer au numérique.

"Il y a urgence! La France est très en retard. Le niveau de culture numérique est assez faible. A tel point qu'il constitue un vrai danger pour les entreprises", estime Séverine Pirault, créatrice de la start-up nantaise Keople qui vient de lancer un concept d'apprentissage du numérique dédié au monde du travail. "Il s'agit d'identifier, de valoriser et d'enrichir la culture de chaque collaborateur - dirigeants compris- et par extension celles des organisations professionnelles, qu'elles soient privées ou publiques", explique Séverine Pirault, co-fondatrice de la société de conseil en tactique digitale Intuiti, il y a dix ans. Une expérience qui lui a permis de mûrir son projet d'acculturation.

"Aujourd'hui, la prise de conscience est générale", constate-t-elle. De fait, c'est l'un des enjeux de Google qui, à sa manière, s'est mis en tête d'évangéliser les PME, TPE, artisans et commerçants avec son "Google pour les pros", dont l'objectif vise à faire rentrer dans le rang du numérique plus de 200 000 professionnels d'ici fin 2015.  "En 2012, 47% des salariés de l'Union Européenne se déclaraient incompétents dans l'utilisation des outils numériques. Or, désormais, 90% des emplois nécessitent la connaissance d'Internet et des outils informatiques", observe Séverine Pirault.

"Le manque de compétences numériques fait chuter la productivité des entreprises de 8%. Pour 1000 salariés, cela représente un coût de plus de 3 millions€ par an. Ce sont chaque mois, 5h40 de perdu par salarié, qui passe en moyenne 35 minutes par semaine à résoudre un problème d'ordinateur" , indique-t-elle.

 Une remise en question globale de l'entreprise

 "Aujourd'hui, la France compte 80%  d'utilisateurs d'internet. Le taux d'équipement en tablette a été multiplié par quatre entre 2011 et 2013, celui des Smartphones par six depuis 2008. 59% des français achètent en ligne... Entre 2006 et 2012, les services bancaires ont été multiplié par trois", égrène la fondatrice de Keople en s'appuyant sur les données cabinets spécialisés (Cap Gemini, Mit, Mc Kinsey, Syntec Numérique, groupe Open).

Si l'utilisation est une chose, la pratique, souvent empirique, et la compréhension en sont une autre. "Donner des moyens, outiller... sont indispensables, mais reste insuffisant. Il faut une remise en question globale de l'entreprise. Penser différemment, prendre des risques, faire confiance... Un long parcours attend les entreprises...", prévient Séverine Pirault.

Une première à la banque Pop

Dans l'Ouest, la Banque Populaire Atlantique est la première entreprise à s'engager dans une démarche d'envergure pour connaître le niveau de culture numérique de ses  mille cinq cents employés. "Nous sommes dans un secteur où la matière première est directement confrontée à la digitalisation.  Les manipulations de chèques et de billets diminuent de -5% par an au profit du traitement digital. De plus, avec la création de la  banque à distance, de la fiabilité des opérations et la multiplication des outils de gestion...,  ces nouvelles pratiques sont entrées dans les mœurs et  le nombre de visite en agences a été divisé par trois. On voit arriver une vague! Alors, si l'on n'apprend pas à nager à nos collaborateurs, ils vont couler!", explique Olivier de Marignan, directeur général de la Banque Populaire Atlantique (BPATL), lauréate trois années de suite du Prix de l'innovation décerné en interne par le groupe BPCE (Banque Populaire Caisse d'Epargne).

Ici, à la BPATL, avec le déploiement de la signature électronique, de concepts de vente sur tablette, d'agences restructurées pour revisiter la relation client..., on s'estime plutôt en avance dans le secteur bancaire. Si 60% du business a toujours lieu en agence, la part grandissante du numérique impose une certaine agilité d'esprit, l'apprentissage de nouveaux points de repères... "Car, pour une raison ou une autre, les ruptures peuvent être nombreuses dans la relation client avec le consommateur", dit-il.

Avec l'aide de Keople qui a développé un algorithme et une solution en mode SAAS, autrement dit la mise en œuvre d'un logiciel collaboratif en ligne, la Banque Populaire a lancé des "digidiagnostics" auprès de l'ensemble du personnel. Signe du besoin ressenti, 95% s'est volontairement prêté à cette évaluation.

Un investissement lourd et pas anodin

L'opération, destinée à mesurer le profil numérique individuel et la maturité de l'entreprise, durait 1h30 pour les collaborateurs et 2h30 pour les dirigeants. Résultat... pas de classement, mais une répartition par catégories (les dubitatifs, les spectateurs, les enthousiastes et les geeks, "ceux qui savent") et un compte rendu individuel remis en main propre. "Et surtout une vraie cartographie des compétences qui permet à la DRH de dessiner les plans de  formations à  deux, trois et quatre en relation avec les besoins exprimés", se réjouit Olivier de Marignan. "Cela dit, je n'ai pas signé le chèque tout de suite. Il a fallu que je réfléchisse. C'est une démarche ni neutre ni anodine. C'est un investissement lourd dans toutes les dimensions du terme. Mais un investissement structurant au long cours qui engage la banque", dit-il, encouragé par le nombre de signatures électroniques passé de 10% à 40% en 2014.

"L'évolution technologique va très vite. C'est vertigineux. Alors il est impératif d'élever le niveau d'appréciation digitale des collaborateurs.  Mon angoisse, maintenant, est d'emmener 1500 personnes sur les chemins du numérique sans en perdre en route", ajoute Olivier de Marignan.

Ce sera aussi l'enjeu de Keople qui, en déverrouillant les freins envers le numérique pour donner les moyens au collaborateur d'entrer dans l'ère numérique et améliorer l'innovation et la compétitivité des entreprises, affine un prototype d'accompagnement. Expérimenté avec la Banque populaire, le système a également été déployé au Crédit Maritime (160 personnes ) appartenant au même groupe. "Nous sommes maintenant dans une phase d'industrialisation", explique la dirigeante de Keople dont la démarche a reçu le soutien de BPIFrance. Le modèle économique de la start-up repose sur la commercialisation de ce progiciel sous licence et la signature de partenariats avec des consultants. L'accueil de cette nouvelle approche déterminera le succès de cette innovation, qui on ne peut plus être dans l'air du temps.

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