Italie : une appli pour couper les fonds à la mafia

À Palerme, une association active dans la lutte contre le racket permet désormais de géo-localiser les commerces qui refusent de se soumettre à ce chantage de Cosa Nostra.
Giulietta Gamberini
En 2006, Addiopizzo lançait la campagne anti-racket "Je paye ceux qui ne paient pas", recensant une centaine d'opérateurs économiques refusant publiquement de se soumettre au chantage de la mafia.

Pour lutter contre l'un des pires fléaux qui frappent la ville, à savoir le racket imposé par la mafia aux commerçants locaux, les habitants de la ville de Palerme peuvent désormais se tourner vers la technologie. Une application pour smartphones et tablettes permettant de géolocaliser les magasins et les services qui refusent de payer à Cosa Nostra le célèbre "pizzo" -taxe exigée en contre-partie d'une soi-disant protection- vient d'être lancée dans la capitale de la Sicile.

"Je paye ceux qui ne paient pas"

L'initiative est due à l'association Addiopizzo, créée en 2004 autour d'une courageuse opération inédite : l'apposition sur les murs de la ville de plus d'un millier d'autocollants coup de poing. Ressemblant à des avis de décès, ils portaient une inscription qui est devenue depuis l'un des slogans de l'association: "Un peuple entier qui paie le 'pizzo' est un peuple sans dignité".

En 2006, Addiopizzo lançait la campagne anti-racket "Je paye ceux qui ne paient pas", recensant une centaine d'opérateurs économiques refusant publiquement de se soumettre au chantage de la mafia. Aujourd'hui, les commerçants "pizzo free" sont un millier, et l'association passe à la vitesse technologique supérieure.

 "L'extorsion est la mère de tous les crimes"

L'application, qui permet aussi de mener des recherches par produits et zones géographiques, vient donc s'ajouter au guide papier qu'Addiopizzo édite et distribue gratuitement depuis des années, afin de permettre aux consommateurs d'intégrer la dimension éthique et politique dans leurs choix.

"L'extorsion est la mère de tous les crimes puisque sa fonction est d'établir, consolider et étendre le pouvoir de la mafia sur le territoire. Le racket est la manifestation de la seigneurie territoriale de Cosa Nostra sur la ville de Palerme", explique l'association sur son site.

De plus en plus de commerçants opposés à la mafia

Il s'agit également d'accompagner et encourager le changement. Présent à la cérémonie de lancement de l'application aux côtés du maire de la ville Leoluca Orlando, du président du sénat italien Pietro Grasso et du commissaire national anti-racket santi Giuffré, le procureur de Palerme Franco Lo Voi observait:

"L'attitude de nombreux commerçants a changé à Palerme. Dans le passé, ils niaient même l'évidence du paiement du 'pizzo', alors qu'aujourd'hui beaucoup d'entre eux le dénoncent. Certes, il est vrai que nombre d'entre eux ne dénoncent seulement qu'après la découverte de l'infraction mais certains le font aussi avant."

Les touristes sensibilisés

Deux autres outils plus spécifiquement destinés aux touristes ont en même temps été lancés par l'association. D'une part, une seconde appli permettra à ces derniers de repérer et réserver des excursion proposées par la branche tour operator d'Addiopizzo et de choisir un lieu de séjour "pizzo free". De l'autre, un plan touristique de Palerme imprimé en allemand et en anglais signalera à côté des lieux touristiques les entreprises qui s'opposent à la mafia.

"Il ne s'agit pas d'une campagne de boycot contre ceux qui se trouvent encore dans les mailles de la mafia", a tenu à préciser l'association. "Mais nous voulons soutenir les commerçants et les entrepreneurs qui ont le courage de dénoncer."

Giulietta Gamberini

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