Le Grand Paris, c'est parti !

Alors que le chantier du Grand Paris Express a été lancé, la métropole du Grand Paris, qui part de zéro, tente de suivre le rythme pour prouver son utilité. Mais elle manque encore de moyens et attend l'après 2017 pour, peut-être, prendre une autre ampleur.
Mathias Thépot
Patrick Ollier (LR)

Cette fois, c'est parti ! Le « Grand Paris », soit le nouveau nom communément donné à l'agglomération parisienne, est en train d'enclencher sa mue. Le 4 juin dernier, à Clamart, le fameux chantier du Grand Paris Express, surnommé le « chantier du siècle », a en effet été lancé. Il représente un investissement de 25 à 30 milliards d'euros jusqu'en 2030, ce qui permettra de créer 200 kilomètres de lignes de métro en Île-de-France, et 68 nouvelles gares dans la région capitale. C'est sur ce projet de mobilité que le Grand Paris va s'appuyer pour se structurer et développer son attractivité.

L'Île-de-France, moteur de la reprise

D'ores et déjà, on pourrait presque dire qu'il draine avec lui de nombreux projets d'urbanisme. Grand Paris aménagement, le principal aménageur public francilien, conduit notamment près de 60 opérations d'aménagement dans toute l'Île-de-France. Et en matière de construction de logements, la région est devenue l'élément moteur de la reprise en France. Environ 75 000 permis de construire ont été accordés au cours des douze derniers mois, et le nombre de mises en chantier atteint son plus haut niveau depuis le début du siècle, soit 67.300 unités, en hausse de 25,8% sur un an. Les objectifs fixés en 2010 dans la loi relative au Grand Paris - 70.000 logements construits par an - sont donc presque atteints, même s'il faudra vraisemblablement aller au-delà, au regard du poids démographique de l'Île-de-France - 18% de la population métropolitaine - et de la demande de logements encore insatisfaite.

Ces signes, très visibles pour les Franciliens, sont révélateurs de la montée en puissance du Grand Paris. Du reste, pour organiser tous ces projets en cohérence avec les besoins des différents territoires, le développement du volet institutionnel de l'agglomération, la métropole du Grand Paris (MGP) - qui a été lancée le 1er janvier 2016 et a élu pour président le député-maire de Rueil-Malmaison, Patrick Ollier (LR) -, reste prépondérant. On attend en effet beaucoup de cette métropole, dont l'une des missions est de limiter les déséquilibres territoriaux qui sont très forts, notamment au sein de la petite couronne parisienne.

Pourtant, la création de ce nouvel échelon territorial fait déjà face à de nombreuses critiques, notamment concernant ses compétences - la MGP partage la compétence économique avec la région Île-de-France -, et son périmètre, plus restreint que celui du Grand Paris Express (GPE). Il se limite à Paris et aux trois départements de la petite couronne (Hauts-de-Seine, Seine-Saint-Denis, Val-de-Marne), et à une demi-douzaine d'autres communes... mais oublie notamment l'aéroport Roissy-Charles-deGaulle, Versailles, Eurodisney et Saclay.

Du reste, c'est surtout le principe même de l'existence de la métropole qui est remis en question. En effet, l'Île-de-France compte déjà quatre échelons de collectivités locales : les communes, les intercommunalités, les départements et la région. L'ajout d'une nouvelle strate irrite les plus fervents défenseurs de la simplification administrative, qui craignent l'émergence d'une « usine à gaz ». D'autant que l'assemblée métropolitaine est composée de 209 conseillers métropolitains... soit le même nombre qu'au conseil régional ! D'ailleurs la présidente de la région, Valérie Pécresse (LR), répète régulièrement à qui veut l'entendre que la bonne échelle métropolitaine est celle de la région, et non celle de Paris et des trois départements de la petite couronne. Elle prônait même récemment la suppression pure et simple de la métropole, dans le cas où la droite s'imposerait l'année prochaine lors des élections présidentielle et législatives.

Or, lorsque l'on sait que la voix de Valérie Pécresse comptera pour les primaires de droite du mois de novembre, il y a quoi déstabiliser les équipes qui construisent la MGP. Sur la défensive, Patrick Ollier - qui entretient de bonnes relations avec Valérie Pécresse - préfère rejeter la responsabilité sur les épaules du gouvernement qui aurait fait, selon lui, « une erreur majeure » lorsqu'il a créé les treize nouvelles super-régions en

2015. Il aurait en fait dû « agrandir le périmètre de l'Île-de-France », juge Patrick Ollier. Ainsi, les champs d'action respectifs de la région et de la métropole du Grand Paris se seraient moins entrechoqués.

« Rééquilibrage et solidarité » territoriale

Dans ce contexte extérieur pesant, Patrick Ollier n'a d'autres moyens que de prouver à tous l'utilité de son institution. Pour ce faire, il faut du concret, et vite. C'est pourquoi le budget 2016 de la métropole - 65 millions d'euros - est alloué au fonds d'investissement métropolitain. Grâce à un observatoire financier piloté par Gilles Carrez (LR), deuxième vice-président de la métropole délégué aux finances, le fonds devrait soutenir dès cette année les territoires qui ont le plus de difficultés à investir. Cette action s'inscrit dans une optique de « rééquilibrage et de solidarité entre les territoires de la métropole », explique Patrick Ollier, qui assure par ailleurs qu'« avant la fin de l'année, des subventions de la métropole seront débloquées pour soutenir l'investissement ».

La métropole prend ses marques, donc. Et rapidement. Patrick Ollier aime rappeler que le préfet de Paris et de la région Île-de-France, Jean-François Carenco, lui a fait part de sa satisfaction quant à la montée en puissance de la métropole. Le haut fonctionnaire, qui pilote la mise en oeuvre des projets du Grand Paris pour le compte de l'État, attendait en effet un tel niveau d'avancement de la métropole en décembre, et non en mai.

100 millions d'euros pour le concours « hubs du Grand Paris »

De quoi donner un peu d'air à Patrick Ollier qui, en parallèle, lance des projets au plus long cours : en matière d'infrastructures, la métropole compte ainsi jouer un rôle moteur avec la Caisse des Dépôts et consignations dans la construction de franchissements de fleuves, routes et autres boulevards qui séparent des communes. En outre, l'institution métropolitaine va mettre en place un plan hôtelier métropolitain, et un autre de lutte contre les nuisances sonores, en aidant notamment à la construction de murs antibruit. Enfin, la MGP a lancé, sur le modèle de l'appel à projets urbains innovants « Réinventer Paris » de la capitale, un autre appel à projets nommé « Inventons la métropole ». Intéressé, l'État a en partie repris cette initiative en l'abondant de 100 millions d'euros via le programme d'investissements d'avenir (PIA), pour lancer un concours international des « Hubs du Grand Paris ». Ce concours fait appel à des talents français et internationaux pour aménager les quartiers des gares du Grand Paris Express, et est copiloté par Jean-François Carenco et Patrick Ollier. Bref, avec des effectifs réduits, la métropole du Grand Paris se retrouve avec des piles de dossiers à examiner. Mais le fait qu'elle soit associée à des projets en partenariat avec l'État lui confère tout de même une raison d'espérer. Reste qu'au regard de son manque de moyens, la métropole doit pour l'instant se contenter d'un rôle de fédérateur de projets et d'agitateur d'idées. Avec seulement 65 millions d'euros de budget la première année, elle ne peut soutenir seule le développement économique sur son territoire de compétences. Ainsi, une fois les échéances électorales de 2017 passées, elle devra évoluer, sous peine de faire donner raison à ses détracteurs.

« Il faudra un budget plus important pour la métropole », demande en premier lieu le président de la MGP.

Il pense aussi que les compétences de la métropole devront être élargies à l'avenir pour éviter les interférences, tout comme son périmètre. Enfin, alors que la métropole est aujourd'hui une entité centralisée, Patrick Ollier souhaite faire du couple commune-intercommunalité « l'élément fondateur de la métropole ». De quoi, selon Patrick Ollier, donner sens au fait métropolitain. La métropole capitale n'en a donc pas fini avec les échéances importantes. L'après 2017 sera, aussi, une période charnière pour sa mise en oeuvre.

Mathias Thépot

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