Ciel dégagé pour le marché du jeu vidéo en 2016

Porté par la nouvelle génération de consoles, l’essor des jeux sur mobile et les perspectives alléchantes de la réalité virtuelle, le marché français du jeu vidéo s’attend à une forte croissance en 2016, dans la continuité d’une excellente année 2015 où son chiffre d’affaires a atteint 2,87 milliards d’euros.
Sylvain Rolland
L'arrivée des casques de réalité virtuelle et de la console Nintendo NX pourraient encore booster le marché en 2016.

La partie est loin d'être finie pour le marché français du jeu vidéo. Bien au contraire, il se porte comme un charme et affiche une croissance à faire pâlir bien des secteurs. Plus que jamais deuxième industrie culturelle hexagonale derrière le livre, le jeu vidéo a réalisé un chiffre d'affaires de 2,87 milliards d'euros en 2015. Soit une progression de 6% sur un an, selon l'étude semestrielle du Syndicat des éditeurs de logiciels de loisirs (SELL), en partenariat avec Gfk.

Signe révélateur de cette santé de fer : alors que la plupart des secteurs, notamment la grande distribution et le tourisme, ont subi un « effet attentats », c'est-à-dire un ralentissement de la consommation suite aux attaques du 13 novembre, le jeu vidéo filait, imperturbable, vers un nouveau record. Un million de consoles ont été vendues pour les fêtes de Noël, soit une augmentation de 30% par rapport à 2014. « Du jamais-vu », souligne Jean-Claude Ghinozzi, le président du SELL.

Cette croissance robuste s'explique par une série de facteurs qui, lorsqu'on les combine, créent un cercle vertueux, à l'œuvre depuis 2014. Les résultats 2015 confirment que le jeu vidéo vit un "cycle" positif, après cinq années de baisse (2009-2013). Et cela devrait durer en 2016 et au-delà, estiment les analystes. Explications.

De plus en plus d'adeptes

C'est une tendance de fond depuis de nombreuses années. Mais la démocratisation des jeux vidéo s'accélère sous l'effet des progrès de la technologie, du succès intergénérationnel de Facebook qui propose de nombreux jeux, et de la diversification globale du catalogue.

Voyez plutôt : à l'aube des années 2000, seuls 20% des Français, de 21 ans en moyenne, se déclaraient joueurs réguliers. Et 80% d'entre eux étaient des hommes. Quinze ans plus tard, la sociologie des joueurs a drastiquement changé, mettant à mal le célèbre cliché du jeune geek boutonneux retranché derrière son ordinateur.

En 2015, 53% des Français se considèrent comme des joueurs réguliers, et 74% se disent joueurs occasionnels. L'âge moyen a reculé à 35 ans (27 ans en 2005, 32 ans en 2010), signe que le jeu vidéo élargit doucement mais sûrement son audience, y compris aux plus de 55 ans, qui sont 59% à s'adonner à la pratique régulière des jeux vidéo.

Enfin, les femmes jouent désormais presque autant que les hommes (44% contre 56%).

"D'une industrie de geek, le jeu vidéo devient au fur et à mesure une industrie grand public, il se démocratise à toutes les tranches d'âge et à toutes les catégories socio-professionnelles", résume Laurent Michaud, analyste et chef de projet Loisirs numérique à l'Idate.

Cohabitation harmonieuse entre le physique et le digital

Dans le détail, la croissance du secteur en 2015, comme en 2014, est tirée par une cohabitation harmonieuse entre le « physique » et le digital. Preuve de l'évolution des usages, les ventes de logiciels et de jeux dématérialisés représentent désormais 1 milliard d'euros, soit une progression sensible de 23% sur un an.

"Mais la partie physique reste stable en valeur", note Jean-Claude Ghinozzi, qui pointe que les ventes cumulées de consoles et de jeux physiques pèsent toujours 55% du chiffre d'affaires global du secteur. Sans compter l'augmentation des ventes d'accessoires (casques, manettes...), qui représentent 10% du marché.

La résistance du physique s'explique en partie par le dynamisme des ventes de consoles de "génération 8", c'est-à-dire les modèles Wii U et 3 DS de Nintendo, la Playstation 4 et la PS Vita. En 2015, le chiffre d'affaires de ces consoles a progressé de 2%, tandis que celui des logiciels associés a bondi de 31%. Au total, la génération 8 pèse 96% des ventes de consoles (4% pour les modèles de la génération 7 comme la Nintendo DS, la Wii ou la Playstation 3) et 79% des ventes de logiciels sur console.

L'essor des jeux sur mobile

Toutefois, un nuage vient légèrement obscurcir ce tableau idyllique. La popularité croissante des jeux sur mobile se traduit certes par une progression de 30% de ses revenus (260 millions en 2015 contre 200 millions en 2014), mais ce segment ne pèse toujours qu'une goutte dans l'océan d'un marché de 2,87 milliards d'euros.

Conformément à l'évolution des usages, le SELL estime que les ventes de jeux sur mobile devraient nettement progresser l'an prochain. Mais pas de quoi rattraper le retard français vis-à-vis des Etats-Unis, où les ventes de jeux sur smartphones et tablettes pourraient dépasser en 2016, et ce pour a première fois, celles de jeux sur console et PC.

Mais ce retard français n'est pas forcément vécu comme une mauvaise chose pour les éditeurs. Et pour cause, la rentabilité des jeux sur mobile ne fait pas rêver. Toujours selon Deloitte, là où on estime qu'un jeu console rapporte en moyenne 4,8 millions de dollars, un jeu mobile engrange à peine 40.000 dollars...

La réalité virtuelle va-t-elle exploser en 2016 ?

"L'industrie du jeu vidéo se réinvente tout le temps, l'innovation est son moteur", explique Jean-Claude Ghinozzi. Chaque génération de console a ainsi connu son innovation majeure qui a permis de démultiplier la croissance, à l'image de la Wii pour la génération 7.

La réalité virtuelle sera-t-elle l'innovation révolutionnaire de la génération 8 ? L'arrivée prochaine (probablement au deuxième trimestre) du casque Playstation VR de Sony, du HTC Vive, de l'Oculus de Facebook en avril, et l'ébullition des géants du net sur le sujet (Microsoft avec son casque Hololens, les investissements récents de Google et d'Apple), annoncent une année 2016 marquée par l'éclosion de la réalité virtuelle dans le jeu vidéo grand public.

Le marché pourrait aussi bénéficier de l'arrivée probable d'une nouvelle console, la Nintendo NX, qui se veut à la fois une console de salon et une console portable, au plus près de l'évolution des usages. De quoi atteindre la barre symbolique des 3 milliards d'euros de chiffre d'affaires ?

Sylvain Rolland

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