Naissance du premier GIX régional dans l'Ouest

Quatre entreprises du numérique de Nantes et Angers viennent de créer le premier GIX de l'Ouest. Baptisé OuestIX, il vise à mutualiser les coûts d'accès à l'internet et donner une relative autonomie à l'économique numérique locale. Sa réussite dépendra de l'adhésion des acteurs locaux.
Le datacenter de 2000 m² constitue un des points de présence nantais du GIX régional OuestIX.

L'ouest veut reprendre la main sur l'Internet local. Après Lyon, Toulouse, Lille, Grenoble, Strasbourg ou Nice, l'agglomération nantaise vient de se doter du premier GIX (Global Internet Exchange) régional dans l'Ouest. Créé à l'initiative de trois prestataires de services nantais (Sigma, Network Télécom & Hosting, Oceanet Technology) et l'éditeur de solutions angevin (Octave), ce nœud d'échange, appuyé sur une boucle de fibre optique de 70 km et trois POP (3 datacenters), cette structure permettant de collecter et de diffuser le trafic local a une double vocation.

Il s'agit à la fois d'éviter les aller-retours des données locales vers les Gix nationaux et internationaux pilotés par les grands noms de l'Internet (Facebook, Google, Amazon...) et de mutualiser les transits et les services offerts aux adhérents. "L'enjeu, c'est l'abaissement des coûts de connexion à l'Internet", indique une experte de Nantes Métropole. Aujourd'hui, 70% des requêtes (mail, transfert de fichiers, consultations...)  seraient locales mais transiteraient par le national et l'international. D'où la volonté de réorienter ces informations sur une boucle locale. "...pour reconquérir notre souveraineté numérique face à l'hégémonie américaine. C'est techniquement possible et économiquement rentable ... C'est surtout une question d'indépendance et de respect des libertés individuelles", affirme Christophe Clergeau, premier Vice-Président de la région des Pays de la Loire en charge du développement économique et de l'innovation, qui a financièrement soutenu cette opération à hauteur de 100.000 €. De leur côté, les communautés urbaines Nantes Métropole et Angers Loire Métropole attendaient le début de l'année 2015 pour annoncer le montant de leur participation.

Une dent creuse comblée en Pays de la Loire

Globalement, l'investissement, somme toute modeste au regard de l'enjeu, atteint 250.000 €, pris en charge à 50% par les quatre prestataires nantais et angevin et 50% par les financeurs publics, qui y voient une manière de renforcer la numérisation d'un territoire récemment auréolé du label French Tech.

Dans un contexte fortement concurrentiel où les prestataires de l'informatique et du numérique se livrent une guerre acharnée, ce modèle économique laisse perplexe certains d'entre-eux. "Soit on attend de solliciter tout le monde, soit on aide ceux qui sont prêts à démarrer. C'est un choix stratégique de la région", justifie Christophe Clergeau. Alors qu'il existe près de 140 GIX en Europe, l'Ouest faisait jusqu'ici figure de dent creuse sur la carte des GIX. A Lyon, le GIX Lyonix a été créé il y a dix ans. "Lille a eu du mal accoucher et Bordeaux n'est toujours pas créé alors on peut se féliciter qu'à Nantes, quatre entreprises concurrentes aient réussi à s'allier", observe Samuel Triolet, directeur de Rezopole (ex-Lyonix).

Dix ans après sa création, il réunit, aujourd'hui, une centaine de membres (20% d'opérateurs exogènes, 20% de datacenters et des SS2I, 20% d'opérateurs locaux, 20% de grands comptes privés et 20% d'instituions publiques). "Surtout, grâce aux dispositifs techniques offerts, ce réseau permet aux structures comme le palais des congrès de Lyon de répondre et de remporter des appels d'offres", mentionne Samuel Triolet :

"L'abaissement des coûts d'accès, l'accroissement des capacités de "peering" et les rapidités d'installation d'un système vers un autre ont un véritable impact économique sur la dynamique l'agglomération."

Pour Christophe Chapet, présent de l'association ADN (Association des Décideurs du Numérique) Ouest et directeur du bailleur social Nantes Habitat,  ce dispositif est fondamental pour le développement du numérique et de l'Internet dans l'Ouest :

 "Ce GIX va éviter de passer par Paris,  réduire les temps d'attente,  sécuriser les données, simplifier les procédures. Lors d'appels d'offres,  on pourra changer de structures ou d'opérateurs à moindre coût et limiter les frais d'accès au réseau. On parle beaucoup du Cloud, mais en France on a du mal à se mettre d'accord, alors je me réjouis de voir que des entreprises concurrentes aient réussi à s'entendre"

Une place de marché du numérique

Renforcer l'attractivité numérique du territoire, c'est l'une des attentes de la communauté nantaise où dans le cadre de la candidature French Tech, on relevait l'absence de grands opérateurs du numérique. Selon les protagonistes du GIX OuestIX, l'économie réalisée par les entreprises, notamment en raison de l'achat en commun de transit-IP, pourrait financièrement s'élever aux environs de 20%. Ou pour le moins, offrir un débit plus élevé à moindre coût. "Mais, ce nœud n'a d'intérêt que s'il produit une dynamique parmi les acteurs du numérique", reconnait Philippe Oléron, patron de l'entreprise Sigma, l'un des fondateur de l'association OuestIX, qui entend par cette dynamique favoriser la venue de grands opérateurs.

L'autre vocation de OuestIX, c'est de créer l'équivalent d'une place de marché de services numériques, une NAP (Network Access Point) en attirant le maximum de d'hébergeurs, d'opérateurs, de fournisseurs d'accès, de start-ups, de manière à enrichir et mutualiser les services.

"Le NAP va clarifier et stimuler la concurrence, estime ce dernier. La différence entre les prestataires (hébergement, téléphonie, sauvegarde, etc) ne se fera plus sur la connectivité mais dans le choix de la qualité et de la flexibilité des services".

Une manière de se différencier

"Une jolie vitrine à peu de frais... ", regrettent certains acteurs du secteur en constatant que seuls quatre de la douzaine d'opérateurs susceptibles de pouvoir rejoindre ce mouvement ont, pour l'instant, accepté d'adhérer à ce GIX. Créé dans un premier temps autour de trois POP (point de présence) situés autour de Nantes, Ouest IX devrait s'enrichir très rapidement d'un quatrième POP sur Angers. "L'objectif étant de se raccorder très vite aux autres GIX régionaux,  parisiens ou européens", indique Philippe Oléron.

Geoffroy Chevalier, patron de l'entreprise  nantaise Capvisio, spécialisée dans les solutions de visioconférence, estime :

"Le monde est poussé par le Big Data. Il est tout à fait logique que l'on aille vers ce type de services mutualisés. C'est nécessaire, mais pas suffisant. Il est temps que les besoins utilisateurs poussent dans le même sens. Que les DSI s'approprient cette ère de la digitalisation pour faire évoluer les technologies existantes.  C'est une véritable opportunité pour les entreprises, ce bouquet de services mutualisés sera une nouvelle manière de nous différencier. Entre un marché trusté par la com, la poussée du Big data, des business modèles à transformer, le GIX va permettre de faire un mix..."

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