Paroles d’experts : la responsabilité du chef d’entreprise face aux risques nouveaux ou en croissance

Les dirigeants des petites et moyennes entreprises sont souvent mal informés sur les nouveaux risques qu’ils encourent dans le cadre de leur activité. La Tribune et Axa ont mis en place un cycle de conférences pédagogiques qui se déroulera dans six villes. Quatrième étape : Nantes

La Chambre de Commerce et d'Industrie de Nantes Saint Nazaire a accueilli, jeudi matin, la quatrième conférence du cycle Paroles d'Experts, instauré en partenariat par La Tribune et Axa Entreprises. Philippe Gaillard et Nathalie Susset, les deux intervenants d'Axa Entreprises, ainsi que Michel Lardière, chef d'entreprise invité pour partager son expérience, ont débattu pendant une heure trente devant plus de soixante-dix participants, lors du débat portant sur « la responsabilité du chef d'entreprise face aux risques nouveaux ou en croissance ».

 

Des risques nouveaux pas toujours appréhendés

Aujourd'hui, la réglementation change régulièrement, et le développement des nouvelles technologies génère l'arrivée de sinistres inconnus jusqu'à présent. Philippe Gaillard, directeur des risques techniques d'Axa Entreprises, confie :

« Dans notre fonction d'assureur, nous rencontrons des risques qui n'existaient pas auparavant et sont en croissance. Or, nous percevons un grand décalage entre la matérialité de ces risques, et la perception que les chefs d'entreprises en ont. Beaucoup d'entre eux n'ont pas pris conscience qu'un sinistre de ce type peut mettre à mal leur entreprise »

L'objectif de la conférence, qui a eu lieu hier, était d'éveiller la conscience des dirigeants présents dans la salle, pour les mettre en garde contre les conséquences de ces nouveaux risques. Notamment ceux touchant personnellement le dirigeant, le cyber risque, le risque environnemental et le risque d'image. La conférence avait pour but de leur faire réaliser que ces risques peuvent toucher n'importe quelle entreprise, même les PME et TPE. « Les dirigeant sont souvent conscients des risques qu'ils encourent, mais leur nature optimiste, et surtout le fait qu'ils se concentrent sur le développement de leur société, font qu'ils ne se sentent pas toujours concernés », met en garde Nathalie Susset, agent général d'Axa Entreprise.

 

Un dirigeant de plus en plus souvent mis en cause

Contrairement à une idée reçue, en cas de problème majeur (accident du travail, faute de gestion,...), la responsabilité personnelle du chef d'entreprise peut être mise en cause devant les Tribunaux. Ce que savent peu de dirigeants, persuadés que leur responsabilité est limitée. « En cas de problème grave, l'entreprise est préservée et ne peut pas être appelée en responsabilité au-delà de ses fonds propres, en revanche, le chef d'entreprise peut être appelé beaucoup plus loin », explique Philippe Gaillard. Ce risque est encore plus fort dans le contexte de crise économique que nous traversons, car le chef d'entreprise est davantage exposé. « Les tiers cherchent aujourd'hui à se protéger le mieux possible, c'est la raison pour laquelle ils vont chercher la responsabilité du dirigeant, alors que dans un contexte économique favorable, ils se seraient contentés de celle de l'entreprise », affirme Nathalie Susset. Cette dernière cite ainsi l'exemple d'un cas d'accident du travail, où le salarié avait automatiquement mis en cause la personne morale et le dirigeant de l'entreprise dans laquelle il travaillait, afin d'obtenir des dommages et intérêts supplétifs.

Outre des éventuelles procédures devant les juridictions civiles, en cas d'accident grave, la responsabilité du dirigeant peut être mise en cause au pénal. Dans ce cas, il devra trouver un avocat pour se défendre, et prendre à sa charge les frais judiciaires. « Les conséquences financières d'un sinistre de ce type ne peuvent pas être pris en charge par l'entreprise, car il s'agit alors d'un abus de bien social, tous les frais sont à régler par le chef d'entreprise sur son patrimoine propre », précise Philippe Gaillard. Pour se protéger contre ce risque, des contrats de responsabilité des dirigeants paient les frais d'avocat et de procédure, mais également les éventuels dommages et intérêts. Bon à savoir : ce type de couverture assure le chef d'entreprise mais aussi les autres dirigeants si la société en compte plusieurs.

 

Des sinistres qui s'enchainent et peuvent avoir des conséquences importantes sur l'activité de l'entreprise

Outre les risques touchant les dirigeants, de nouveaux sinistres ayant trait à l'environnement, l'image, les nouvelles technologies et l'informatique existent. Quand un dirigeant n'est pas pleinement conscient des dangers qu'il encourt, il ne s'est pas préparé à y faire face, ce qui est d'autant plus grave que la plupart du temps, les risques sont liés les uns aux autres. Nathalie Susset confie : 

« Une attaque sur un système informatique peut porter atteinte à l'activité de l'entreprise, mais également provoquer un séisme chez les clients si cela s'ébruite sur les réseaux sociaux ».

Autre exemple cité, un chef d'entreprise dont l'entreprise causerait des dégâts à l'environnement serait dans l'obligation de débourser des sommes, parfois colossales, pour réparer les conséquences du problème qu'elle a créé. Car la loi impose aujourd'hui le principe de « pollueur-payeur », même si aucun dommage n'a été fait sur un tiers. Outre ce risque financier, le dirigeant peut aussi devoir gérer la crise majeure qui en découlerait.

« Avec les réseaux sociaux, une réputation peut être détruite en quelques jours, surtout si l'information est relayée par la presse locale qui peut alors mettre en une un problème ayant touché un dirigeant »

Même dans le cas d'une préparation et d'une sécurisation maximale de son activité, un dirigeant peut être touché. Cela a été le cas de Michel Lardière, dont l'entreprise spécialisée dans l'informatique, a été victime d'une cyber-attaque interne. L'un de ses salariés a piraté des données confidentielles, malgré une protection très performante de ses systèmes informatiques. Les conséquences de ce sinistre ont été relativement faibles, car le salarié n'a pas revendu les données qu'il avait récupérées. Néanmoins, cette expérience a été édifiante pour Michel Lardière, « j'ai vécu un risque de l'intérieur, alors que je partais du principe que jamais cela n'arriverait jamais chez moi », confie-t-il. Ce dirigeant a su réagir rapidement pour circonscrire le sinistre, mais ce n'est pas toujours le cas de tous les dirigeants de PME, qui sont pourtant de plus en plus visés par les pirates.

Philippe Gaillard précise :

« D'après Symantec, un tiers des attaques touche les entreprises de petite taille. Comme elles sont moins bien protégées que les grandes sociétés, il est plus facile de les pirater, soit pour leur dérober des informations, soit pour entrer dans les systèmes informatiques des grands groupes dont elles sont les fournisseurs »

 

 

Un débat utile pour la prise de conscience

Grace aux témoignages apportés, les dirigeants présents à cette conférence ont mesuré qu'il fallait anticiper ces nouveaux risques, et leurs conséquences, pour lutter efficacement contre eux. C'est encore plus vrai aujourd'hui, « chacun essaie d'optimiser ses coûts et d'orienter ses dépenses vers l'essentiel, pourtant, c'est dans la période de crise que nous traversons que les risques sont plus importants », conclut Philippe Gaillard. « Il est de notre ressort d'apporter un accompagnement aux chefs d'entreprise pour qu'ils se sentent concernés », ajoute Nathalie Susset. Preuve que les assureurs ont la vocation d'intervenir également en amont pour faire de la prévention, et pas uniquement en aval pour réparer les conséquences d'un sinistre.

 

            

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