L'e-commerce de l'art a le vent en poupe

Le marché de l'art en ligne connaît une croissance insolente. D'ici cinq ans, il devrait plus que doubler en valeur, pour atteindre 3,76 milliards de dollars - contre 1,57 milliard en 2013 -, selon le dernier rapport Hiscox/ArtTactic, publié fin avril.
Robert Rogal, directeur de la RoGallery à New York, comptait déjà en août 2013 quelque 6.000 fiches et images d’oeuvres en vente sur le site d’Amazon./ DR

« Les achats d'art en ligne comptent pour 2,4% de la valeur globale estimée du marché de l'art, qui représente 65 milliards de dollars en 2013 », précise le rapport Hiscox/ ArtTactic.

L'envol du marché online, déjà bien senti en 2013, se confirme. Car le virage numérique a été pris par l'ensemble des acteurs du commerce de l'art. Surtout, de nouveaux opérateurs s'imposent directement en tête des ventes : dans le classement 2013 publié par Skate's, six sociétés font leur entrée dans le top 10 et quatre sont des entreprises en activité depuis moins de cinq ans. Les nouveaux acteurs pullulent. Selon le rapport Deloitte/ ArtTactic 2013, plus de 300 sites en ligne rattachés au domaine de l'art ont été ouverts au cours l'année précédente.

Et ce chiffre est en constante augmentation. Ils se spécialisent dans les plates-formes de négoce d'oeuvres d'art en B2B et entre particuliers, les ventes aux enchères ou encore les galeries en ligne.

Des acteurs dominants des ventes en e-enchères

Mais le classement est toujours dominé par Christie's, qui a donné une forte impulsion à ses enchères exclusives sur Internet dès 2012, impulsion confirmée par sa première vente uniquement en ligne en mars 2013 avec « Andy Warhol @ Christie's » en partenariat avec la Fondation Andy Warhol. Parfois, ce sont les collaborateurs des grandes maisons qui lancent leur propre site Web d'enchères : en avril 2013, Georges Bailey, directeur du Business Development chez Sotheby's, a créé The Auction Room, plate-forme spécialisée sur le marché milieu de gamme. Lancé en 2012, Auctionata fait une entrée remarquée en cinquième position du palmarès Skate's. La maison, qui transpose le système d'enchères classique sur Internet, a récemment renforcé son capital à 52 millions de dollars. Dès juin 2013, elle avait battu le record de vente en ligne, avec une oeuvre d'Egon Schiele, cédée pour 2,4 millions de dollars.

Une galaxie marchande variée et en expansion

Auctionata n'est pas le seul à bénéficier de la confiance de ses investisseurs. Paddle8, 1stdibs, Artspace, Artsy, Artuner, Artfinder ou encore Saatchi online se renforcent.

« La croissance significative de l'investissement dans des plates-formes comme Paddle8, Artsy et Artspace est signe d'une continuité de la confiance des investisseurs et de leur foi dans le potentiel de ce type de transactions à long terme », analyse le rapport Hiscox.

Le portail français Expertissim, qui a également levé des fonds, réalise un chiffre d'affaires de 10 millions d'euros et le double tous les ans. Avec des prix de départ autour de 500 euros, Artsper se positionne sur le même segment. Pourtant, en 2013, le monde feutré et désormais digital du marché de l'art a été bousculé par l'arrivée du géant américain Amazon, qui a lancé Amazon Fine Art Gallery en partenariat avec des galeries et des maisons de ventes aux enchères « pour acquérir de la crédibilité », ainsi que le commente le rapport Skate's.

Près de 40.000 oeuvres d'art originales sont en vente dans une vaste gamme de prix, de quelques centaines d'euros pour une photographie à plusieurs millions pour un Andy Warhol. Car Amazon cherche surtout à attirer des nouveaux collectionneurs en présentant des oeuvres à un prix abordable. Avec cette ouverture, Amazon se pose comme un concurrent direct de sociétés dont l'activité principale est la vente en ligne d'oeuvres d'art, à l'image d'Artnet. Dans la foulée de ce lancement qui a fait grand bruit, Artprice - numéro un mondial des données sur le marché de l'art - a d'ailleurs sorti une application destinée à faciliter les achats des clients Amazon.

C'était sans compter sur l'autre géant eBay, qui a annoncé le 8 mai dernier un partenariat avec Invaluable, leader du marché des ventes aux enchères en ligne. Il donnera la possibilité à ses utilisateurs de participer aux ventes « live » de maisons de ventes du monde entier. Ainsi, les lots de plus de 2.000 maisons de ventes seront disponibles pour ses 145 millions d'utilisateurs. À l'opposé, dans une logique haut de gamme, ArtViatic - plateforme privée d'achats et de ventes de gré à gré sans intermédiaires et à taux bas - table sur un segment particulier du marché : les oeuvres d'exception, impressionnistes, modernes et contemporaines, estimées à plus de 150.000 euros. Ce qui lui réussit puisqu'en février 2014 ArtViatic.com a battu le record mondial de la vente privée d'oeuvre d'art en ligne, cédant un Marc Chagall pour 1,83 millions de dollars.

Les e-collectionneurs, de nouveaux acheteurs

Si la tendance de ces nouvelles plates-formes est de réduire les coûts de transaction, elle fait aussi tomber les barrières entre acheteurs et vendeurs. Les artistes peuvent mettre directement à disposition leurs oeuvres en dépôt, avec Saatchi Online, ou des opérateurs comme Artuner, créé en 2013, organisent directement des expositions on-line afin d'atteindre un plus large public.

Et ces nouveaux collectionneurs ne sont pas uniquement des silver surfers, ces plus de 50 ans à haut pouvoir d'achat : ce type de ventes attire de plus en plus de jeunes primo-acquéreurs. Le rapport Hiscox pointe également que les acheteurs nouvelle génération n'hésitent pas à se lancer dans une première acquisition d'oeuvre d'art en ligne, soit près de 25% des 20-30 ans interrogés. Mais les sites de vente d'art online ne semblent pas menacer directement l'activité des galeries traditionnelles. Les deux systèmes fonctionneraient plutôt de manière complémentaire. En tout cas, le développement fulgurant des ventes d'art sur Internet ne devrait pas constituer une révolution concurrentielle comparable à celle qui a frappé l'industrie de la musique et du cinéma ou encore l'édition, commente Hiscox.

Ainsi, de plus en plus de transactions se font à distance et en temps réel. Ce qui a pour effet d'ajouter de la liquidité au marché et d'enrichir les données disponibles dans ce domaine. Internet est un puissant levier d'information. La collecte et le traitement des données constituent un enjeu central dans un marché en constante inflation, opérés par des spécialistes comme Artprice, Artnet, Art Analytics, ArtTactic, Blouin Art Sales Index ou Artfacts, entre autres. Car l'avenir du commerce de l'art en ligne repose également sur l'évolution du traitement de ces big data.

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Commentaire 1
à écrit le 19/08/2014 à 9:20
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QUAND ON S EST POUQUOI L ART N EST PAS FISCALISE? ONT CONPRENT QUE CELA RESTE UN TRES BON PLACEMENT POUR TOUS LES RICHES DE LA PLANETTE???

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