Télécoms : le business du fixe rapporte plus que le mobile !

Le chiffre d’affaires réalisé par les opérateurs français dans les services mobiles est désormais inférieur à celui du fixe provenant, pour l’essentiel, de l’ADSL . Dix ans après le mouvement inverse, ce bouleversement tient à la guerre des prix en vigueur depuis l’arrivée de Free Mobile et non aux usages, toujours en forte hausse. Elle explique le big bang en cours dans les télécoms.
Delphine Cuny
Au premier trimestre 2014, sur le marché de détail, les services mobiles (hors ventes de téléphones) ont pesé 3,41 milliards d'euros, en recul de 13,4% sur un an, contre 3,69 milliards pour les services fixes.

Le mobile, ça eut payé... C'est un tournant historique : le chiffre d'affaires généré par les opérateurs français par les services mobiles est désormais inférieur au business réalisé dans les services fixes, essentiellement dans l'ADSL. L'inversion de la courbe est nette sur le graphique publié ce soir par l'Arcep dans son observatoire des marchés des communications électroniques à fin mars. Au premier trimestre 2014, sur le marché de détail, les services mobiles (hors ventes de téléphones) ont pesé 3,41 milliards d'euros, en recul de 13,4% sur un an, contre 3,69 milliards pour les services fixes (-1,9%). Le croisement des deux courbes s'est opéré fin 2013 et s'est amplifié. La téléphonie mobile avait dépassé le fixe (téléphonie et Internet) pour la première fois au premier trimestre 2005. Est-ce la revanche du fixe ?

Explosion des usages, chute de la facture

Ce renversement n'est pas dû aux usages, qui évoluent en sens inverse : le volume de minutes consommées sur mobile continue d'augmenter (+8% à 36 milliards de minutes sur le trimestre) mais recule dans le fixe (-11% à 25 milliards), y compris depuis les Box. Le trafic d'Internet mobile explose (+76% en un an à 56.629 téraoctets), celui des SMS croît toujours (+1,7% à 50,8 milliards). L'Arcep ne publie pas d'indicateur de trafic de données sur le fixe mais relève que « selon des études menées par de grands acteurs internationaux, il serait plus de 100 fois supérieur au trafic de données mesuré sur les réseaux mobiles. »

C'est évidemment la baisse des prix (-27% en 2013) qui explique ce recul du chiffre d'affaires dans le mobile. La facture moyenne mensuelle des clients mobiles a encore diminué de 15,5% à 16,10 euros (hors taxe) au premier trimestre, par rapport à la même période l'an passé, contre 24,10 euros fin 2011 avant l'arrivée de Free Mobile. C'est moitié moins que dans le fixe (33,20 euros, en repli de 2,1%), même s'il faut relativiser la comparaison entre un forfait individuel et un abonnement pour tout un foyer. Cette forte contraction des ventes, et partant des marges, s'est aussi traduite dans les valorisations boursières des opérateurs mobiles, laissant la vedette aux champions du fixe.

Le fixe est l'avenir du mobile ?

Faut-il en conclure que le fixe, c'est l'avenir ? Ayant fait fortune dans l'ADSL, Xavier Niel a lancé Free dans le mobile parce qu'il avait besoin d'un relais de croissance et de devenir un opérateur convergent, proposant des services fixes et mobiles. Bien lui en a pris, la capitalisation boursière d'Iliad, la maison-mère de Free, a plus que doublé depuis janvier 2012 et dépasse 12,7 milliards d'euros, plus que le groupe Bouygues dans son ensemble (BTP, immobilier, routes, TF1, etc). Signe des temps, Free est devenu le troisième opérateur français, en nombre cumulés d'abonnés et en chiffre d'affaires, devant Bouygues Telecom.

Martin Bouygues a d'ailleurs fait valoir mardi lors d'une audition à l'Assemblée nationale que le régulateur avait « sous-estimé le fait que le nouvel entrant pouvait utiliser sa puissance et ses fortes marges du fixe pour détruire le marché mobile. » Or Bouygues Telecom « est le seul opérateur non convergent en France » (seulement 2 millions d'abonnés dans le fixe) relevait le PDG d'Orange, Stéphane Richard, en avril. Ce qui, en plus de sa taille plus réduite, le rend plus vulnérable à cette guerre des prix.

Bouygues Telecom réplique en déplaçant les hostilités dans le fixe, dans l'ADSL et la fibre, pour s'attaquer aux marges « supérieures à celle de certains groupes de luxe » de son concurrent : 43,6% de marge d'Ebitda pour Free dans le fixe en 2013, plus du double de celle Bouygues Telecom (mobile et fixe), tombée à 19%. Numericable aussi génère une marge élevée, typique des câblo-opérateurs, de l'ordre de 46% : son actionnaire Patrick Drahi avait d'ailleurs déclaré, en présentant son projet de rachat de SFR au printemps, qu'il s'agissait du « sens de l'histoire », du fait de la convergence, et que « l'avenir du mobile, c'est le fixe ! » L'adage vaudra aussi peut-être pour Bouygues Telecom, s'il finit par se faire racheter par Free, que certains appellent « le prince du dégroupage »...

Delphine Cuny

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Commentaires 7
à écrit le 05/07/2014 à 14:02
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Normal, je me désabonne chez Bouygues. Même le numéro pour contacter le service clientèle si problème est payant !! C'est vraiment de l'arnaque.

le 09/07/2014 à 3:42
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Travaillez-vous gratuitement? Pour offrir une prestation à bas coût il n'est pas anormal de facturer des services jugés non stratégiques par certains clients. Tout comme vous n'êtes pas obligé d'acquérir un 20 m3 pour réaliser le trajet domicile-trav...

à écrit le 05/07/2014 à 8:02
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Normal : perso, je paie un abonnement fixe... qui ne me sert QUE pour internet ! Comment être plus rentable puisque l'abonnement tél ne sert pas ???!

le 05/07/2014 à 8:57
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Et vous faites comment pour votre entreprise virtuelle!

à écrit le 04/07/2014 à 10:01
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Ils sont obligés d'investir dans le mobile mais plus dans le fixe ... c'est évident que l'un est plus rentable que l'autre.... on se paye du vieil ADSL pourri en province.... si au moins ils densifiait les NRA pour permettre à toutes les villes/villa...

à écrit le 04/07/2014 à 8:49
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Je trouve que leur boxe est trop chère à 37 euros par mois, j'attends Le câble qui arrive chez moi pour changer. Trois mois à patienter.

à écrit le 03/07/2014 à 20:35
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les investissements mobiles seront a l'avenant; ca va vite coincer quand les gens voudront des debits ( mais rien payer).... faudra bien segmenter et faire du yield management a plein...

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