Aéroport Toulouse Blagnac : quelle est la stratégie des fonds d'investissements chinois ?

Le gouvernement a annoncé jeudi 4 décembre dans la soirée son intention de vendre à un consortium chinois 49,9 % des 60 % que possède l’État dans le capital de la société gestionnaire de l'aéroport Toulouse-Blagnac pour 308 M€. La stratégie du repreneur est encore floue, même si les collectivités ont obtenu un certain nombre de garanties.
Le gouvernement a annoncé jeudi 4 décembre dans la soirée son intention de vendre à un consortium chinois 49,9% des 60% que possède l’État dans le capital de Toulouse-Blagnac pour 308 millions d'euros.

Le consortium Symbiose, composé de deux acteurs non aéroportuaires (Shandong Hi-Speed Group et le FPAM Group) associés au canadien SNC-Lavalin, a été choisi par le gouvernement pour racheter 49,9% des parts d'ATB, la société de gestion de l'aéroport Toulouse-Blagnac, au terme d'une procédure entamée le 11 juillet. Contacté, le nouvel actionnaire ne souhaite pas s'exprimer pour l'instant. Il évoque le respect de la procédure en cours (notamment la consultation des instances représentatives du personnel de l'aéroport). On sait cependant que plusieurs exigences des collectivités locales auraient été satisfaites.

Ce qu'obtiennent les collectivités

Le maire de Toulouse, qui a organisé un point presse "informel" au Salon rouge du Capitole ce matin, se dit  "vigilant". Mais Jean-Luc Moudenc est également prêt à "faire confiance" au nouvel actionnaire "pour la bonne raison qu'ils ont répondu favorablement aux exigences édictées par les quatre collectivités (Métropole, CCI, Région et Département NDLR)". Le 21 novembre, les collectivités actionnaires ont rendu un "avis" à l'Agence des Participations de l'État, pour demander aux quatre candidats alors en lice derespecter certains engagements : le développement de l'aéroport au-delà du seul rachat, des garanties à long terme sur le foncier dédié à Airbus, des investissements au profit du territoire (futur Parc des expositions), la recherche d'une modération des nuisances, la pérennisation de l'équipe de direction en place et le maintien des conditions de travail de tout le personnel.

Les actionnaires locaux ont aussi obtenu "une gouvernance équilibrée", se félicite Jean-Luc Moudenc. "Le nouvel actionnaire ne décidera rien tout seul, car il faudra une majorité qualifiée pour prendre les décisions stratégiques". Sur les quatre candidats, trois répondaient à ces critères selon l'édile toulousain. Les fonds chinois se seraient par ailleurs engagés àfinancer le Parc des expositions à hauteur de plusieurs dizaines de millions d'euros. L' information est confirmée par Jean-Luc Moudenc, mais il n'a pas donné plus de détails.

L'État s'engage à ne pas vendre les 10%

Si les investisseurs chinois deviennent l'actionnaire principal d'ATB, sur le papier, la majorité reste publique avec 50,1% des voix, puisque Emmanuel Macron s'est engagé à ne pas vendre les 10,1% restants des parts de l'État. Une exigence des collectivités locales qui réaffirment ce vendredi matin leur vigilance. "La question de la majorité publique reste néanmoins posée de par la nature de la relation entre l'État et le consortium privé, rappelle Pierre Izard, le président socialiste du Conseil général de Haute-Garonne. Car dans une entreprise, la majorité dépend plus des accords passés entre les actionnaires que de la répartition des actions."

Une entente aurait-elle été nouée entre le consortium chinois et l'État pour laisser aux fonds d'investissement le contrôle de la stratégie ? C'est ce que croit savoir un connaisseur du dossier qui affirme : "une clause va être signée entre le consortium et l'État pour que ce dernier vote comme lui."

"C'est juridiquement impossible, rétorque Jean-Louis Chauzy, le président du Ceser. Et ce serait très grave que l'État s'aligne sur un repreneur privé étranger". Un tel "pacte" serait "étonnant" réagit pour sa part un cadre bancaire régional.

Rétrocession de 16%

Le consortium Symbiose a annoncé son intention de rétrocéder "à un investisseur français ou local" une partie des 49,9 % du capital qu'il va acquérir, à hauteur de 16%. Regrettant le choix d'une offre "qui n'est pas la meilleure au regard de nos attentes économiques et sociales", Bernard Keller, le maire de Blagnac, demande à voir concernant la proposition de rétrocession. "Si le consortium tient sa promesse, tant mieux. Dans le cas contraire, nous pourrons douter de leurs autres engagements, analyse le vice-président de Toulouse Métropole en charge de l'Aéronautique. Je suis favorable à ce qu'un groupe
d'investisseurs locaux industriels et bancaires se mette en place."

Les collectivités pourraient-elles donc se porter acquéreurs de ces 16% ? "Hors de question" pour Jean Luc Moudenc, qui évoque le manque de moyens de Toulouse Métropole. Une hypothèse pourtant étudiée par Martin Malvy dont l'objectif principal est le maintien d'une majorité publique : "Soit l'État garde les parts qu'il possèdera encore, soit le candidat désigné cède une partie de celles qu'il va acquérir. Je suis prêt à étudier cette hypothèse avec les autres collectivités locales, la Chambre de commerce et d'industrie et le réseau bancaire régional, voire d'autres investisseurs. Nous pourrions nous réunir au tout début de la semaine prochaine pour faire avancer une réflexion déjà engagée sur la base d'un consortium ou d'un pacte d'actionnaires en y associant l'État." Après avoir rassemblé plus de 18 M€ de promesses d'investissements dans son opération "Rachetons l'aéroport de Toulouse", Thierry Merquiol, le cofondateur de la plateforme de crowdfunding Wiseed, devrait "faire une offre" au président du Conseil régional.

Pour Alain Di Crescenzo, président de la CCI "la cession d'une partie des 49,9% est une opportunité donnée par Symbiose pour réaliser un pacte local qui pourrait détenir, si le montage financier et juridique l'autorise, la majorité du capital et des droits de vote d'ATB. La CCI de Toulouse travaille activement sur cette possibilité et nous sommes d'ores et déjà en contact avec des investisseurs."

Parmi eux justement, Banque Populaire Occitane se montre déjà intéressé. "Si les collectivités locales, et en premier lieu la Chambre de commerce et d'industrie de Toulouse, veulent acquérir une part des actions acquises par le consortium, BPO sera présente, confirme Alain Condaminas, le directeur général de BPO. L'aéroport de Toulouse est le poumon de la région. Nous ne sommes pas intéressés par le rendement mais par la gouvernance au sein d'ATB. Les acteurs locaux devront pouvoir prendre part aux décisions stratégiques concernant la gestion du foncier notamment."

Procédure et calendrier

Avant de confirmer la vente à ce repreneur "pressenti" par le gouvernement, une procédure de consultation des instances représentatives des salariés va être mise en œuvre. "Nous ne connaissons pas encore le contenu de l'offre, relève Patrick Gaudicheau, délégué
syndical CFDT. Les représentants de Symbiose viendront la présenter au Comité d'entreprise à une date indéterminée pour l'instant. L'APE a envoyé un courrier confirmant le maintien du directoire et la sauvegarde des emplois et de l'intéressement pour les salariés."

Après la consultation des salariés, viendront la rédaction des statuts et la mise en place d'un pacte d'actionnaires. Ce contrat qui lie entre eux les différentes actionnaires, et qui doit permettre d'éviter la perte de contrôle de l'une ou l'autre des parties, est un document souvent confidentiel.

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Commentaires 22
à écrit le 06/12/2014 à 19:58
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Et notre gouvernement, ils ne veulent pas l'acheter ? Parce que les soldes commencent bientôt...

à écrit le 06/12/2014 à 14:50
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Beaucoup de ceux qui nous gouvernent et vendent nos richesses ne sont pas élus et comme il n'y a plus d'Etat la France part en vrille.

à écrit le 06/12/2014 à 11:06
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A propos, puisqu'on parle aéroport, compagnies aériennes, le site AirlineRatings, spécialisé dans l'évaluation de la sécurité aérienne, a publié cette semaine son palmarès 2015. Parmi les 10 meilleures compagnies au monde ne figurent que deux europée...

à écrit le 06/12/2014 à 10:29
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Vu l'avenir économique de la France, je ne suis pas certain que le trafic aérien dans ce pays sera en plein essor moi. Drôle d'investissement que les Chinois font là. A moins que ce soit dans l'idée d'avoir la main mise sur nos sites stratégiques, do...

le 06/12/2014 à 18:45
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la FRANCE n'a plus d'argent alors il brade notre patrimoine normal;

à écrit le 06/12/2014 à 8:45
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avec valls comme premier ministre c'était sûr, il préfère le Barça, donc la France il n'en a rien à cirer.

à écrit le 05/12/2014 à 23:18
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Hollande dégage !

à écrit le 05/12/2014 à 23:08
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L’application de l’article 63 du TFUE autorise les étrangers à nous acheter même si le peuple n’est pas d’accord et alors que le traité de Maastricht promettait de « faire l'Europe pour peser face aux Américains et aux Chinois ». François Asselineau ...

le 07/12/2014 à 18:16
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Bin oui, quand on dépense plus d'argent qu'on en gagne, à la fin il faut vendre les bijoux de famille.

à écrit le 05/12/2014 à 22:30
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Pour qui connait un peu l’Asie et pas seulement la Chine il y deux types de négociateurs un fin qui a une vision à long terme et le temps pour lui car sa philosophie souvent tirée de la pensée de Confucius est celle du temps, de la sagesse et d’une ...

à écrit le 05/12/2014 à 22:00
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Les Chinois vont pouvoir espionner Airbus en toute tranquillité. Ils n'en n'ont rien à faire de l'aéroport de Toulouse.

le 05/12/2014 à 22:45
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Synchro avec vous.

le 06/12/2014 à 12:53
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Une partie de la production d'Airbus est déjà délocalisée en Chine, et ça fait belle lurette qu'on a déjà bradé notre savoir-faire et nos brevets à nos "amis" chinois.

le 07/12/2014 à 12:23
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Tout à fait d'accord

à écrit le 05/12/2014 à 20:55
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Bonjour l'etat vend pour 300 millions € quelque chose qui fait des bénéfices !!! Remembre les autoroutes. Il a besoins d argent alors pourquoi faire cadeau d un prêt de plus de 3 milliard € fin juillet plus un autre prêt de 2 milliards € dans la foul...

le 05/12/2014 à 22:27
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Si vous saviez le nombre de riches français ayant des fortunes investies en Cote d'Ivoire vous comprendriez mieux...

à écrit le 05/12/2014 à 18:17
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Les chinois vont tout promettre et puis à la fin, c'est eux qui décident et basta. Ils vont garantir que la qualité de l'air sera même meilleur qu'avant la révolution industrielle. Ils vont mentir beaucoup mieux que les "élus" français, pourtant maî...

le 05/12/2014 à 22:29
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La différence entre les politiques français et les chinois c'est que les chinois mentent avec le sourire.

le 06/12/2014 à 8:43
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vous voulez dire qu'ils nous la mettent en douceur sans que l'on s'en aperçoive, ils sont forts.

à écrit le 05/12/2014 à 15:18
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Je suis scandalisée par ces procédés. C'est quand même nos impôts qui ont permis de construire cet aéroport!!!! pourquoi ne pas nous avoir demandé notre avis. Tout notre pays est vendu comme cela à droite et à gauche sans notre consentement. Quelle t...

le 05/12/2014 à 17:18
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Assez de ces dirigeants irresponsables et leur vision à court terme...! C'est de la haute trahison... n'est il pas...!? Je suis plus que choqué !

à écrit le 05/12/2014 à 15:11
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Apres pes petits beures BN la PSA et maintenant les loups sont rentrés dans Toulouse.....

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