Big data : le français Alkemics lève 20 millions d’euros pour révolutionner la gestion des données

Pour son deuxième tour de table, la startup française Alkemics lève 20 millions d’euros auprès de Serena Capital, du fonds franco-chinois Cathay Innovation et de ses investisseurs historiques, pour se développer à l’international. Sa plateforme de partage des données produits entre les marques et les distributeurs comme Auchan contribue à la digitalisation du secteur de la grande consommation grâce au big data.
Sylvain Rolland
Créée en 2011, Alkemics connecte les marques et les distributeurs de la grande consommation grâce à la "smart data"

On le sait : la donnée est le pétrole du 21e siècle. Comprendre, maîtriser, gérer et partager les données pertinentes, que ce soit sur les clients ou sur les produits, est essentiel pour les entreprises en quête de productivité et d'amélioration du service client. Evidemment, le secteur de la grande consommation n'échappe pas au phénomène. Surtout à l'heure de la généralisation du e-commerce et du m-commerce, qui démultiplient les canaux de vente (magasins physiques, sites web, applications, catalogues...) et même les formats, puisque le même produit peut être vendu avec un emballage et un prix différent sur chaque canal.

Pour les consommateurs, pouvoir accéder en ligne aux données détaillées des produits, comme la composition du tee-shirt, la valeur nutritionnelle du pot de yaourt, les éventuels labels, paraît un service minimum. Mais pour les milliers de marques et les dizaines de distributeurs qui commercialisent 400.000 nouveaux produits tous les ans en France, c'est un défi considérable. Surtout qu'il faut transmettre les données de chaque produit à chaque distributeur.

"Chaque nouveau produit complexifie la chaîne logistique de la marque et de ses partenaires distributeurs, ce qui complexifie aussi l'analyse des ventes et donc la capacité à identifier et à comprendre les comportements d'achats", explique Antoine Durieux. Positionnée sur ce marché porteur, sa startup, Alkemics, vient de le lever 20 millions d'euros en Série B auprès de grands fonds français (Senera Capital, Partech Ventures, SEB Alliance) et étrangers (le chinois Cathay Innovation, le londonien Index ventures).

La smart data pour digitaliser la relation marques / distributeurs

Créée en 2011, Alkemics connecte les marques et les distributeurs de la grande consommation grâce aux "smart data". Les smart data ? C'est l'étape d'après du big data, celle qui permet, dans l'immense botte de foin des données, d'en extraire les aiguilles pertinentes, celles qui leur donnent de la valeur, permettent d'en tirer les bonnes informations, au bon moment, pour les bonnes personnes.

Grâce à sa plateforme collaborative en mode Saas (Software as a service, c'est-à-dire un service sur abonnement disponible dans le cloud), Alkemics permet aux marques d'importer tous ses outils internes (ventes, marketing, logistique...), et donc de gérer depuis une seule et même plateforme toutes les données produits. Ces données sont ensuite partagées avec ses partenaires distributeurs, qui les utilisent pour leur commercialisation sur les différents canaux et pour leurs outils marketing et analytiques. Cerise sur le gâteau : les données sont synchronisées et actualisées en permanence, ce qui permet aux deux parties de s'adapter de manière souple aux incessantes mises à jour de la réglementation.

"Nous sommes les seuls sur le marché à proposer une solution aussi complète, qui gère le circuit de la donnée de A à Z, ce qui simplifie énormément les relations entre les marques et leurs distributeurs et fait gagner du temps à tout le monde", revendique Antoine Durieux. De quoi en finir une fois pour toutes avec les "processus archaïques" comme les bons vieux fichiers Excel remplis à la main pendant des heures. Et de citer l'exemple de la marque de produits d'entretien bio L'Arbre Vert, qui aurait gagné 30% de productivité dans l'échange avec ses distributeurs.

Cap sur l'international, en commençant par l'Espagne

Très discrète, Alkemics doit son succès actuel à la capacité d'adaptation de ses trois dirigeants, le Pdg Antoine Durieux, 29 ans, le directeur technique Antoine Perrin, 26 ans, et le directeur des opérations Benoît Portoleau, 35 ans. Deux ans de recherche et développement ont été nécessaires avant de lancer le produit, fin 2014, et d'effectuer une première levée de fonds de Série A, en mars 2015, de 5 millions d'euros. Entre temps, la startup a eu besoin de "pivoter" pour trouver sa vraie proposition de valeur, comme l'explique Antoine Durieux:

"A l'origine, on travaillait sur un super moteur de recherche pour les distributeurs comme Auchan, pour permettre aux clients de trouver des produits en fonction de leurs caractéristiques, comme "très épicé" ou "sans sucre ajouté". Mais en parlant avec eux, on s'est rendus compte qu'eux-mêmes ne disposaient pas de ces données, ce qui nous a poussés à nous réorienter".

Aujourd'hui, la startup emploie 55 personnes, toutes situées dans la capitale, contre 15 il y a un an. Dans la même période, son portefeuille est passé de 800 à 2500 marques, dont quelques "grosses" enseignes d'alimentaire, ainsi qu'une poignée de distributeurs dont Auchan (et sa filiale Simply Market), le groupe Casino et Walmart.

La nouvelle levée de fonds, de 20 millions d'euros, auprès d'investisseurs reconnus pour leur expérience avec les startups en hyper-croissance (Cathay Innovation, Serena Capital), vise à passer le cap de l'internationalisation et de renforcer ses équipes commerciales, marketing et techniques. L'objectif : "améliorer encore la simplification de la plateforme pour attirer de plus en plus de petites PME en plus des grands groupes", indique Antoine Durieux.

Côté international, un partenariat récent avec le géant américain Walmart permet à Alkemics de placer un pied dans la porte de l'immense marché américain. "Nos perspectives de développement sont d'abord orientées vers l'Espagne, où nous avons effectué quelques recrutements", indique Antoine Durieux, qui estime que son modèle est facilement duplicable à l'étranger une fois que la législation locale a été intégrée. L'Europe, les Etats-Unis et la Chine, "laboratoire du e-commerce et des pratiques de demain", devraient suivre.

Sylvain Rolland

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